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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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grande surprise de Hossbach, Hitler accepta, et le
commandant en chef de l'armée allemande fut convoqué à la Chancellerie tard
dans la soirée du même jour. Il devait y subir une épreuve à laquelle sa longue
formation d'aristocrate, d'officier et de gentilhomme ne l'avait guère préparé.
La séance eut lieu dans la bibliothèque de la Chancellerie et cette fois
Himmler était présent, ainsi que Gœring. Après qu'Hitler eut rappelé les
accusations, Fritsch lui donna sa parole d'honneur qu'elles étaient
complètement fausses.
    Mais de telles assurances n'avaient plus grande valeur dans le
Troisième Reich et à ce moment Himmler, qui depuis trois ans attendait son
heure; fit entrer par une petite porte un homme qui marchait en traînant les
pieds et avait l'air d'un dégénéré, sans doute l'un des plus étranges
personnages, sinon l'un des plus louches, qui aient jamais été introduits dans
les bureaux de la Chancellerie d'Allemagne. Il se nommait Hans Schmidt et avait
derrière lui un long passé de prisonnier, remontant à son adolescence, où il
avait été envoyé en maison de correction.
    On sut par la suite que le délit dont il s'était le plus souvent
rendu coupable consistait à épier les homosexuels pour les faire chanter. Il
prétendit cette fois reconnaître en la personne du général von Fritsch
l'officier qu'il avait surpris commettant un délit d'homosexualité dans une
ruelle sombre, près de la station du chemin de fer de Potsdam, à Berlin, en
compagnie d'un individu appartenant à la pègre, connu sous le nom de Jo le
Bavarois [83] .
Pendant des années, affirma Schmidt aux trois plus puissants personnages de
l'Allemagne, cet officier lui avait versé de l'argent pour acheter son silence,
les paiements n'ayant cessé que le jour où la justice l'avait à nouveau enfermé
derrière les barreaux d'un pénitencier.
    Le général baron von Fritsch était trop indigné pour répondre.
Le spectacle du chef de l'État allemand, successeur de Hindenburg et des
Hohenzollern, introduisant un individu aussi suspect dans un pareil endroit,
pour un tel but, c'était plus qu'il n'en pouvait supporter! Son mutisme ne fit
que convaincre Hitler de sa culpabilité et le Führer lui demanda sa démission.
Fritsch refusa de la donner, exigeant à son tour d'être convoqué devant un jury
d'honneur composé de militaires. Mais Hitler n'avait pas la moindre intention
de laisser la caste militaire s'emparer de l'affaire, du moins pour le moment.
Il avait là une occasion providentielle, qu'il ne laisserait pas échapper,
d'écraser l'opposition des généraux qui refusaient de se courber devant sa
volonté et son génie.
    Il ordonna sur-le-champ à Fritsch de prendre un congé illimité,
ce qui équivalait à sa suspension en tant que commandant en chef de l'armée. Le
lendemain, Hitler conférait avec Keitel au sujet du successeur à donner, non
seulement à Blomberg, mais à Fritsch. Dès lors Jodl, dont la principale source
d'information était Keitel, commença à émailler son journal de notes d'où il
ressort qu'un remaniement radical destiné à mettre les militaires au pas était
en cours d'exécution, non seulement dans le haut commandement, mais dans toute
l'organisation des forces armées.
    Les grands chefs militaires allaient-ils abdiquer leur pouvoir
qui, tout en n'étant certes pas absolu, demeurait le seul à échapper encore à
l'étreinte d'Hitler? Quand Fritsch regagna son appartement de la
Bendlerstrasse, à la suite de l'épreuve qu'il lui avait fallu subir dans la
bibliothèque de la Chancellerie du Reich, il eut un entretien avec le général
Beck, chef de l'état-major de l'armée. Certains historiens anglais (10) ont
prétendu que Beck le pressa de fomenter aussitôt un putsch militaire contre le
gouvernement hitlérien et que Fritsch refusa. Mais Wolfgang Foerster, le
biographe allemand de Beck, qui eut en main les papiers personnels du général,
déclare simplement que, le soir de cette fatale journée, Beck vit d'abord
Hitler qui lui fit part de ces graves accusations, puis Fritsch qui les nia et
que finalement, tard dans la soirée, il retourna en hâte auprès d'Hitler pour
lui demander que le chef de l'armée fût du moins autorisé à se disculper devant
un tribunal militaire.
    Beck, lui non plus — son biographe le montre bien, — ne
possédait pas encore à l'époque cette profonde compréhension de la mentalité
des dirigeants du Troisième Reich, qu'il devait acquérir

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