Le Troisième Reich, T1
l'Italie dans l'éventualité d'une action militaire,
mon point de vue est le suivant :
Si l'Allemagne attaque la Pologne [218] et que le conflit reste localisé, l'Italie apportera à l'Allemagne toute forme
d'assistance politique et économique réclamée par celle-ci.
Si l'Allemagne attaque la Pologne et que les alliés de
cette dernière contre-attaquent l'Allemagne, je vous informe par avance que je
ne puis prendre l'initiative d'opérations de guerre étant donné l'état actuel
des préparatifs militaires de l'Italie, état qui a été signalé maintes fois et
en temps opportun à vous, Führer, ainsi qu'à Herr von Ribbentrop.
Toutefois nous pourrons intervenir immédiatement si
l'Allemagne nous fournit dès le début les munitions et les matières premières
nécessaires pour soutenir le choc que nous aurons sans doute à subir de la part
des Anglais et des Français.
Lors de nos précédentes rencontres, la guerre avait été
prévue pour 1942, et à cette date j'aurais été prêt sur terre, sur mer et dans
les airs, selon les plans convenus.
Je suis en outre d'avis que les mesures d'ordre militaire
qui ont déjà été prises et d'autres qui sont à prendre ultérieurement
immobiliseront en Europe et en Afrique des forces françaises et britanniques
considérables.
Je considère qu'il va de mon impérieux devoir de loyal ami
de vous dire toute la vérité et de vous informer à l'avance de la situation
réelle. M'en abstenir pourrait avoir pour nous tous les plus désagréables
conséquences. C'est là mon opinion, et puisque, dans peu de temps, je vais
convoquer les organismes supérieurs de l'État, je vous demande de me faire
connaître la vôtre.
Mussolini (15) [219] .
Ainsi, la Russie avait beau être dans le coup en qualité de
neutre bienveillant et non plus de belligérant, l'alliée de l'Allemagne dans le
Pacte d'Acier s'arrangeait pour rester en dehors — et cela, le jour même où la
Grande-Bretagne semblait s'être irrévocablement engagée en signant avec la
Pologne un traité d'assistance mutuelle contre l'agression allemande. Hitler
prit connaissance de la lettre du Duce et, après avoir dit à Attolico qu'il
allait y répondre immédiatement, congédia d'un ton glacé l'émissaire italien.,
« Les Italiens se conduisent exactement comme ils l'ont
fait en 1914. » Le docteur Schmidt entendit Hitler
proférer cette remarque amère sitôt le départ d'Attolico, et, le même soir, la
Chancellerie lui faisait écho en tenant des propos dénués de douceur envers le
« partenaire déloyal de l'Axe ». Mais les mots ne suffisaient pas. L'armée
allemande, dans dix heures exactement, allait fondre sur la Pologne, car on
était déjà au 25 août à dix-huit heures trente et l'invasion devait commencer
le 26 à quatre heures trente du matin. C'était au dictateur nazi de décider
immédiatement s'il devait, en raison des nouvelles de Londres et de Rome,
déclencher, renvoyer ou annuler l'attaque.
En sortant du bureau d'Hitler en compagnie d'Attolico, Schmidt se heurta au général Keitel, qui se précipitait chez le Führer. Quelques minutes plus tard, le général sortit de la
pièce, tout aussi vite qu'il y était entré, en criant avec agitation à son aide
de camp : « L'attaque est encore remise! »
Hitler, acculé par Mussolini et Chamberlain, avait rapidement
pris sa décision. « Führer, considérablement ébranlé »,
nota dans son carnet Haider, qui poursuivit alors :
19 h 30 . — Ratification du traité
anglo-polonais. Pas d'ouvertures d'hostilités. Stopper tous mouvements de
troupes, même près frontières, si impossible faire autrement.
20 h 35 . — Keitel confirme. Canaris : restrictions
téléphoniques levées sur l'Angleterre et la France. Confirme évolution des
événements.
Le registre des mouvements de la marine allemande fournit un
récit plus concis du renvoi du Jour J en en donnant les raisons :
25 août . — Plan Blanc stoppé à vingt heures trente
en raison modification contexte politique (Pacte d'Assistance mutuelle
anglo-polonais 25 août à midi et avertissement du Duce : il tiendra ses
engagements mais est forcé de demander d'importantes fournitures de matières
premières (16).
Trois des principaux accusés de Nuremberg présentèrent, au cours
du procès, leur propre version du renvoi de l'attaque (17). Ribbentrop
prétendit que, lorsqu'il eut connaissance du traité anglo-polonais et « apprit
» que des « mesures militaires contre
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