Le Troisième Reich, T2
répartit les forces pour Otarie et envoya 13
divisions d’élite aux emplacements qui, sur la côte de la Manche, devaient
servir de point de départ à la première vague d’invasion. Le même jour, le
commandant de l’armée mit au point un plan détaillé de débarquement sur un
vaste front de la côte sud de l’Angleterre.
La poussée principale, ici comme dans la Bataille de France, serait
exécutée par le Feldmarschall von Rundstedt, commandant du
groupe d’armées A (titre qu’il recevra le 19 juillet). Six divisions d’infanterie
de la XVIe armée du général Ernst Busch devaient embarquer
au Pas de Calais et atteindre les plages entre Ramsgate et
Bexhill. Quatre divisions de la IXe armée du général Adolf Strauss
traverseraient la Manche depuis la région du Havre et atterriraient entre
Brighton et l’île de Wight.
Plus à l’ouest, 3 divisions de la VIe armée du Feldmarschall
von Reichenau (du groupe d’armées B du Feldmarschall Bock),
partant de la presqu’île du Cotentin (Cherbourg), accosteraient dans la baie de
la Lyme, entre Weymouth et Lyme Regis. En tout, 90 000 hommes formeraient la première
vague ; au troisième jour, le Haut Commandement projetait de débarquer un
total de 260 000 hommes. Des troupes de renfort seraient déposées à Lyme Bay et autres régions. Une force
blindée de 6 panzer-divisions au moins, renforcée par 3 divisions motorisées, constituerait
une seconde vague ; on pensait avoir en quelques jours un total de 39
divisions à terre, plus 2 divisions aéroportées.
Leur tâche était la suivante : après s’être assuré des
têtes de pont, les divisions du groupe d’armées A au sud-ouest avanceraient
vers le premier objectif, une ligne allant de Gravelines à Southampton. La VIe armée de Reichenau s’avancerait
au nord vers Bristol, isolant le Devon et la Cornouailles.
Le second objectif serait une ligne entre Maldo’n, sur la côte est au nord de l’estuaire
de la Tamise, et la Severn, bloquant le Pays de Galles. « On s’attendait à
de grandes batailles avec de puissantes forces britanniques » quand les
Allemands auraient atteint leur premier objectif. Mais elles seraient vite
gagnées, Londres serait investi et le mouvement vers le nord repris (9). Le 17 juillet,
Brauchitsch dit à Raeder que toute l’opération serait terminée dans un mois et
qu’elle serait relativement facile (10) [78] .
Mais Raeder et l’amirauté étaient sceptiques. Une opération d’une
telle envergure sur un si vaste front – il s’étendait sur 300 kilomètres de Ramsgate à Lyme Bay – dépassait
les moyens de la marine allemande en convois et en protection. Raeder en
informa l’O. K. W. deux jours plus tard et y revint encore le 21 juillet
quand Hitler le convoqua, ainsi que Brauchitsch et le général Hans Jeschonnek (chef d’état-major de la Luftwaffe) à
Berlin. Le Führer était toujours troublé au sujet de « ce
qui se passait en Angleterre ». Il reconnut les difficultés de la marine
mais insista sur la nécessité de terminer la guerre aussi vite que possible.
Les renseignements anglais sur les plans allemands étaient
erronés et, pendant les trois premiers mois de la menace d’invasion, presque
complètement faux. Durant tout l’été, Churchill et ses conseillers militaires
demeurèrent convaincus que les Allemands feraient leur principale tentative de
débarquement sur la côte est : le gros des forces terrestres anglaises y
fut concentré jusqu’en septembre.
Pour l’invasion, 40 divisions seraient nécessaires, dit-il, et « l’opération
principale » devrait être terminée vers le 15 septembre. Dans l’ensemble,
le Seigneur de la Guerre était optimiste malgré le refus de Churchill d’écouter
son offre de paix.
La situation de l’Angleterre est sans espoir (Halder nota ces
paroles d’Hitler). La guerre a été gagnée par nous. Un renversement des chances
de succès est impossible (11).
Mais la marine, devant la terrible tâche de transporter une
forte armée de l’autre côté de la Manche houleuse, en face d’une marine
britannique infiniment plus forte et d’une aviation ennemie qui paraissait
encore assez active, n’était pas rassurée. Le 29 juillet, l’état-major de
la marine rédigea un mémorandum mettant en garde « contre l’entreprise de
l’opération cette année » et proposant qu’ « elle soit examinée en
mai 1941 ou plus tard (12) ».
Hitler, cependant, insista pour
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