Le Troisième Reich, T2
quatre semaines. En fait, le chef de l’aviation allemande pensait que seule
la Luftwaffe pouvait mettre l’Angleterre à genoux et qu’une invasion par des
forces terrestres ne serait probablement pas nécessaire.
Pour réaliser ce vaste objectif, il disposait de trois grandes
flottes aériennes ( Luftflotten ) : la IIe, sous le commandement du
Feldmarschall Kesselring, opérant à partir des Pays-Bas et du nord de la France ;
la IIIe, sous le commandement du Feldmarschall Sperrle, basée dans le nord de
la France, et la Ve, sous le commandement du général Stumpff, stationnée en
Norvège et au Danemark. Les deux premières totalisaient 929 chasseurs, 875
bombardiers et 316 bombardiers en piqué ; la Ve était beaucoup plus faible,
avec 123 bombardiers et 34 chasseurs bi-moteurs Me-110. Contre cette force
énorme, la R. A. F. disposait, au début d’août, de 700 à 800 chasseurs pour la
défense aérienne du royaume.
Pendant tout le mois de juillet, la Luftwaffe intensifia
graduellement ses attaques contre la navigation anglaise dans la Manche et sur
les ports méridionaux de l’Angleterre. C’était une opération de sondage. Bien
qu’il fût nécessaire de chasser du détroit les bateaux anglais avant qu’une
invasion pût débuter, le principal objectif de ces opérations préliminaires
était de forcer les chasseurs anglais à combattre. Ce plan échoua. Le
commandement de la R. A. F. refusa habilement d’engager plus d’une fraction de
ses chasseurs, et il en résulta un dommage considérable à la navigation et à
quelques ports. Quatre contre-torpilleurs et 18 navires marchands furent coulés,
mais ce combat préliminaire coûta à la Luftwaffe 296 appareils détruits et 135
endommagés. La R. A. F. perdit 148 chasseurs.
Le 12 août, Gœring donna l’ordre de lancer « Aigle »
le lendemain. Comme lever de rideau, de sévères attaques furent entreprises le
12 sur les stations radar de l’ennemi, dont 5 furent effectivement touchées et
endommagées et une détruite ; mais, à ce stade, les Allemands ne
comprirent pas combien le radar était vital pour la défense anglaise et ils ne
poursuivirent pas leur attaque. Les 13 et 14, les Allemands envoyèrent quelque 1 500
avions, la plupart contre les terrains de la R. A. F., et, s’ils annoncèrent qu’ils
en avaient « complètement détruit » 5, les dégâts étaient en réalité
négligeables. La Luftwaffe perdit 47 avions contre 13 seulement de la R. A. F. [83] .
Le 15 août vit la première grande bataille dans le ciel.
Les Allemands lancèrent le gros des trois flottes aériennes ; 801
bombardiers et 1 149 chasseurs sortirent. La Ve Flotte aérienne, opérant à
partir de la Scandinavie, rencontra le désastre. En envoyant 800 avions pour
une attaque massive de la côte sud, les Allemands avaient espéré trouver la
côte nord-est sans défense. Mais une force de 100 bombardiers, escortée par 34
chasseurs bimoteurs Me-110, fut surprise par 7 escadrilles de Hurricane et de
Spitfire comme elle approchait de la Tyne et fut sévèrement meurtrie. 30 avions
allemands, pour la plupart des bombardiers, furent abattus sans perte pour les
défenseurs. Ce fut la fin de la Ve flotte aérienne dans la bataille d’Angleterre.
Elle n’y revint jamais.
Au sud de l’Angleterre, le même jour, les Allemands eurent plus
de succès. Ils lancèrent 4 attaques massives, dont l’une réussit à pénétrer
presque jusqu’à Londres. A Croydon, 4 usines d’aviation furent touchées et 5
terrains de chasseurs R. A. F. endommagés. En tout, les Allemands perdirent 75 appareils
pour 34 de la R. A. F. [84] .
A ce taux, en dépit de leur supériorité numérique les Allemands pouvaient
difficilement espérer chasser la R. A. F. du ciel.
Puis Gœring commit la première de ses deux erreurs de tactique. L’habileté
du commandement anglais de la chasse, qui engageait ses avions dans une
bataille contre des forces offensives bien supérieures, reposait sur l’utilisation
adroite du radar. Dès leur décollage de leurs bases d’Europe occidentale, les
avions allemands étaient repérés sur les écrans de radar anglais, et leur route
si, correctement relevée que le ground control de la chasse savait
exactement où et quand il fallait les attaquer avec le maximum de chances. C’était
une nouveauté dans la guerre, et cela embarrassait les Allemands, qui, dans le
développement et l’usage de ce dispositif électronique, étaient très en
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