Le Troisième Reich, T2
à Berlin un message de mauvais augure.
Les interruptions causées par les forces aériennes de l’ennemi,
l’artillerie à longue portée et les forces légères navales ont, pour la
première fois, pris une importance capitale. Les ports d’Ostende, de Dunkerque,
de Calais et de Boulogne ne peuvent être utilisés comme mouillages de nuit pour
les bateaux, à cause du danger des bombardements anglais et de la canonnade. Des
unités de la flotte britannique peuvent à présent opérer presque sans
inquiétude dans la Manche. Par suite de ces difficultés, le regroupement de la
flotte d’invasion, exigera de nouveaux délais.
Le lendemain, les choses empirèrent. Des forces navales légères
anglaises bombardèrent les principaux ports d’invasion de la Manche, Ostende, Calais, Boulogne et Cherbourg, tandis que la R. A. F. coulait
80 chalands dans le port d’Ostende. A Berlin, ce jour-là, Hitler s’entretint
avec ses chefs de service pendant le déjeuner. Il pensait que la guerre
aérienne marchait très bien et déclara qu’il n’avait pas l’intention de courir
le risque d’une invasion (24). En fait, Jodl eut l’impression, d’après les
remarques du Führer, qu’il avait « apparemment décidé
d’abandonner tout à fait Otarie » ; impression qui était juste
ce jour-là, comme Hitler le confirma le lendemain quand, pourtant, il changea
encore d’idée.
Raeder et Halder ont
laissé tous deux des notes confidentielles sur la rencontre du Führer et de ses commandants en chef à Berlin le 14 septembre (25). L’amiral
s’arrangea pour glisser à Hitler un mémorandum avant l’ouverture de la séance, exposant
l’opinion de la marine selon laquelle,
… la situation actuelle dans les airs ne remplit pas les
conditions souhaitables pour l’exécution de l’opération ( Otarie ), car le
risque est encore trop grand.
Au début de la conférence, le Seigneur de la Guerre manifesta un
état d’esprit plutôt négatif, et ses idées étaient pleines de contradictions. Il
ne voulait pas donner l’ordre de lancer l’invasion, mais ne voulait pas non
plus l’annuler, et Raeder nota dans le Journal de guerre de la marine :
« Apparemment, il avait projeté de le faire le 13 septembre. »
Quelles étaient les raisons de son dernier revirement ? Halder les consigne avec certains détails :
Un débarquement couronné de succès (prétendit le Führer) et
suivi d’une occupation terminerait la guerre en peu de temps. L’Angleterre
serait affamée. Un débarquement ne doit pas nécessairement avoir lieu dans un
temps déterminé… Mais une longue guerre n’est pas à désirer. Nous avons jusqu’ici
accompli tout ce que nous voulions
Les espérances que l’Angleterre fondait sur la Russie et sur l’Amérique,
dit Hitler, ne se sont pas matérialisées. La Russie ne va pas verser son sang
pour l’Angleterre. Le réarmement de l’Amérique ne sera pleinement effectif qu’en
1945. Pour le moment, la « solution la plus rapide serait un débarquement
en Angleterre. La marine remplit les conditions nécessaires. Les opérations de
la Luftwaffe sont au-dessus de tout éloge. Quatre ou cinq
jours de temps convenable apporteront les résultats décisifs… Nous avons une
forte chance de mettre l’Angleterre à genoux ».
Qu’est-ce donc qui n’allait pas ? Pourquoi hésiter plus
longtemps à déclencher l’invasion ?
Les ennuis existaient, Hitler l’admettait :
L’ennemi se relève… Les chasseurs ennemis n’ont pas encore
été complètement éliminés. Les rapports sur nos succès ne donnent pas un
tableau positif, bien que l’ennemi ait été gravement touché.
En somme, déclara Hitler, « en dépit de tous nos succès les
conditions requises pour l’Opération Otarie n’ont pas encore été remplies ».
(C’est Halder qui souligne.)
Hitler résuma ses réflexions :
1. – Un débarquement couronné de succès signifie la
victoire, mais pour cela nous devons acquérir la suprématie aérienne.
2. – Le mauvais temps nous a jusqu’à présent empêchés d’atteindre
à cette suprématie.
3. – Tous les autres facteurs sont réunis.
Décision, par conséquent : On ne renonce pas encore à l’opération.
Étant arrivé à cette conclusion négative ; Hitler se laissa
aller là-dessus à formuler l’espoir que la Luftwaffe pût encore apporter une
victoire qui semblait se moquer de lui et persistait à lui échapper de justesse.
« Jusqu’à
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