Le Troisième Reich, T2
armées
disponibles sur un front s’étendant de la mer Baltique à la mer Noire, elle a
ouvertement menacé le Reich, etc. Mais citons le texte lui-même :
« Les informations reçues ces derniers jours par le
gouvernement du Reich ne laissent subsister aucun doute sur le caractère
agressif des rassemblements de troupes soviétiques… En outre, des informations
de source britannique confirment l’existence de négociations conduites par l’ambassadeur,
Sir Stafford Cripps, tendant à une étroite collaboration militaire entre la
Grande-Bretagne et l’Union Soviétique. Le gouvernement du Reich déclare qu’en
violation des engagements qu’il avait assumés le gouvernement soviétique s’est
rendu coupable :
1. D’avoir non seulement poursuivi mais intensifié ses
manœuvres de sape contre l’Allemagne et l’Europe.
2. D’avoir rassemblé à la frontière allemande toutes ses
forces armées sur pied de guerre.
3. De se préparer de toute évidence, en violation du Pacte
de non-agression germano-russe, à attaquer l’Allemagne.
En conséquence, le Führer a donné ordre aux forces armées
du Reich de parer à la menace selon tous les moyens dont elles disposent (112).
« Abstenez-vous de toute discussion sur la présente
communication », recommande Ribbentrop en conclusion.
Bouleversé, vaincu, que pouvait dire l’ambassadeur ? Lui
qui avait consacré les meilleures années de sa vie à améliorer les relations
entre son pays et l’U. R. S. S., savait que l’agression allemande était
injustifiable.
S’étant présenté dès l’aube au Kremlin, il se borna à lire à
Molotov la déclaration de Ribbentrop [123] .
Le ministre soviétique écouta la lecture en silence jusqu’au bout,
puis, abandonnant pour la première fois son impassibilité, prononça :
« C’est la guerre… trouvez-vous, monsieur l’ambassadeur, que
nous avons mérité cela ? »
A la même heure, une scène similaire avait lieu à la
Wilhelmstrasse. Durant tout l’après-midi du 21 juin, l’ambassadeur d’U. R.
S. S., Wladimir Dekanozov, avait tenté, par téléphone, d’obtenir un rendez-vous
avec Ribbentrop pour lui présenter sa petite protestation coutumière au sujet
de nouvelles violations de territoire par les avions allemands. « Son
Excellence est absente de Berlin », lui répondait-on invariablement.
Il s’acharna et, à la longue, le lendemain à deux heures du
matin, on l’informa que le ministre le recevrait à quatre heures, à la
Wilhelmstrasse. L’envoyé de Molotov, homme à tout faire de Staline, responsable
du coup de force russe en Lituanie, allait recevoir le même coup de massue que
le Commissar au Kremlin. Le docteur Schmidt, témoin de l’entrevue, nous
la décrit :
« L’ambassadeur soviétique se fit attendre cinq
minutes, pendant lesquelles Ribbentrop arpenta son cabinet de long en large
comme un fauve en cage. Jamais je ne l’avais vu si fébrile. Dekanozov fut
introduit et, ignorant de ce qu’il allait apprendre, tendit la main à Son
Excellence. Nous nous assîmes et l’ambassadeur se mit en devoir d’exposer les
récriminations de son gouvernement. Ribbentrop, le visage figé, l’interrompit
aussitôt. Aujourd’hui, dit-il, « la question est dépassée ».
Dépassée jusqu’à quel point ? L’arrogant ministre nazi le
lui expliqua et, après lui avoir tendu une copie du document présenté plus haut,
l’informa qu’à l’instant même l’Allemagne mettait en action des « contre-mesures
militaires » sur la frontière russe.
D’abord cloué sur place, l’ambassadeur « se ressaisit
promptement, poursuit Schmidt, et exprima ses profonds regrets d’un acte dont
le Reich porterait l’entière responsabilité. Il se leva, s’inclina pour la
forme et se retira sans serrer la main de Ribbentrop (113). »
Ainsi prit fin la lune de miel germano-soviétique. A trois
heures trente, avant même que ne fussent achevés au Kremlin et à la
Wilhelmstrasse les rites diplomatiques d’usage, les canons allemands tonnant le
long d’un front de plusieurs centaines de kilomètres la pulvérisaient pour
toujours.
Il y eut cependant un troisième prélude diplomatique aux
hostilités. La veille, de son bureau souterrain installé à son nouveau Q. G. de Wolfsschanze – la Tanière du Loup , – dans la sombre
forêt de Prusse-Orientale, Hitler adressa à Mussolini une longue épître. Pas
plus aujourd’hui qu’hier, lorsqu’il s’agissait de ses
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