Le Troisième Reich, T2
ou
motorisées, a réussi une poussée de 720 kilomètres, de Bialystok à Smolensk. Moscou
n’est plus qu’à 320 kilomètres, sur la route que suivit Napoléon en 1812. Au
nord, le groupe d’armées du général von Leeb – 6 divisions blindées et 21
divisions d’infanterie – avance grand train vers Leningrad, par les États
Baltes.
Au sud, le groupe d’armées du maréchal von Rundstedt – 5 divisions
blindées, 25 divisions d’infanterie dont 4 motorisées et 4 divisions de
montagne – pousse ; vers le Dnieper et Kiev, capitale de la fertile
Ukraine, objet des convoitises d’Hitler. Bref, ainsi que le proclament à grand
tapage les communiqués de l’O. K. W., l’Opération Barberousse progresse planmaessig (conformément au plan prévu) sur un front de 1 600 kilomètres, de la
Baltique à la mer Noire, encerclant ou refoulant l’une après l’autre les armées
soviétiques.
Le conquérant, persuadé que ce rythme accéléré va se poursuivre,
donne ordre au haut commandement de « réduire considérablement les
effectifs du front de l’Est » et, par ailleurs, de ralentir la production
d’armements au bénéfice de la construction de navires de guerre, de sous-marins
et, par-dessus tout, de bombardiers lourds en vue d’une nouvelle offensive
contre le dernier ennemi encore debout : l’Angleterre et « le cas
échéant contre l’Amérique (1) ». A la fin de septembre, il ajoute l’ordre
de dissoudre 40 divisions d’infanterie et d’affecter ces quelque 400 000
hommes à la main-d’œuvre industrielle (2).
Les deux grandes cités de la Russie, Leningrad – jadis
Saint-Pétersbourg, puis Petrograd, l’antique capitale créée par Pierre le Grand
– et Moscou, capitale de la Russie bolchévique , sont sur le point de
tomber, du moins le Führer le croit-il. Sûr de son fait, il donne, le 18 septembre,
l’ordre formel suivant : « Même offerte, la capitulation de Leningrad
et de Moscou doit être refusée (3). » Pour quelles raisons ? La
directive du 29 septembre nous l’apprend :
« J’ai résolu , déclare le Führer, d’effacer
Leningrad de la surface de la terre [126] . »
Lorsque la Russie sera terrassée… l’existence de cette ville ne présentera plus
d’intérêt. Mon intention est de la faire raser jusqu’aux fondations par l’artillerie
et par un bombardement aérien ininterrompu.
L’offre de reddition de Leningrad sera donc repoussée. « Ce
n’est pas et ne devra pas être à nous de résoudre le problème de la survivance
de sa population, à savoir son ravitaillement. Dans le combat où notre
existence est en jeu, il est contraire à notre intérêt de ménager la population
de cette ville, n’en serait-ce qu’une fraction (4) [127] . »
Le 3 octobre, dans une grandiose proclamation adressée au
peuple germanique, Hitler annonce l’écroulement de l’Union Soviétique :
« Je déclare aujourd’hui, et sans aucune réserve, que
notre ennemi de l’Est est abattu et ne se relèvera jamais… Derrière nos armées
victorieuses s’étend déjà un territoire deux fois plus étendu que celui du
Reich quand je pris le pouvoir en 1933. »
Le 8 octobre, lors de la chute d’Orel, l’une des
villes-clefs de la défense de Moscou, Hitler dépêcha à Berlin l’attaché de
presse de la Chancellerie, Otto Dietrich, avec mission de transmettre aux
correspondants spéciaux des journaux étrangers de premier plan le communiqué
suivant :
1. Les armées du maréchal Timochenko, seules intactes, sont
enfermées dans l’étau d’acier de deux poches devant Moscou.
2. Au sud, l’armée du maréchal Boudienny vient d’être mise
en déroute et les 10 divisions du maréchal Vorochilov sont encerclées devant
Leningrad.
Sur le plan militaire, commente Dietrich, la Russie a cessé d’exister.
Les Anglais n’ont plus qu’à enterrer leur rêve d’une guerre sur deux fronts ;
il est bien mort.
Les fanfaronnades d’Hitler et de son porte-parole étaient
quelque peu prématurées [128] .
En réalité, malgré le coup de massue du 22 juin et les premières
hécatombes d’hommes et de matériel ; malgré le refoulement et la prise au
piège de quelques-unes de leurs meilleures armées, les Russes opposèrent tout à
coup une résistance comme la Wehrmacht n’en avait encore jamais rencontré.
Le journal quotidien d’Halder et les rapports des généraux en
campagne se remplissent et bientôt débordent de notations de ce
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