Le Troisième Reich, T2
(dans le Nord de la France),
le moment sera venu (poursuivit Hitler) pour l’Italie d’intervenir activement, pas
au point le plus difficile du front des Alpes, mais ailleurs…
La guerre sera décidée en France. Le sort de la France une
fois réglé, l’Italie sera maîtresse de la Méditerranée, et l’Angleterre obligée
de faire la paix.
Mussolini, il faut le dire, ne fut pas long à saisir cette
brillante perspective d’obtenir tant après que les Allemands auraient fait le
gros du travail.
Le Duce répondit que, quand l’Allemagne aurait fait une
avance victorieuse, il interviendrait immédiatement… il ne perdrait pas de
temps… quand les Alliés seraient si ébranlés par l’attaque allemande qu’il ne
suffirait que d’un second coup pour les mettre à genoux.
D’autre part,
… si l’avance allemande était lente, le Duce dit qu’alors
il attendrait.
Ce marché sordide et lâche ne semble pas avoir trop ennuyé
Hitler. Si Mussolini était personnellement attiré vers lui, comme le dit Ciano,
par « quelque élément profondément enraciné dans son personnage », il
faut dire que l’attirance était réciproque, pour les mêmes raisons mystérieuses.
Aussi déloyal qu’il fût avec quelques-uns de ses associés les plus intimes, dont
il avait tué un certain nombre, tels Rœhm et Strasser, Hitler observa une loyauté
étrange et inaccoutumée envers son ridicule partenaire italien, loyauté qui ne
faiblit pas, qui se renforça même quand l’adversité et le désastre submergèrent
le vaniteux César. C’est l’un des intéressants paradoxes de ce récit.
En tout cas, quelle que fût sa valeur – et peu d’Allemands de l’entourage
d’Hitler, en particulier chez les généraux, lui en accordaient beaucoup – l’entrée
en guerre de l’Italie avait été enfin solennellement promise. Le Seigneur de la
Guerre pouvait à nouveau orienter ses pensées vers de nouvelles et imminentes
conquêtes. De la plus imminente – au nord – il ne souffla mot à son ami et
allié.
LES CONJURÉS FRUSTRÉS
UNE FOIS DE PLUS
Une fois encore, les conspirateurs anti-nazis tentèrent de
persuader les généraux de déposer le Führer – cette fois avant qu’il pût
déclencher sa nouvelle agression dans le Nord, dont ils avaient eu vent. Mais, en
plus, les conspirateurs civils voulaient également obtenir du gouvernement
britannique l’assurance qu’il ferait la paix avec un régime allemand anti-nazi
et, étant ce qu’ils étaient, ils insistaient pour que, dans tout règlement, le
nouveau gouvernement du Reich pût conserver la plupart des gains territoriaux d’Hitler :
l’Autriche, les territoires des Sudètes et le rétablissement de la frontière
polonaise de 1914, bien que celle-ci n’eût été obtenue dans le passé que par la
disparition de la nation polonaise.
C’est sur de telles bases que Hassell, avec un remarquable
courage personnel, se rendit à Arosa (Suisse), le 21 février 1940, pour
prendre contact avec un Anglais, qu’il appelle « Mr. X » dans son
journal et qui était un certain J. Lonsdale Bryans. Ils s’entretinrent dans le
plus grand secret au cours de quatre rencontres, les 22 et 23 février. Bryans,
qui s’était forgé une certaine personnalité dans la société diplomatique de
Rome, était encore un de ces négociateurs de paix accrédités par eux-mêmes et
quelque peu amateurs qui apparaissent dans ce récit.
Il avait des rapports avec Downing Street, et Hassell, après
leur rencontre, fut impressionné par lui. Après le fiasco de la tentative du
major Stevens et du capitaine Best en Hollande pour entrer en contact avec les
conjurés allemands, les Britanniques étaient assez sceptiques sur toute l’affaire,
et quand Bryans pressa Hassell de lui fournir des renseignements valables sur
ceux dont il parlait, l’envoyé allemand devint méfiant.
« Je ne suis pas en mesure de vous nommer les hommes qui me
soutiennent, rétorqua Hassell ; je puis seulement vous assurer qu’une
déclaration de Halifax serait transmise à qui de droit (29). »
Hassell alors esquissa les vues de l’opposition allemande :
on avait compris qu’Hitler devait être renversé « avant que des opérations
militaires importantes soient engagées » ; que cela devait être « une
affaire exclusivement allemande » ; qu’il fallait une « déclaration
catégorique des Anglais » sur la façon dont un nouveau régime anti-nazi à
Berlin serait traité et
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