Le Troisième Reich, T2
détaillées sur les préparatifs de la gigantesque offensive à
l’Ouest qu’il aidait à mettre au point, l’impression, celle de l’auteur du
moins, est que le chef du grand état-major était d’humeur optimiste quand il
conférait avec les officiers supérieurs et vérifiait les derniers plans de l’opération
la plus vaste et la plus risquée dans l’histoire d’Allemagne. On ne trouve dans
son journal aucun indice de velléité de trahison ou de débat de conscience.
Bien qu’il ait eu des appréhensions au sujet de l’attaque du
Danemark et de la Norvège, celles-ci reposent sur des considérations purement
militaires, et il n’y a pas trace de scrupule à propos de l’agression nazie
contre les quatre petits pays dont l’Allemagne avait solennellement garanti les
frontières. Pourtant, Halder savait qu’ils allaient être bientôt attaqués, d’autant
mieux que les plans d’agression contre deux d’entre eux, la Belgique et la
Hollande, avaient été dressés sous ses ordres.
Ainsi se terminait la dernière tentative des « bons
Allemands » pour destituer Hitler avant qu’il ne fût trop tard. C’était
pour eux la dernière chance d’obtenir une paix généreuse. Les généraux, Brauchitsch
et Halder l’ont clairement démontré, ne portaient aucun intérêt à une paix
négociée. Ils pensaient à ce moment, comme le Führer, à une paix imposée, dictée
après la victoire allemande. Ce n’est que lorsque ces chances se furent
évanouies qu’ils revinrent sérieusement à leurs anciennes idées séditieuses, si
ardentes à Munich et à Zossen. Cet état d’esprit et cette attitude ne doivent
pas être oubliés lorsqu’on considère les événements ultérieurs et le tissu de
mythes qui s’ensuivra.
L’INVASION DU DANEMARK
ET DE LA NORVÈGE
Les préparatifs d’Hitler pour la conquête du Danemark et de la
Norvège ont été appelés par beaucoup d’écrivains : un des secrets les mieux
gardés de la guerre ; mais il semble à l’auteur que les deux pays
Scandinaves, et même les Britanniques, ont été pris au dépourvu non faute d’avoir
été prévenus, mais parce qu’ils ne crurent pas à temps aux avertissements.
Dix jours avant l’attaque, le colonel Oster de l’Abwehr mit un de ses amis intimes, le colonel J. G. Sas, attaché militaire du Danemark
à Berlin, au courant des plans allemands pour Weserübung ; et Sas
en informa immédiatement l’attaché naval danois, le capitaine Kjölsen (30). Mais
le gouvernement danois, assoupi dans sa sécurité, ne voulut pas croire son
propre attaché naval, et même quand, le 4 avril, le ministre du Danemark à
Berlin envoya Kjölsen en hâte à Copenhague pour répéter l’avertissement de vive
voix, son renseignement ne fut pas pris au sérieux.
Encore la veille de la catastrophe, le 8 avril au soir, alors
que Copenhague avait appris le torpillage d’un transport de troupes allemand au
large de la côte sud de la Norvège – juste au nord du Danemark – et que les
Danois avaient vu, de leurs yeux vu, une puissante armada allemande faire route
vers le Nord entre leurs îles, le roi du Danemark avait rejeté avec un sourire
la remarque faite pendant le dîner que son pays était en danger.
« Il ne le croyait vraiment pas », rapporta plus tard
un officier des gardes qui était présent. En fait, raconta cet officier, après
le dîner, le roi s’était rendu au Théâtre Royal dans un état d’esprit « confiant
et heureux (31) ».
Déjà en mars, le gouvernement norvégien avait été prévenu, par
sa légation à Berlin et par les Suédois, d’une concentration de troupes
allemandes et de la présence de navires de guerre dans la mer du Nord et les
ports de la Baltique ; le 5 avril parvint de Berlin un renseignement
catégorique : débarquement imminent des Allemands sur la côte sud de la
Norvège. Mais le cabinet d’Oslo, lui aussi endormi, resta sceptique.
Pas même le 7, quand plusieurs navires de guerre allemands
furent aperçus remontant la côte norvégienne et qu’on apprit que des avions
anglais bombardaient une flotte de combat au large de la sortie du Skagerrak ;
pas même le 8 avril, quand l’amirauté britannique informa la légation de
Norvège à Londres qu’une puissante force navale allemande avait été découverte
faisant route vers Narvik ; et que les journaux d’Oslo annonçaient que des
soldats allemands, rescapés du transport Rio de Janeiro torpillé ce
jour-là
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