Le Troisième Reich, T2
corps dans les galeries
souterraines, le drapeau blanc fut hissé à midi et les 1 200 défenseurs
belges, frappés de stupeur, sortirent pour se rendre (11).
Ce fait d’armes, en même temps que la prise des ponts et la
violence de l’attaque montée par la VIe armée du général von Reichenau, soutenue
par le 16e corps blindé du général Höpner, comprenant 2 divisions de chars et
une division d’infanterie motorisée, convainquit le Haut Commandement allié qu’à
présent, comme en 1914, le choc de l’offensive allemande allait se porter
contre l’aile droite de l’ennemi et que les Alliés avaient adopté les bons
moyens pour l’arrêter. En fait, jusqu’au 15 mai au soir, les forces belges,
anglaises et françaises tinrent ferme sur la Dyle, depuis Anvers jusqu’à Namur.
C’était tout ce que voulait le Haut Commandement allemand. A
présent, il lui était possible de faire jouer le plan Manstein et de lâcher le
monstre dévorant dans le centre. Le général Halder, chef du grand état-major de
l’armée, vit très clairement la situation et ses possibilités le soir du 13 mai.
Au nord de Namur (écrivit-il dans son journal), nous
pouvons compter sur une concentration de 24 divisions anglaises et françaises
et de 15 divisions belges environ. Contre cela, notre VIe armée a 15 divisions
sur le front et 6 en réserve… Là, nous sommes assez forts pour parer à toute
attaque ennemie. Pas besoin d’amener d’autres troupes. Au sud de Namur, nous
faisons face à un ennemi plus faible. Environ la moitié de notre force. Une
attaque partie de la Meuse décidera si, quand et où nous serons capables d’exploiter
cette supériorité. L’ennemi n’a pas de forces qui méritent d’être mentionnées
derrière ce front.
Pas de forces qui méritent d’être signalées derrière ce
front qui, le lendemain, était enfoncé.
Le 16 mai, le Premier Ministre Churchill s’envola pour
Paris afin d’obtenir des précisions sur ce qui se passait. Dans l’après-midi, quand
il se rendit au Quai d’Orsay pour voir M. Paul Reynaud et le général
Gamelin, les avant-gardes allemandes étaient à 100 kilomètres à l’ouest de
Sedan, roulant à travers un pays ouvert, non défendu. Rien de bien sérieux ne
se trouvait entre elles et Paris, ni entre elles et la Manche, mais, cela, Churchill
l’ignorait. « Où sont les réserves stratégiques ? » demanda-t-il
à Gamelin, puis en français : « Où est la masse de manœuvre ? »
Le commandant en chef des armées se tourna vers lui, hocha la tête, haussa les
épaules et répondit : « Aucune , il n’y en a aucune [56] . »
« Je fus sidéré », nota plus tard Churchill. Il est
inconcevable en effet, qu’une grande armée, alors qu’elle est attaquée, ne
garde pas de troupes en réserve. « Je reconnais, dit Churchill, que ce fut
une des plus grandes surprises de ma vie (12). »
Ce fut à peine une moindre surprise pour le Haut Commandement
allemand, ou tout au moins pour Hitler et les généraux de l’O. K. W., sinon
pour Halder. A deux reprises, pendant cette campagne à l’Ouest,
le Führer, qui la dirigeait lui-même, avait hésité. Une
première fois le 17 mai : ce matin-là, Guderian, qui était au tiers
du chemin vers la Manche avec ses chars, reçut l’ordre de s’arrêter. La Luftwaffe avait fait parvenir des renseignements selon lesquels
les Français montaient une importante contre-attaque pour couper les faibles
pointes blindées qui fonçaient de Sedan vers l’Ouest. Hitler conféra en hâte
avec le commandant en chef von Brauchitsch et avec Halder.
Il était certain qu’une sérieuse menace des Français, venue du
Sud, se préparait. Rundstedt, commandant le groupe d’armées A qui avait opéré
la percée sur la Meuse, l’appuya quand ils s’entretinrent plus tard le même
jour. Il s’attendait, dit-il, à « une grande contre-offensive-surprise des
troupes françaises dans la région de Verdun et de Châlons-sur-Marne ». Le
spectre d’une seconde Marne se leva dans l’esprit enfiévré d’Hitler. « Je
veille à cela, écrivit-il à Mussolini le lendemain. Le miracle de la Marne de
1914 ne se renouvellera pas (13). »
Un jour bien désagréable (nota Halder dans son journal le
soir du 17 mai). Le Führer est terriblement nerveux. Il est tracassé par
ses propres succès, ne veut rien risquer et insiste pour nous retenir. Avance l’excuse
que tout cela vient de son souci pour le flanc
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