Le Troisième Reich, T2
les réserves hollandaises, qui faisaient
désespérément défaut ailleurs.
La clef du plan allemand était de s’emparer, par des troupes
aéroportées, des ponts situés au sud de Rotterdam, sur la Nieuwe Maas (Meuse), et,
au sud-est, sur les deux estuaires de la Maas (Meuse) à Dordrecht et à Mœrdijk.
C’est par ces ponts que la XVIIIe armée du général Georg von Kuchler, venant de
la frontière allemande (éloignée d’une centaine de kilomètres), espérait forcer
son chemin dans la « Forteresse Hollande ». Ce camp retranché
derrière de formidables digues, qui comprenait La Haye, Amsterdam, Utrecht, Rotterdam
et Leyde, ne pouvait être pris facilement et rapidement par aucun autre procédé.
Des unités aéroportées (dont une compagnie qui débarqua d’antiques
hydravions) s’emparèrent des ponts dans la matinée du 10 mai, avant que
les gardes, surpris, aient pu tirer. Des unités hollandaises improvisées firent
des efforts désespérés pour chasser les Allemands et elles furent près de
réussir. La situation des Allemands resta suspendue à un fil jusqu’à l’arrivée,
dans la matinée du 12 mai, de la division blindée affectée à Kuchler, qui
avait enfoncé la ligne Grenne-Peel, un front fortifié à l’est et consolidé par
de nombreuses digues sur lesquelles les Hollandais avaient cru pouvoir tenir
quelques jours.
On espérait un peu que les Allemands pourraient être arrêtés aux
ponts de Mœrdijk par la VIIe armée française du général Giraud, qui était
accourue de la Manche et avait atteint Tilburg dans l’après-midi du 11 mai.
Mais les Français, comme les Hollandais, serrés de près, manquaient de soutien
aérien, de blindés, de canons antichars et anti-aériens, si bien qu’ils furent
facilement repoussés jusqu’à Breda. La voie était libre, et la IXe
Panzer-Division put traverser les ponts à Mœrdijk et à Dordrecht et, dans l’après-midi
du 12, arriver sur la rive sud de la Nieuwe Maas, qui passe à Rotterdam, où les
troupes allemandes aéroportées tenaient toujours les ponts.
Les chars, cependant, ne pouvaient traverser les ponts de
Rotterdam. Entre-temps, les Hollandais s’étaient massés dans l’extrême Nord. Dans
la matinée du 14 mai, donc, la situation aux Pays-Bas était désespérée, mais
non sans issue. La « Forteresse Hollande » n’avait pas été démantelée.
Les troupes aéroportées allemandes autour de La Haye avaient été ou capturées
où dispersées dans les villages voisins. Rotterdam tenait encore.
Le haut commandement allemand, impatient de retirer de Hollande
la division blindée et les troupes de soutien pour exploiter une nouvelle
chance qui venait de se présenter en France, n’était pas satisfait. En fait, le
14 au matin, Hitler rédigea la directive n° 11, qui déclarait :
« La puissance de résistance de l’armée hollandaise s’est révélée plus
forte que prévu. Des considérations politiques autant que militaires exigent
que cette résistance soit promptement brisée. » Comment ? Il ordonna
que des détachements de l’aviation fussent retirés de la VIe armée sur le front
de Belgique « pour faciliter la rapide conquête de la Forteresse Hollande
(7) ».
Lui et Gœring donnèrent l’ordre très précis d’un bombardement
massif de Rotterdam. Les Hollandais seraient amenés à se rendre par une
démonstration du genre de celle qui avait été effectuée l’automne précédent à
Varsovie investie.
Dans la matinée du 14 mai, un officier d’état-major allemand
du 39e corps traversa le pont de Rotterdam sous la protection d’un drapeau
blanc et demanda la reddition de la ville. Il avertit qu’en cas de refus elle
serait bombardée. Pendant que les négociations étaient en cours – un officier
hollandais s’était rendu au Q. G. allemand pour en discuter les détails et
revenait avec les conditions des Allemands – les bombardiers apparurent et
détruisirent le cœur de la grande ville. Quelque 800 personnes, presque toutes
des civils, furent massacrées, plusieurs milliers blessées et 78 000
restèrent sans abri [53] .
Cet acte de cruauté calculée restera longtemps dans la
mémoire des Hollandais, bien qu’à Nuremberg, Gœring et Kesselring aient tenté
de se justifier en déclarant que Rotterdam n’était pas une ville ouverte mais
vigoureusement défendue. Tous deux nièrent avoir su que des négociations de
reddition étaient en cours quand ils envoyèrent leurs
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