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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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simplement assuré son avantage en ordonnant seconde salve qui pulvérisa l’artillerie
adverse. Démâté, rendu à l’état de vulgaire barque sans aviron, le galion
allait dériver en l’attente que Nissac revienne l’achever. Car, aussitôt
exécuté son terrible tir, Le Dragon Vert avait viré finement pour lancer
la chasse sus au galion de Bohrange.
    L’équipage du renégat était gagné par l’esprit
de défaite, ne s’étant jusqu’ici jamais trouvé en l’obligation de fuir. Les
hommes maugréaient et, ne se trouvant pas en état de vérité avec eux-mêmes, critiquaient
à demi-bouche la couardise de leur chef tout en se trouvant des plus aises qu’il
n’y eût point combat contre le vice-amiral de Nissac. Ainsi étant, ils
reportaient l’ardeur destinée au combat vers l’art de la manœuvre permettant la
fuite si bien que le galion pirate allait fort bon train.
    Cependant, Bohrange était trop habile marin
pour ne point s’apercevoir qu’inexorablement, Le Dragon Vert gagnait du
terrain. Aussi ordonna-t-il d’une voix qu’altérait l’émotion :
    — Droit vers la côte !
    S’échouant sur les hauts-fonds et gagnant la
terre proche, il lui serait possible de monter plus tard expédition afin de
récupérer or et pierres précieuses accumulés en ses cales. Il perdrait son
bâtiment de prise mais sauverait son trésor, sa prestigieuse otage et sa propre
vie.
    Le vice-amiral de
Nissac se trouvait debout sur la dunette, entouré de ses plus proches officiers :
le second, Paray des Ormeaux, le jeune lieutenant Fey des Étangs et le
capitaine de Sousseyrac commandant l’infanterie d’assaut.
    Bien prises sous le vent, la voile de misaine,
la grand-voile ainsi que celle d’artimon avaient été renforcées par des
bonettes, petites voiles supplémentaires qui augmentaient la surface de toile
présentée au vent.
    — Ah çà, le rattraperons-nous avant que
ce fol ne se fracasse contre la côte ?… demanda Sousseyrac.
    Nissac, qui en cet instant songeait à
Élisabeth de La Tomlaye, s’ébroua. Il avait l’esprit extrêmement rapide, l’utilisant
comme un marin le fait d’une drisse ou d’une amure, en grande promptitude. Tout
au combat et à la manœuvre, sachant que les choses ne bougeraient pas de toute
une minute, il pouvait occuper celle-ci à rêver, tel qu’il venait de le faire.
    Les yeux gris du vice-amiral observèrent le
galion pirate et, de cette voix grave au ton légèrement traînant qui séduisait
sans que Nissac s’en doute, il répondit :
    — Nous serons sur lui avant, mais de
justesse !…
    Aucun des trois officiers présents aux côtés
du vice-amiral ne mit un seul instant la chose en doute car, si Nissac n’était
point bavard, il parlait d’or.
    — Est-ce vraiment nous qu’il fuit en si
grande résolution ?… demanda Fey des Étangs.
    — Il cherche à sauver sa carcasse !…
répondit Sousseyrac qui ne pouvait imaginer autre raison.
    Paray des Ormeaux se montra en état de plus
grande prudence :
    — Qu’en pensez-vous, monsieur l’amiral ?…
    — Il est très lourdement chargé. De l’or.
Il veut donc sauver son trésor en montant expédition terrestre vers les
hauts-fonds s’il parvient à y échouer son navire. Cet homme est sans doute une
canaille, mais il n’est point stupide.
    Il se produisit peu après phénomène étrange, consécutivement
à quelques ordres brefs donnés par Nissac : les vergues, qui auraient dû
se trouver brassées en croix – ou au carré – furent orientées en sens inverse, pour
un vent bâbord qui n’existait point. Aussitôt, sur le navire des renégats, on
exulta tandis que les visages s’allongeaient parmi les membres de l’équipage du Dragon Vert  : le navire royal s’éloignait du galion du capitaine
Bohrange.
    Plus grave encore, il semblait que Nissac n’eût
point conscience de sa grave erreur car, contre toute logique en cet instant de
fausse manœuvre, le vice-amiral ordonna :
    — Canonniers, attention à faire feu !…
Première vague d’assaut, attention à l’abordage !…
    Et c’est alors que se produisit stupéfiant
phénomène : le vent, qui soufflait en poupe, changea. Et Le Dragon Vert, en sa prétendue fausse manœuvre, s’était placé de telle sorte que les
vergues brassées comme il fut dit profitèrent du vent soufflant bâbord. Le
vaisseau partit en flèche, l’équipage hurla sa joie à pleine poitrine.
    Le Dragon Vert sembla sauter sur la vague en un

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