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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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Ormeaux : nous allons tout risquer sur la vitesse.
    Le second hocha la tête en grande conviction
car si ailleurs on appelait le vice-amiral le Voleur de Vent, à bord du Dragon Vert on lui donnait un autre surnom : « l’amiral du diable ».
    Van Dick regardait
évoluer Le Dragon Vert qui, rapide et léger, semblait courir sur la
vague.
    Le renégat hollandais, pourtant bon marin, oublia
un instant l’imminence de la bataille pour admirer le vaisseau royal. En cet
instant, il aurait échangé tout l’or qui alourdissait ses cales pour le seul
bonheur de commander Le Dragon Vert.
    Graziano, le second de Van Dick, s’approcha du
capitaine et, d’une voix inquiète :
    — Il nous a volé le vent comme en se
jouant !… Comme il vient vite, il est déjà sur nous !…
    — Nous tirerons les premiers, il n’est
point encore à notre hauteur, à peine la moitié de son navire a dépassé notre
poupe.
    Mais en un angle impossible, cette moitié fit
feu et ce fut suffisant pour démâter sans quartier le galion du capitaine Van
Dick.

12
    Le loup-garou se trouvait assis dans l’angle
le plus reculé qui fût en la cellule. Adossé aux barreaux, le moine se tenait
bras croisés, l’ample capuchon dissimulant ses traits en permanence bien que « le
monstre » les eût aperçus précédemment.
    Depuis deux heures, l’homme d’Église menait l’interrogatoire
et pas un instant le loup-garou n’avait été tenté d’apporter aux questions
réponses qui fussent empreintes de la moindre fausseté.
    En un effet tout contraire, « le monstre »
trouvait grand réconfort à répondre tel qu’on l’en priait avec une ferme
douceur des plus étranges, comme si ces questions, quelquefois très indiscrètes,
lui permettaient de se mieux connaître lui-même en les réponses qu’il faisait, découvrant
en cette occurrence singulier réconfort.
    Ainsi confessa-t-il qu’il fut toujours très
laid, enfant déjà, ne trouvant point de compagnons de jeu tandis que ceux qui
eussent dû l’être le fuyaient ou se regroupaient pour lui jeter des pierres. Pareillement,
jeune homme, il ne connut point de filles et il n’est jusqu’aux prostituées qui,
en les maisons de fillettes [3] se dérobaient, à l’exception des plus âgées qui n’avaient que peu d’amateurs
mais encore fallait-il quintupler la somme.
    Son père, un notaire, accablé par cet état de
choses, se résolut à le prendre à ses côtés pour lui transmettre sa charge mais
ceux qui venaient habituellement traiter leurs affaires furent effrayés. Il se
disait que le fils du notaire avait le mauvais œil et qu’on risquait de tout
perdre si bien qu’en quelques mois l’endroit se trouva désolé de solitude.
    Celui qui n’était point encore loup-garou, alors
âgé de dix-huit ans, comprit la situation et quel remède il devait y apporter.
    Jusqu’ici, malgré sa laideur, son âme était de
pureté semblable à celle du diamant. Jamais il n’avait répondu au mal par le
mal, ne demandant pas davantage raison pour les violences qu’il subissait. Au
monde n’existaient que ses parents qu’il chérissait, son père qui le regardait
en effet de grande bonté quand sa mère ne semblait point le tenir pour laid. Eux
deux étaient sa vie, son seul horizon puisque le jeune homme savait qu’il ne
trouverait jamais femme qui le veuille épouser. Aussi ne voulut-il point causer
la ruine de ses malheureux parents.
    Un jour d’hiver froid, morne et désolé, il
partit si tôt le matin que le coq n’avait point encore chanté.
    Près de dix années furent nécessaires pour
parcourir l’interminable route qui le mena en le cimetière où il fut capturé. Dix
années de solitude, de froid, de faim et de coups. Il servit un temps en la
garde de Charles de Gontaut, baron de Biron et gouverneur de la province d’Auvergne.
Il fut employé dans les fermes, sur les quais du port de Nantes, puis devint
charbonnier, boucher et enfin serrurier. D’une force hors du commun, il se
montra en les foires où il affrontait un ours à mains nues mais un jour que la
foule hurlait tandis que sa poitrine devenait rouge de sang sous les coups de
pattes quand l’ours saignait de la gueule, tous deux se regardèrent.
    Celui qui allait devenir redoutable loup-garou
égorgeur d’enfants, celui-là n’avait point encore commis vilenies mais en avait
tant subi en ces dix années que le souvenir tendre de ses parents s’estompait. Il
ne connaissait plus la douceur

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