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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Boris Thiolay
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L’étrange équipage traverse à rebours une France tout entière tendue vers l’ouest, guettant le moindre indice de l’avancée des Alliés. Il va falloir faire des étapes, dans un village ou peut-être une caserne, le temps de refaire le plein de carburant, de se restaurer et de changer les couches des bébés. Le détachement de Waffen-SS , qui accompagne le convoi, reste sur ses gardes. Les routes, même les nationales, ne sont plus sûres. Verdun. Metz. L’Allemagne, bientôt. Sarrebruck. D’autres forêts. Kaiserslautern. On franchit le Rhin, à Mayence. Il est déjà tard lorsque la petite caravane s’arrête enfin devant la porte d’entrée du foyer Taunus , à trois kilomètres du centre de Wiesbaden.
    Le 1 er  septembre 1944, c’est tout simplement la panique au château de Wégimont. Partout, « l’invasion » ennemie progresse à grande vitesse. Les Britanniques sont à Arras. La 1 re  armée américaine a pris Cambrai, à 200 kilomètres ; la 3 e  division blindée Spearhead (Fer de lance) remonte depuis Verdun… Dans la matinée, le directeur de la maternité donne l’ordre d’évacuer totalement les lieux. Aujourd’hui, il ne reste plus que deux ou trois témoins directs de ces événements.
    La seule qui soit en mesure de les rapporter, c’est Mariette Bodeux, l’une des employées belges qui servait les repas aux mères et aux officiers. Son témoignage est forcément fragile : Mariette Bodeux a 88 ans et, elle le dit elle-même, « la mémoire s’en va ». Je l’ai rencontrée un matin de février à Soumagne, la commune où se trouve le château de Wégimont. C’est Walter Beausert, le fils de Rita, une petite employée de cuisines, qui m’avait parlé d’elle. Mariette Bodeux figurait dans l’annuaire, mais mon appel était resté sans réponse. Deux autres personnes portant le même nom qu’elle habitaient à Soumagne. La première a décroché : c’était sa sœur cadette. Elle m’a expliqué que Mariette se trouvait depuis deux mois dans une maison de repos de la commune, mais que, toutefois, elle serait sûrement d’accord pour me recevoir. Cette assurance m’a incité à appeler l’établissement aussitôt après. Au téléphone, l’accueil fut on ne peut plus sympathique : je pouvais venir immédiatement. Comme si, de passage dans la région, je rendais visite à l’improviste à une vieille tante… La maison de repos était un bâtiment de briques à un étage, comme toutes les maisons de ce quartier résidentiel de Soumagne. Mariette Bodeux m’attendait dans le réfectoire, assise dans un fauteuil roulant. Son regard d’un bleu intense soulignait des traits incroyablement réguliers, malgré les rides du temps. Elle avait dû être une femme magnifique. Nous nous sommes installés à l’écart, dans une pièce voisine. Ses souvenirs étaient hésitants. Jusqu’à l’évocation du 1 er  septembre 1944. Là, avec une sorte de mémoire immédiate que j’ai souvent rencontrée chez des personnes âgées lorsqu’elles racontent un épisode marquant, elle m’a décrit de courtes séquences qui lui revinrent. « Ce jour-là, les Allemands s’activaient dans tous les sens. Tout le monde était surpris, car ils n’avaient prévenu personne de leurs intentions. Ils sont partis autour de midi, sans prendre le temps de manger. Ils ont fait monter les enfants dans un grand car. Je ne me souviens pas de sa couleur. Les mamans étaient à la porte du château. Elles pleuraient, car elles n’avaient pas le droit d’aller avec eux. Les Allemands les en empêchaient. Rita, elle, ne voulait pas partir, mais elle tenait Walter contre sa poitrine. Un Allemand est venu le lui arracher des bras. Elle hurlait, elle criait qu’on lui volait son enfant… À mon idée, il pouvait y avoir 40 enfants, ce jour-là… » Après quelques autres souvenirs égrenés, sa mémoire s’est de nouveau mise en sommeil. J’ai poussé le fauteuil de Mariette jusqu’au réfectoire. C’était l’heure du déjeuner.
    Il n’y avait pas 40 enfants, ce jour-là, mais certainement une quarantaine de personnes, dont 17 ou 18 petits qui restaient. La liste de ces petits pensionnaires qui vont être, comme ceux de Lamorlaye, transbahutés d’une maternité nazie à l’autre, peut être reconstituée presque entièrement : Walter Beausert, Gisela Magula, Songard B., Heidrun, Hans Dieter B., Alfred L., Willy, né le jour de Noël 1943, Georg Franck P., qui sera rendu à sa

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