Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS
29 avril 1947. Ils reçurent la nationalité française de cette manière. Cela explique aussi pourquoi le prénom de certains gamins fut modifié, par décision préfectorale. Pour que l’on ne puisse plus déceler « leur origine étrangère », les prénoms à consonance germanique vont être francisés ou remplacés. Ainsi, donc, Gisela devient Gisèle, Anika, Annick, Svetlana, Séverine et Hans Georg, Georges. Songard et Ute sont rebaptisées Dominique ; Ingrid sera Irène. Plus curieux : quelques prénoms, pourtant bien français, sont également changés : Édith en Georgette, ou Marie-Chantal en Valentine. Comme s’il fallait donner à ses deux petites filles un nom bien populaire, passe-partout, digne, en quelque sorte, de l’Assistance publique… Les autorités partent d’une intention louable. Il s’agit de faire de tous ces enfants des petits Français comme les autres, afin qu’ils trouvent bientôt un nouveau foyer. Pourtant, quels dégâts peuvent provoquer un changement de prénom subit chez un petit de moins de trois ans ?
À la fin de l’année 1946, les autorités françaises ont certainement d’autres préoccupations : 6 033 mineurs ont déjà été identifiés en ZFO, 2 000 sont en attente de recensement, 219 ont été rapatriés, 1 000 sont susceptibles de l’être en 1947. Au total, entre 1945 et 1955, le service français des Personnes déplacées en Allemagne traitera 3 200 cas d’enfants non accompagnés et 15 680 dossiers d’enfants nés d’une mère allemande et d’un père ayant probablement la nationalité d’un pays des Nations Unies. Autant dire que, face à cette foule d’enfants en perdition, la question de leur prénom est accessoire…
Revenons au transfert entre Tübingen et Commercy. Les petits natifs de Lamorlaye et Wégimont ne furent pas rapatriés le 28 juillet 1946, comme prévu, mais le 4 août suivant. J’ignore la raison de ce retard. La date du voyage a été modifiée au dernier moment car, dans les archives de la Courneuve, on trouve un message daté du 26 juillet, qui confirme pour le surlendemain les horaires du train de Tübingen.
En tout cas, le jeudi 1 er août, à 11 h 15, le colonel Poignant, directeur du service français des Personnes déplacées en Allemagne, reçoit un appel téléphonique de Paris. Le ministère de la Population l’informe qu’un wagon spécial pour les enfants, de la Croix-Rouge, arrivera à Tübingen le 3 août.
Effectivement, le samedi 3, à 15 heures, un train comprenant ce wagon de la Croix-Rouge quitte la gare de Villingen, une petite ville allemande de la forêt Noire, à environ 90 kilomètres à l’est de la frontière française. Ce convoi va mettre près de 5 heures pour effectuer une centaine de kilomètres vers le nord-est : Villingen-Rottweil-Balingen et enfin, Tübingen, où il s’immobilise vers 19 h 20.
Le lendemain matin, dimanche 4 août, entre 10 heures et 11 heures, plusieurs infirmières de la Croix-Rouge, encadrées par une certaine mademoiselle Hamel, employée par les services français en Allemagne, font finalement embarquer 37 enfants, et non 36, à bord du wagon spécial. Les 37 noms sont retranscrits à la main, aux archives de la Courneuve, dans un cahier de cuir relié qui répertorie les différents convois de rapatriement entre août 1946 et juin 1948.
Parmi ces 37 enfants abandonnés, se trouvent 17 nouveau-nés, fruit non désiré de l’union d’un soldat français et d’une Allemande, après mai 1945.
Les 20 autres enfants ont entre 18 mois et 3 ans. La plupart portent un nom francophone : ils sont nés d’une travailleuse volontaire française, avant mai 1945, et d’un Allemand.
Nous connaissons déjà 8 enfants parmi les 37 du convoi. Quatre viennent de Wégimont : Songard B., Alfred L., Gisela Magula et Hans Georg D. Quatre autres de Lamorlaye : Ingrid de Fouw, Édith de V., Jean-Pierre P. et Ute R.
Ce dimanche 4 août, le train quitte Tübingen à 11 heures 23. Destination : Commercy, dans la Meuse. Le wagon de la Croix-Rouge y parvient le lendemain, lundi 5, à 7 heures 47, après avoir transité par Strasbourg, puis avoir été raccroché au train n° 18 passant par Nancy.
Il subsiste deux récits, très succincts de ce voyage. Dans l’un d’eux, mademoiselle Hamel, l’assistante sociale travaillant dans la ZFO, relate ce qui suit.
« Le voyage des 37 enfants partis le 4 août de Tübingen s’est effectué dans
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