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L'Enfant-Roi

L'Enfant-Roi

Titel: L'Enfant-Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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père.
    — Il est en bec d’aigle, alors que le nez Bourbon est
long et courbe. En outre, a-t-on jamais vu un Bourbon si maigre, si malingre et
si souffreteux ? Qui pis est, tout marié qu’il soit, bougre comme un
bourdon ! Alors que tous les Bourbons, comme vous savez, sont tous excessivement
portés sur le sexe opposé.
    — Mais quand il s’agit de vous, Madame, dit mon père en
se levant à demi de sa chaire avec une petite inclinaison de tête, c’est une
vertu.
    — Fi donc de cette faribole. Monsieur ! dit Madame
de Guise. Et de grâce, ne gaussons pas, quand la maison brûle ! Pour en
revenir à Condé, ce petit bougre est le premier à donner le branle. Il va
quérir son congé du roi et de la régente et leur dit qu’il se retire à
Châteauroux, mais qu’il reviendra incontinent à la Cour pour peu qu’il y soit
mandé par Leurs Majestés…
    — Le bon apôtre !…
    — Le duc du Maine, un jour après, prend congé, lui
aussi, et s’en va à Soissons. Et deux jours après, Monsieur de Nevers gagne son
gouvernement de Champagne. Quant au duc de Bouillon, lequel ne se pressait
apparemment pas de partir, il fit le Saint-Jean Bouche d’Or. Il trahit de prime
les Grands en révélant qu’ils allaient tous se rassembler à Mézières, mais
voyant qu’il ne retirait rien de cette trahison, courut les y rejoindre avec de
grandes promesses à Leurs Majestés de les ramener à leurs devoirs.
    — Où est Mézières ? demanda La Surie.
    — C’est la porte des Ardennes, dit mon père. Et qui
plus est, une porte fortifiée sur une boucle de la Meuse, à deux pas des
Pays-Bas et des Espagnols par où les Grands espèrent sans doute faire retraite,
si les choses se gâtent pour eux ou même, mais c’est à mon sens une illusion,
recevoir des secours. Mais, Madame, comment se fait-il que les Grands se soient
établis à Mézières ?
    — Le duc de Nevers prit la ville de force et en chassa
le lieutenant du roi.
    — Et comment ?
    — Il quit deux canons à La Cassine et deux autres à
Sedan.
    — Quatre canons, Jour de Dieu ! s’écria mon père,
alors que nous en avons à l’Arsenal plus d’une centaine de tous calibres et
tout neufs, entassés là par Sully et le feu roi ! Qu’attend-on pour courir
sus à ces traîtres ?
    — Ah, mon ami ! poursuivit Madame de Guise. Comme
on voit que vous connaissez peu la régente !
    — Que fait-elle donc ?
    — Elle consulte… Toutefois, voyant que le duc de
Vendôme [43] s’apprêtait à rejoindre les Grands à
Mézières, elle le fait arrêter et le tient prisonnier au Louvre, dont
évidemment, huit jours plus tard, il s’évade.
    — Que ne l’a-t-on mis à la Bastille ! m’écriai-je.
    — C’est tout justement, mon beau filleul, ce que votre
petit roi a dit ! Mais comme il n’a pas treize ans, personne ne l’écoute.
Quant au Vendôme, il court toujours, gagne son gouvernement de Bretagne et s’y
fortifie.
    — Mais que veulent à la fin ces gens-là ? s’écria
La Surie.
    — Vous ne le devinez pas ? dit Madame de Guise en
portant ses deux mains blanches et potelées au niveau de ses rondes
épaules : ils veulent ce qu’ils ont si facilement obtenu de la régente au
début de son règne : des pécunes ! Et encore des pécunes ! Ils
sont furieusement jaloux de cette rivière d’écus qui, du trésor, coule
quotidiennement sur les maréchaux d’Ancre et ils la voudraient détourner sur
eux-mêmes.
    — Et que fait la reine ?
    — Je vous l’ai dit, elle consulte ! Sans parvenir
à se décider, car dans son Conseil, il y a le parti de ceux qui veulent faire
la paix à tout prix – et « à tout prix » est bien
dit ! – et le parti de ceux qui veulent courir sus aux Grands.
    — Et qui est pour la paix ?
    — Le maréchal d’Ancre.
    — Et pourquoi donc cela ?
    — Parce que la régente, au cas où l’on ferait la
guerre, a promis de donner à mon fils Guise le commandement des armées.
    — Et pourquoi le maréchal d’Ancre ne le demande-t-il
pas pour lui-même ?
    — Outre qu’il n’est pas pressé de démontrer sa nullité
militaire, il ne voit rien à gagner pour lui à faire la guerre aux Grands, et
rien à perdre non plus à s’entendre avec eux. Il opine sans doute que deux
rivières peuvent couler en même temps du trésor. Et peu lui chaut qu’il
s’assèche !
    — Et qui est pour la guerre ?
    — Les bons Français : le cardinal de Joyeuse, le
ministre de

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