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L'Enfant-Roi

L'Enfant-Roi

Titel: L'Enfant-Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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en geôle. Toutefois, Marie comme à son ordinaire
fluctuante, s’y décida, puis ne s’y décida plus, puis de nouveau s’y décida,
tant est que ce lanternement permit aux plus gros des poissons d’échapper de la
nasse. Ce qui désola fort Barbin, qui avait organisé la capture et qui comptait
bien se saisir, outre Condé, des princes les plus frétillants. Toutefois, c’est
la reine-mère qui choisit Monsieur de Thémines pour l’exécution, parce quelle
se souvint que notre Henri avait dit de lui qu’en toutes circonstances il
servirait la royauté.
    Il fut convenu que dès que Condé serait entré dans le Louvre
pour présider le Conseil, on déploierait les gardes devant le pont-levis pour
l’empêcher de ressortir. Et comme ce déploiement pourrait donner l’éveil, on
amena devant le pont-levis le carrosse du roi tout attelé, afin de donner à
penser que le roi allait se rendre à Saint-Germain-en-Laye et que les troupes
n’étaient là que pour assurer ses sûretés sur le chemin.
    Quand je contai cette petite ruse à mon père, il me rappela
qu’Henri III, le jour de l’assassinat du duc de Guise, avait lui aussi
employé comme leurre le carrosse royal. Pour éviter que le duc de Guise ne fût
suivi le jour du Conseil par une forte escorte qui eût pu donner du fil à
retordre aux Quarante-Cinq, Henri III avait fixé ce Conseil-là à
sept heures du matin, et pour justifier une heure aussi matinale, il avait
confié la veille au duc qu’il comptait partir très tôt pour son manoir de La
Noue. Le carrosse tout attelé fut amené dès avant sept heures au pied de
l’escalier ajouré du château de Blois pour donner couleur et vraisemblance à ce
départ.
    Pour en revenir à Condé, il quitta le Conseil du roi sur le
coup de onze heures et dirigea ses pas vers la chambre de la reine-mère, où
devait se réunir le Conseil des affaires. Quelqu’un lui ayant glissé à
l’oreille qu’on allait l’arrêter, il ne le voulut pas croire, disant hautement
qu’on n’oserait pas s’en prendre à lui. « C’est tout justement, dit mon
père, ce que répondit, il y a vingt-huit ans, le duc de Guise à ceux qui
l’avertissaient qu’Henri III le voulait dépêcher. Il y a une chose que le
comploteur ne parvient jamais à entendre : quelle que soit par ailleurs la
faiblesse d’un souverain, dans le château du roi, le roi est toujours le plus
fort. »
    Condé ne trouva personne en la chambre de la reine-mère, ni
la reine-mère elle-même, ni les autres conseillers des affaires ; et la
demandant à plusieurs reprises, non sans quelque impatience, aux officiers du
roi qui se trouvaient dans la pièce, il ne se doutait pas quelle était si
proche de lui, se cachant dans un cabinet attenant, avec le roi et Monsieur, et séparée de lui par une simple porte.
    Condé qui déjà se croyait le roi de France, et trouvait
quasi offensant que la reine-mère le fît attendre, tomba de haut quand Monsieur
de Thémines entra dans la chambre et lui dit qu’il avait le devoir de
l’arrêter.
    — Osez-vous bien l’entreprendre ? dit Condé.
    — Oui, Monseigneur, lui dit Thémines, sur commandement
du roi. Monseigneur, plaise à vous de me remettre votre épée.
    Condé s’y refusa de prime, mais voyant apparaître Monsieur
d’Elbène, suivi de sept ou huit gentilshommes, la pertuisane à la main, il
blêmit et céda.
    — Monsieur d’Elbène, dit-il, m’allez-vous occire ?
    — Monsieur, lui dit Monsieur d’Elbène, nous sommes des
gentilshommes et non des bourreaux, et nous n’avons nul commandement de vous
méfaire.
    Ces gentilshommes sans tant languir l’encadrèrent et le
menèrent à la chambre qu’on avait préparée pour lui. Il reprit alors un peu de
ce courage dont il avait fait si peu preuve jusque-là, et refusa un dîner qu’on
lui avait préparé, exigeant que ce fussent ses gens qui lui apprêtassent ses
viandes.
    On y consentit, et ce qui lui redonna un peu de sérénité fut
une visite que lui fit Monsieur de Luynes qui l’assura au nom du roi qu’on
allait le bien traiter. Toutefois, il demanda avec tant d’insistance à voir
Barbin que celui-ci, sur l’ordre de la reine-mère, finit par se rendre auprès
de lui.
    Déagéant me rapporta le soir même en mon appartement ce
qu’il dit à Barbin, qui n’était que folies, enfantillages et billevesées, sauf
toutefois qu’il affirma que « la reine ne l’avait prévenu que de trois
jours, et que si elle eût

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