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L'Enfant-Roi

L'Enfant-Roi

Titel: L'Enfant-Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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d’hui en Paris, y
ayant été député par les États du Languedoc. Étant honnête homme, je ne doute
pas qu’il ne consente à faire une démarche auprès de la reine dans le sens que
vous avez dit.
    Après un instant de silence, le roi demanda à chacun
d’opiner. Monsieur de Marsillac trouva l’idée fort bonne, puisqu’elle était la
sienne. Monsieur de Modène aussi, ayant l’humeur aimable et conciliante.
Déagéant fit la moue et je fis de même. Et quant à Tronçon, quand le roi lui
demanda son avis, il dit tout à trac :
    — Je doute, Sire, que cette démarche ait l’effet qu’on
souhaite.
    — Pourquoi cela ?
    — Il sera aisé assez, il me semble, de convaincre la
reine-mère et peut-être la maréchale d’Ancre, mais ni l’une ni l’autre ne
parviendront à persuader Conchine. Il a levé tant de troupes et amassé tant de
canons qu’il se croit invincible. Et il est si enivré de son pouvoir qu’il
n’acceptera jamais de quitter la partie.
    Toutefois, comme Tronçon était le seul à s’opposer sans
ambages à la suggestion de Marsillac, le roi la retint. Et Déagéant obtint de
son côté d’envoyer quasiment chaque jour à la reine des messages sans signature
qui la pressaient de renvoyer les favoris « si elle ne voulait pas tomber
dans des malheurs extrêmes et y précipiter le royaume ».
    Nous sûmes plus tard que cette démarche de Monsieur de
l’Estang et d’autres démarches de même farine que le roi et Luynes inspirèrent,
ainsi que le nombre croissant des avertissements anonymes, finirent par donner
des soupçons et des ombrages à la Conchine. Elle en avertit par chevaucheur
Conchine, qui se trouvait alors en Normandie. Il décida incontinent de revenir
à brides avalées à Paris.
    Il y arriva le dix-sept avril 1617 et jeta aussitôt feu et
flammes. À peine le pied dedans le Louvre, il se fit donner la liste de ceux
qui approchaient le roi, hurla qu’il allait en exiler soixante et décoller le
reste, que si cela ne suffisait pas il allait resserrer le roi en son Louvre,
lui interdire de quitter Paris, lui défendre de s’aller ébattre à Vincennes et
à Saint-Germain, ne lui laissant que les Tuileries pour prendre l’air. Il
ajouta que si l’on osait encore s’en prendre à ses desseins, à son gouvernement
et à lui-même, il pourrait bien faire pis…
    Le soir même, dans l’appartement de Monsieur de Luynes, le
roi et les conjurés s’entre-regardèrent en silence et Louis, prenant enfin la
parole, dit d’une voix brève et ferme qu’il fallait agir, et sans retard. Il
n’y eut personne alors, dans la poignée des derniers fidèles, qui n’entendît
clairement que c’en était bien fini des moyens « les plus doux ».
     
    *
    * *
     
    Il y eut bien une tentative de la part de Monsieur de Luynes
pour redonner vie et vigueur au projet de fuite. Pauvre Luynes ! Si
charmant et si couard ! Terrifié par les menaces de Conchine, il ne
proposait que des délais, des réflexions et des échappatoires. Bref, comme dit
Déagéant, « il branlait dans le manche ». Mais son nouveau
plan : quitter en tapinois le Louvre et rejoindre l’armée du comte
d’Auvergne sous Soissons, rencontra en la réunion secrète que nous tînmes le
soir même du retour de Conchine un silence glacial. Et Louis, perdant patience,
rebéqua son favori.
    Maintenant que les « moyens les plus doux »
avaient été de force forcée abandonnés, il fallut préciser jusqu’à quels
« extrêmes » on était décidé d’aller. Déagéant nous exposa
clairement, quoiqu’à mots couverts, l’alternative : arrêter Conchine et le
déférer au jugement du Parlement, ou bien l’assassiner. Louis écarta aussitôt
l’idée du meurtre, soit qu’il ne voulût pas mettre ses pas dans ceux d’Henri III
quand celui-ci avait fait poignarder le duc de Guise par les Quarante-Cinq dans sa propre chambre à Blois, soit qu’il considérât qu’il ne convenait pas au
roi très chrétien de commencer son règne en répandant le sang.
    Déagéant, Tronçon et moi-même combattîmes ce refus avec
force. Conchine, même à l’intérieur du Louvre, ne se déplaçait jamais
qu’entouré de sa garde prétorienne et d’une suite nombreuse et armée. Cette
garde et cette suite ne manqueraient pas de mettre l’épée à la main, si on
laissait à Conchine le loisir de l’appeler à l’aide, et il s’ensuivrait une
échauffourée qui causerait beaucoup de morts, sauf peut-être

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