L'énigme de l'exode

un sacré trou de mémoire.
    — Alors télécharge ces foutues photos, tu veux ? Ça commence à devenir intéressant.

    III
    Dans l’appendice de son livre, Stafford avait inclus une transcription intégrale du rouleau de cuivre, accompagnée d’une traduction. Gaëlle et Lily lurent la traduction ensemble.
    — À combien de kilos correspondait un talent, exactement ? demanda Lily.
    — Cela dépendait des régions, répondit Gaëlle. Entre vingt et quarante kilos.
    — Mais il est question d’une cachette abritant neuf cents talents d’or. Cela équivaudrait à dix-huit mille kilos d’or. C’est impossible !
    Gaëlle fronça les sourcils. Lily avait raison. Une telle quantité était tout simplement impensable. Elle étudia la transcription en hébreu.
    — Regardez. Le poids est indiqué par la lettre « k ». On l’a exprimé en talents parce qu’il s’agissait de l’unité de mesure des Juifs. Mais si le trésor venait d’Égypte, l’unité de mesure était celle qu’utilisait Akhénaton au cours de la dix-huitième dynastie. Or, ce n’était pas le talent, pas à cette époque, pas pour l’or. C’était la kite, généralement abrégée sous la forme « k ». Et une kite équivalait à dix à douze grammes.
    — Dans ce cas, ce chiffre serait plus logique.
    — Beaucoup plus. Cela correspondrait à une énorme quantité d’or, mais ce serait plausible. Et regardez le système de numérotation, les barres obliques, le chiffre dix. C’est typique de la dix-huitième dynastie.
    Lily recula d’un pas, sceptique. ,
    — Mais pourquoi les disciples d’Akhénaton auraient-ils enterré leur or ? Pourquoi ne l’auraient-ils pas emmené avec eux ?
    — Parce qu’ils ne le pouvaient pas. Souvenez-vous de la violence des réactions après la mort d’Akhénaton. Lorsqu’ils ont repris le pouvoir, les traditionalistes ont été impitoyables. La plupart des adeptes du culte d’Aton ont abjuré leur foi, mais pas tous. Si ceux qui ont fui sont les Juifs, comme vous le prétendez, nous savons, grâce au récit de l’Exode, qu’ils sont partis précipitamment. Ils n’ont donc pas pu emmener un tel trésor, qui les aurait considérablement ralentis.
    — Alors ils l’ont enterré. Et ils ont indiqué la cachette sur un rouleau de cuivre.
    — Ils n’ont pas dû être très inquiets. L’Égypte était la demeure du dieu unique sur terre. Et ils étaient très croyants. Ils ont dû penser qu’ils ne tarderaient pas à revenir, triomphants. Mais les choses ne se sont pas passées ainsi. Ils ont fui l’Égypte tous ensemble et se sont établis au pays de Canaan en se persuadant qu’il s’agissait de leur Terre promise. Puis lorsque leur rouleau de cuivre a commencé à s’oxyder, ou bien lorsqu’ils n’ont plus su lire l’égyptien, ils en ont fait une copie en hébreu. Et peut-être une deuxième un peu plus tard, qui a fini par atterrir à Qumrân.
    Gaëlle réfléchit un instant.
    — Vous avez entendu parler de la Fin des temps, n’est-ce pas ? demanda-t-elle à Lily. De la grande bataille de Meggido ?
    — Harmaguédon...
    — Exactement. Suite à cet affrontement, Dieu est censé régner depuis une nouvelle Jérusalem, une cité décrite dans le livre d’Ezéchiel et dans l’Apocalypse. Or, un rouleau concernant « la nouvelle Jérusalem » a été découvert à Qumrân. On en a même retrouvé six exemplaires, ce qui laisse supposer que les Esséniens y attachaient beaucoup d’importance. Le plan de la cité y est décrit en détail : taille, orientation, routes, maisons, temples, eau, tout. Et il correspond avec une précision surprenante à celui d’une cité de l’Antiquité.
    — Laquelle ? s’enquit Lily, qui connaissait sans doute déjà la réponse.
    — Celle-ci, déclara Gaëlle en ouvrant les bras. Amarna.

    IV
    Abasourdi, Knox cliquait en silence sur chaque photo de Gaëlle : une tombe à moitié ouverte, une statuette d’Harpocrate, des catacombes, des restes humains momifiés, une caisse contenant des oreilles humaines tranchées.
    — Ça alors ! s’exclama-t-il lorsqu’il vit la photo de la mosaïque.
    — Tu sais ce que ça me rappelle ? lui demanda Augustin en pointant le doigt vers l’écran.
    — Quoi ?
    — Tu connais Éliphas Lévi ? C’est un occultiste français du XIX e siècle. Il a réalisé une gravure célèbre d’une divinité templière obscure désignée sous le nom de Baphomet, qui est devenue la représentation iconographique moderne du