L'énigme des vampires
sa
chambre. Mais il a léché le sang qui coulait de la blessure de Seward et répète
inlassablement cette phrase : « Le sang, c’est la vie ! »
Quant à Lucy Westenra, elle porte sur le cou les marques de
petites morsures, ce qui confirme le diagnostic de van Helsing. Et comme elle s’affaiblit
de nouveau, on la transporte à la clinique de Seward où elle subit des
transfusions. Elle est veillée – et surveillée – par van Helsing et Seward, ainsi
que par Arthur Holmwood et son fidèle ami, l’Américain Quincey Morris. Van
Helsing a fait placer des fleurs d’ail dans la chambre de Lucy, lui en a mis
autour du cou et en a frotté les vitres de sa fenêtre. C’est le docteur Seward
qui raconte : « Lucy n’avait jamais paru aussi mal. Sa respiration
était stertoreuse ; sa bouche ouverte laissait continuellement voir ses
gencives exsangues. Ses dents paraissaient plus longues, plus pointues encore
que le matin même et, à cause d’un certain effet de lumière, on avait l’impression
que les canines étaient encore plus longues et plus pointues que les autres
dents. Je venais de m’asseoir auprès du lit, quand elle fit un mouvement comme
si elle souffrait. Au moment même, quelque chose vint cogner contre la vitre. J’allai
lentement jusqu’à la fenêtre, soulevai un coin du store et regardai. Il y avait
clair de lune, et je vis une grosse chauve-souris qui passait et repassait, sans
doute attirée par la lumière. » Un peu plus tard, quand Lucy s’éveille, van
Helsing s’aperçoit avec stupéfaction que ses « blessures à la gorge
avaient complètement disparu ».
Mais, pour le professeur, ce n’est pas un bon signe. « Elle
est en train de mourir ; cela ne tardera plus maintenant, dit-il. Mais, entendez-moi
bien, qu’elle meure dans son sommeil ou non, ce ne sera pas tout à fait la même
chose. » On fait venir Arthur Holmwood. Il semble alors que quelque chose
de mystérieux se passe dans le corps de la jeune fille : « Sa bouche
s’entrouvrit, et les gencives blanches, retirées, rendaient les dents plus
longues et plus pointues que jamais. Alors, dans un état proche de l’inconscience,
elle ouvrit les yeux, le regard à la fois triste et dur, mais ce fut d’une voix
douce et voluptueuse qu’elle répéta : – Arthur ! Oh ! mon amour !
Je suis si heureuse : comme c’est bien que vous soyez là ! Embrassez-moi ! »
Bien sûr, Arthur se penche vers Lucy, mais van Helsing l’écarte avec violence, en
lui disant : « Ne faites jamais ça, par pitié pour votre âme et pour
la sienne ! » La réaction de Lucy prouve la justesse de l’interdiction :
« Nous vîmes comme une convulsion de rage passer sur ses traits, et ses
dents pointues se rejoignirent avec bruit, comme si elles avaient mordu quelque
chose. » Cependant, Lucy semble se calmer. Elle prend la main de van
Helsing et dit d’une voix faible : « Mon ami incomparable qui êtes
aussi le sien ! Oh ! veillez sur lui, et à
moi donnez le repos ! » Van Helsing autorise Arthur à poser un
baiser sur le front de la jeune fille, et celle-ci meurt doucement. Un peu plus
tard, Seward dit à van Helsing : « Enfin, la pauvre petite est en paix !
Pour elle, les souffrances sont finies. » Mais van Helsing lui répond
brutalement : « Non, hélas ! Elles ne
font que commencer. »
Cependant, Mina et Jonathan Harker, celui-ci encore mal
remis de sa fièvre cérébrale, sont allés à Londres pour l’enterrement de Mr. Hawkins,
le patron de Jonathan, décédé brusquement. Après la cérémonie, les deux époux
passent un moment à Hyde Park et vont ensuite à Piccadilly. C’est alors que
Jonathan aperçoit une silhouette qui lui rappelle quelqu’un : « Un
homme grand et mince, au nez aquilin, à la moustache noire et à la barbe
pointue. » Cet homme est lui-même en train de fixer étrangement une belle
jeune femme, comme s’il voulait l’hypnotiser. Mina le décrit ainsi :
« Son visage n’annonçait rien de bon ; il était dur, cruel, sensuel, et
les énormes dents blanches, qui paraissaient d’autant plus blanches entre ses
lèvres couleur rubis, étaient pointues comme les dents d’un animal. »
Jonathan paraît terrifié par cette vision et dit, comme pour lui-même :
« … Oui, je crois bien que c’est le comte, mais il a rajeuni !… Si au
moins je savais… »
Une fois revenu à Exeter, Jonathan Harker semble atteint d’une
certaine hébétude. C’est
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