L'énigme des vampires

Je
tenterai de ramper le long du mur… Il faut absolument que je quitte le château…
Heureusement, la miséricorde de Dieu est préférable à la mort sous la dent de
ces monstres, et le précipice est haut, escarpé… »
    L’action se déplace alors en Angleterre. Mina est venue rejoindre
son amie Lucy à Whitby. À vrai dire, le comportement de Lucy est inquiétant. Elle
est toujours pâle et faible, et elle a de fréquentes crises de somnambulisme. C’est
à ce moment qu’un fait divers défraie la chronique. Un navire russe est arrivé
dans le port de Whitby, mais tout l’équipage est mort, y compris le capitaine, rivé
à son gouvernail. Le seul survivant de ce « vaisseau fantôme » est un
chien qui s’est échappé et qui rôde dans la campagne. Mais, curieusement, de
nombreux chiens de la région sont retrouvés morts, saignés au cou. Lucy est de
plus en plus sujette à ses crises de somnambulisme. Plusieurs fois, en pleine
nuit, Mina récupère son amie à l’extérieur de leur cottage. Mina, qui s’inquiète
par ailleurs de ne pas avoir de nouvelles de son fiancé Jonathan Harker, est
terrifiée par l’atmosphère étrange qui se révèle, chaque nuit, autour de Lucy :
des nuages inexplicables dans lesquels elle distingue des formes monstrueuses, des
oiseaux au vol lourd, des sonorités étranges. Mina ne comprend pas non plus le comportement
de plus en plus aberrant de Lucy. Enfin, elle reçoit des nouvelles de Jonathan
Harker : il est en traitement à Budapest, dans un hôpital, après une très
grave fièvre cérébrale.
    Mina ne perd pas de temps. Elle part pour Budapest rejoindre
Jonathan Harker et l’épouse immédiatement. Puis tous deux regagnent l’Angleterre,
Jonathan passant sa convalescence à Exeter. Cependant, dans sa clinique londonienne,
le docteur John Seward s’inquiète du changement brutal d’attitude de son malade
Renfield. Celui-ci tient de plus en plus des propos étranges et
incompréhensibles. Il semble en particulier tenir conversation avec quelqu’un d’invisible.
Seward entend ainsi cette sorte de prière : « Je suis à vos ordres, Maître.
Je suis votre esclave et je sais que vous me récompenserez, car je serai fidèle.
Il y a longtemps que je vous adore, de loin ! Maintenant que vous êtes
tout près, j’attends vos ordres et vous ne m’oublierez pas, n’est-ce pas, cher
Maître, dans la répartition de vos bienfaits ? » Le docteur Seward n’a
évidemment aucun élément pour découvrir le sens de cette prière ; mais le
lecteur comprend alors que Renfield est une créature soumise, d’une façon ou d’une
autre, au redoutable comte Dracula.
    Entre-temps, le lecteur a d’ailleurs appris que, sur le
navire fantôme échoué au large de Whitby, se trouvaient cinquante caisses
remplies de terre, et que, selon une procédure fixée d’avance grâce à un sollicitor de Whitby, ces caisses ont été
transportées à Londres et livrées au manoir inhabité de Carfax. Mais l’état de
santé de Lucy Westenra, qui est rentrée à Londres, se détériore de jour en jour.
La fréquence de ses crises de somnambulisme s’accentue et la jeune fille s’affaiblit,
comme si elle perdait du sang. Son fiancé, Arthur Holmwood, la confie aux soins
du docteur Seward. Celui-ci, après de multiples tentatives, avoue son
impuissance à guérir la malade, et il fait appel à son ancien maître, et
maintenant ami, le professeur Abraham van Helsing, spécialiste des maladies
nerveuses, et qui passe également pour un bon connaisseur de ce qu’on appelle
les « sciences secrètes ». Van Helsing accourt aussitôt et examine
Lucy Westenra. Il semble comprendre que la faiblesse de la jeune fille n’est
pas due à une cause naturelle et demande à John Seward de suivre ses
indications, même si celui-ci les juge un peu bizarres. De toute évidence, van
Helsing, sans le dire, a diagnostiqué un cas de vampirisme.
    On constate une période d’accalmie dans la maladie de Lucy. Mais
elle est toujours sujette à des cauchemars ainsi qu’à des visions en état de
veille, notamment des apparitions de chauves-souris qui se heurtent aux vitres
de sa fenêtre. Dans le même temps, à la clinique de Seward, Renfield est de
plus en plus agité. Un jour, il s’échappe de sa chambre, fait irruption dans le
bureau de Seward et attaque celui-ci. Légèrement blessé, le docteur parvient à
maîtriser le malade, et celui-ci se laisse reconduire tranquillement dans