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L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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eurent terminé, mes hommes cessèrent toute autre besogne pour
dresser les trois effigies tandis que Merlin et les sculpteurs tassaient la
terre à la base. « Le père, le fils et le Saint-Esprit », fit Merlin
goguenard en cabriolant devant les idoles.
    Pendant ce
temps, mes hommes avaient fait un grand tas de bois devant les fosses. Et sur
ce monceau de bois, nous empilâmes ce qu’il nous restait de vivres. Nous
abattîmes nos derniers bœufs puis hissâmes leurs énormes carcasses sur le tas
afin que leur sang frais ruisselât sur les différentes couches de bois. Puis on
recouvrit les bœufs de tout ce que nous avions remorqué : viande et
poisson séchés, fromages, pommes, grains et haricots, avant de couronner ces
précieuses provisions de deux cerfs que nous venions de capturer et d’un bélier
fraîchement égorgé. Non sans lui avoir tranché la tête, avec ses deux cornes,
pour la clouer au pilier central.
    Les Saxons
nous regardèrent travailler. Ils se tenaient sur l’autre rive et, une ou deux
fois, le premier jour, ils avaient fait pleuvoir leurs lances dans notre
direction, mais après ces premiers efforts rutiles pour contrarier nos efforts,
ils s’étaient contentés de nous observer pour voir exactement les choses
étranges que nous concoctions. Je sentis leurs effectifs croître. Le premier
jour, nous n’avions aperçu qu’une douzaine d’hommes au milieu des arbres. Mais
au deuxième soir on devinait au moins une vingtaine de feux derrière le rideau
de verdure.
    « Maintenant,
déclara Merlin ce soir-là, donnons-leur quelque chose à voir. »
    Allumant nos
torches aux brasiers du petit sommet de la lande, nous nous dirigeâmes vers le
grand tas de bois pour les jeter dans l’enchevêtrement de branches. Le bois
était vert, mais nous avions amassé au centre des monceaux d’herbes sèches et
de brindilles. Et le feu se déchaîna dans la nuit. Les flammes éclairaient nos
grossières idoles d’une lueur blafarde, la fumée s’élevait en tourbillonnant,
formant un grand panache qui dérivait vers Londres tandis que l’odeur de viande
rôtie mettait au supplice notre campement affamé. Le bûcher crépita et s’effondra
dans des gerbes d’étincelles. Dans cette fournaise, les bêtes abattues se
contractaient et se contorsionnaient tandis que les flammes raidissaient leurs
muscles et faisaient exploser leurs crânes. La graisse fondait en chuintant,
puis s’embrasait en grandes flammes qui jetaient une ombre noire sur nos trois
horribles idoles. Le feu se consuma toute la nuit, brûlant nos derniers espoirs
de quitter Llœgyr sans victoire. Et, à l’aube, nous vîmes les Saxons approcher
à pas furtifs pour en examiner les restes fumants.
    Puis nous
attendîmes, sans pour autant demeurer entièrement passifs. Nos cavaliers
partirent en reconnaissance à l’est, sur la route de Londres, et revinrent pour
nous apprendre que les bandes de Saxons s’étaient mises en marche. D’autres de
nos hommes abattirent des arbres pour construire une salle au sommet de la
lande. Nous n’en avions nul besoin, mais Arthur voulait donner l’impression que
nous établissions une base au cœur du pays pour harceler les terres d’Aelle. Si
celui-ci se laissait abuser, il ne manquerait pas de déclencher les hostilités.
Nous commençâmes même à élever un rempart de terre, mais faute d’outils
adéquats le résultat était assez piteux même s’il dut contribuer à duper l’ennemi.
    Si nous étions
assez occupés, cela ne suffit point à désamorcer la rancœur au sein de nos
troupes. D’aucuns, comme Meurig, croyaient que nous avions dès le début adopté
une mauvaise stratégie. Il aurait mieux valu, assurait-il maintenant, dépêcher
trois petites armées ou plus, avec mission de s’emparer des forteresses
saxonnes de la frontière. Nous aurions dû les harceler et les provoquer, au
lieu de nous retrouver de plus en plus affamés, pris à notre propre piège au cœur
du pays de Llœgyr.
    « Sans
doute a-t-il raison, me confessa Arthur le troisième matin.

— Non,
Seigneur ! »
    Et pour étayer
ma réponse, je fis un geste vers le nord, en direction du gros panache de fumée
qui trahissait la présence d’une horde croissante de Saxons par-delà le cours d’eau.
Mais Arthur secoua la tête.
    « L’armée
d’Aelle est là, c’est bien vrai, mais cela ne veut pas dire qu’il va attaquer.
Il va nous observer, mais s’il a un peu de bon sens, il va nous laisser

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