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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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claqua des mains. L’homme s’ébroua comme une vieille haridelle surprise par le canon. Il se frotta les yeux, considéra l’inspecteur, sa ganache s’affaissa et il se leva titubant.
    — Diable ! Monsieur Bourdeau ! Si je m’attendais.
    — Quoi ? Que jamais on ne se reverrait ? Tu es mon obligé, ne l’oublie pas. Pour qui travailles-tu désormais ?
    — C’est un honneur pour vous de voir votre ouvrage et je vous suis reconnaissant de m’avoir remis sur la voie droite.
    — Oui, oui, joue-moi du flageolet ! Au fait, si tu veux bien.
    — Je suis trop vieux pour ce jeu-là. Je me suis recarré dans la valetaille pour étranger. Avec ma science… Je suis assez heureux de leur procurer ce qu’ils souhaitent.
    — Je n’en doute pas, le bon apôtre ! Allons, on ne quitte jamais ce clapier-là ! Tu voudrais me faire accroire que tu ne retournes rien de ce que tu glanes et apprends ?
    — Point, foi d’honnête homme.
    — Ou alors tu t’es mis à ton compte, reprenant le cours de tes filouteries. Il y a récidive… Nous verrons cela. Empresse-toi de nous conter ce que tu sais, sinon… Ton client a été tué. Je t’écoute.
    L’homme bougonna et se mit en mesure de vider son sac.
    — Le jeune monsieur est arrivé à Paris il y a peu. Il avait gagné la France par voie de mer jusqu’en Hollande et ensuite, ayant changé de paquebot, avait débarqué à Calais. M. Lachère, dont j’ai la confiance, m’a fait appeler pour me présenter. Je convenais, j’ai aussitôt pris mon service.
    — En quoi consistait-il ? demanda Nicolas, silencieux jusque-là.
    — L’habituel. Je réveillais le maître, lui portais son chocolat, l’aidais à sa toilette, le rasais, le coiffais, lui passais ses habits, tenais son linge et répondais aux requêtes qu’il voulait bien me faire.
    — Quelles étaient-elles ? De quelle nature ?
    — Celles habituelles d’un jeune étranger ébloui par les plaisirs de la ville. Le jeu, les filles et les achats dans les boutiques, tailleurs, bijoutiers, et j’en passe.
    — Et bien sûr tu organisais ta prise comme entregent dans tout cela ?
    — Bast ! Il faut bien amasser son magot pour les vieux jours. Je ne suis plus jeune.
    — Et quels étaient les goûts de M. de Rovski ?
    — Des poulettes, brunes et dodues, de préférence. Des caillettes, quoi ! C’était des exigences incessantes. Il aimait le nombre et exigeait la fraîcheur, ne pouvant souffrir une haleine infectée. Je devais y veiller ainsi qu’à la santé de la fille. L’amour, disait-il, ne veut pas que son dard plonge dans la fange.
    — Comme cela est élégamment exprimé ! Un vrai poète !
    — Il ne s’attachait point et elles non plus… Comment dire ? L’importance de son tribut, loin de combler ces dernières, les éprouvait et, bien que sensibles à la générosité de l’homme, elles renonçaient toujours à une deuxième entrevue.
    — Je vois, reprit Bourdeau. Et cet escadron galant, comment le lui procurais-tu ? Chez tes anciennes connaissances ?
    La Jeunesse éclata d’un rire grinçant.
    — Elles sont bien trop vieilles et passées de mode. Aujourd’hui elles boucanent sur les rives du fleuve, comblant les gagne-deniers. Non, je passais par une mère de la place. Pas les nouvelles, sans conscience et seulement intéressées du revenant-bon, mais d’une sérieuse à la réputation sans faille et sur laquelle on puisse compter.
    — Et le nom de ce parangon ?
    — Oh ! Sûr que vous la connaissez. Son négoce est varié. C’est la Paulet, dont la maison est sise à l’enseigne du Dauphin couronné , faubourg Saint-Honoré.
    Nicolas ne fut pas surpris d’apprendre ce qu’il savait parfaitement. La Paulet, sous le manteau de la devineresse, dissimulait la tenancière d’un tripot, certes élégant, mais aussi l’organisatrice de jeux clandestins et la maquerelle qu’elle demeurait depuis toujours. Restait que ses activités étaient mesurées, prudentes, favorisées par l’habitude d’une vie consacrée tout entière à la galanterie. Elle avançait, à peine masquée, jusqu’aux frontières incertaines et mal délimitées de l’interdit, assurée de l’impunité que lui procurait sa longue familiarité avec la police et, en particulier, avec le commissaire Le Floch. Il est vrai que, dans la balance, les services rendus pesaient lourd.
    — Et donc, c’est elle qui fournissait les victimes de cet Hercule ?
    — Qui, à ce

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