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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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engeance, elles se collent comme des sangsues. Bienheureux encore si ces malchanceux n’en viennent pas heurter à la boutique de Saint-Cosme pour pallier les malédictions d’un coup de pied de Vénus. En ai-je vu ! En ai-je vu ! Celui-là par exemple. Un bien beau jeune homme. Et quelle stature ! Il s’est aussitôt, oui, aussitôt, à peine arrivé, entiché d’une drôlesse qui lui fut présentée par je ne sais quelle revendeuse à la toilette, ou bien proposée ou gagnée au jeu, passion à laquelle, fort affriandé, il me parut sacrifier sans relâche. Les visites se succédaient dans son… Mais vous devez le savoir…
    Il fit un clin d’œil.
    — … Il y a belle lurette que je fais ce métier dans lequel j’ai succédé à mon digne père. J’ai commencé fort jeune. Vos hommes, messieurs, sont toujours là. Ah ! Ah ! Zic, zac, ils écument et espionnent. J’étais enfant encore sous M. Berryer, lieutenant général de police, avant que paraissent ces…
    Il fit une sorte de génuflexion.
    — … hommes dignes, de vieux Romains, le grand Sartine et l’honnête Le Noir qui ont rétabli l’honneur de leurs gens. Bref, ce M. Berryer était assez enclin à la paillardise. Il était pourtant parvenu, le malheureux, à l’âge inévitable de l’impuissance. Hé ! Hé ! Il aimait continuer à tisonner les restes d’un feu mal éteint. Il disposait de mouches préposées à la surveillance des mauvaises mœurs et, chaquematin à sa toilette, il se délectait en se faisant lire par un valet les rapports circonstanciés de la nuit. Pourquoi donc vous ai-je rappelé cela ?
    Il réfléchit un moment, le menton dans la main.
    — Oui ! Je pense que le laquais engagé a dû vous rapporter les allées et venues du jeune monsieur et que, tout en me faisant jaser, vous en savez autant que moi. Sinon La Jeunesse vous chantera des couplets avec refrain, oui, oui !
    — La Jeunesse ?
    — Le valet engagé par M. de Rovski.
    — Où se trouve-t-il pour l’heure ?
    — Je l’ai placé de faction au premier étage après que votre confrère a mis des scellés sur la porte de l’appartement de M. de Rovski. Cet établissement est honorable et tient à préserver sa réputation. Point de bruit, point de scandale, il faut écarter les curieux. Pour le reste, je vous en préviens, le spectacle est affreux, j’en frémis encore !
    — Le spectacle d’un égorgement est toujours affreux, dit Bourdeau.
    — Que dites-vous là ? Un égorgement ? Vous voilà loin du compte. De quoi parlez-vous ? Ce n’est point cela que j’ai eu le malheur de découvrir… mais je vous laisse le constater vous-même. Égorgé ! Hé ! La chose est plaisante en vérité. Allez donc le voir votre égorgement.
    Et sans que les policiers, interdits par cette volée verbale, aient eu le temps de pousser plus loin, le petit poussah pirouetta avec légèreté et, multipliant les courbettes en toutes les directions, disparut.
     
    Nicolas et Bourdeau gagnèrent l’étage et trouvèrent, assis sur un tabouret, un homme dont l’apparence ne justifiait en rien le surnom. Grand, maigre,le cheveu jaune et rare, il dormait, ronflant la tête baissée. L’inspecteur tapa du pied sur le sol.
    — Que voilà une belle surveillance ! Mais, attends… cet homme… je le connais. Je crois bien ne pas me tromper.
    — Tiendrais-tu, par hasard, un bureau de placement pour les domestiques à usage des nobles étrangers ?
    — Non, en revanche je suis savant du fond et du tréfonds de cette ville. Je te présente Jacques Veyrat, alias Piquadieu, souteneur, escroc et voleur. Réfugié en 1758 dans l’Enclos du Temple, avec donc l’immunité et l’asile. Enfin… un temps. À la suite d’une embûche par moi tramée, il est pris de corps en 1759.
    — Tu causes comme une archive du Grand Châtelet.
    — C’est le fait de mon grand âge ! Le susdit avait par ses activités une connaissance approfondie du monde galant, de la cocange et des filous de tout acabit. Sartine, à la réflexion devant cette riche expérience, considéra que l’élément était prometteur. Du coup il a été engagé comme mouche émérite. Il n’y avait pas à hésiter, c’était cela ou les galères, ou pire même. Je ne l’ai point croisé depuis. Pour qui travaille-t-il désormais ? Tu vas admirer sa surprise.
    — Avant que tu ne l’éveilles, pourquoi le nommait-on Piquadieu ?
    — Ah ! Il pillait les troncs des églises !
    Il

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