L'envol du faucon
est prise par toutes ses bonnes œuvres. »
Maria sourit modestement. « Il est vrai que mon orphelinat absorbe une grande partie de mon temps, mon Seigneur.
— Alors je n'en abuserai pas plus qu'il n'est nécessaire. Avec votre permission, j'en viendrai directement au fait. »
Maria le regarda d'un air perplexe. Il était petit et avait le teint sombre, même pour un Siamois, mais ses mouvements étaient agiles et rien ne semblait échapper à ses yeux pénétrants et intelligents. Elle eut l'étrange pressentiment qu'il mijotait quelque mauvais coup.
« Je vous en prie, faites, mon Seigneur.
— Vous devez d'abord comprendre, Gracieuse Dame, que j'ai juré de ne remettre ce message à personne d'autre que vous. D'où mon apparition soudaine et présomptueuse. » Il inclina la tête comme s'il reconnaissait son inconvenance. « Comme vous le savez peut-être, je suis rentré récemment de France. En ma qualité d'humble émissaire du Seigneur de la Vie, j'ai eu récemment l'occasion de passer pas mal de temps au Grand Palais afin de présenter mes rapports à Sa Gracieuse Majesté. » Kosa leva les yeux vers Maria qui se tenait toujours sur le seuil de la porte. Il nota avec satisfaction qu'il avait toute son attention.
« La dernière fois, poursuivit-il, comme je quittais l'enceinte du palais, un jeune page m'a abordé pour m'informer qu'il était porteur d'un message de la seconde épouse de l'honorable Pra Klang, dame Sunida. » Kosa regarda Maria comme si de rien n'était. Bien que son expression demeurât impassible, la pâleur soudaine de ses joues lui indiqua que ses paroles avaient fait mouche. « Quand je lui ai demandé quel était le message, il m'a prié de le suivre. Nous avons emprunté une série de sentiers étroits qui nous ont conduits finalement à un petit jardin retiré où dame Sunida m'attendait. Elle semblait plongée dans un certain désarroi et très désireuse de me parler. »
Kosa fit une pause tandis que Maria, sans dire un mot, s'avançait et se laissait tomber lentement sur l'épais tapis persan en face de lui. Elle arrangea les plis de son kimono et le regarda.
« Je suis certes désolée d'apprendre le désarroi de dame Sunida, dit-elle. Mais que vous a-t-elle dit ? »
Une expression anxieuse envahit le visage de Kosa. « Gracieuse Dame, elle m'a parlé de son inquiétude grandissante pour la sécurité de son maître et m'a supplié de vous apporter un message. Elle souhaitait en appeler à vous car elle a la certitude que vous aimez l'honorable Pra Klang avec un aussi grand dévouement qu'elle et l'espoir que vous pourrez réussir là où elle a échoué. »
Maria l'observa longuement sans offrir de commentaire.
« Voyez-vous, continua Kosa Pan, dame Sunida m'a confié que, lors de la dernière visite de son honorable maître, la veille seulement, elle l'avait clairement averti des dangers qu'il courait. Mais comme d'habitude il en avait fait fi. » Kosa se pencha en avant.
« Les Maures dans le Sud ont écrit à un de leurs collègues de haut rang à Ayuthia — un des rares mandarins acquittés après le procès des Macas-sars — pour l'informer que les activités du Shahbandar farang de Mergui salissent la réputation de Sa Gracieuse Majesté dans le golfe. Non seulement ce Shahbandar effronté met le Trésor à sec avec une légion de marins fantômes dont les salaires vont directement dans sa poche, mais il pille des bateaux innocents dans le golfe et s'enrichit à leurs dépens. » La voix de Kosa se réduisit à un murmure de sorte que Maria dut tendre l'oreille pour saisir ses propos. « En conséquence, les provinces voisines se pré-parent à se soulever et il y aura un terrible bain de sang si on ne les arrête pas. Dame Sunida a imploré son honorable maître à chacune de ses récentes visites, mais sans résultat. Elle se permet de faire appel à votre aide, car elle sait fort bien quel grand cas son maître fait des conseils de Votre Seigneurie en matière de politique. »
La pâleur de Maria s'était visiblement accentuée, et, bien qu'elle fît tous ses efforts pour avoir l'air calme, sa voix se mit à trembler.
« Comment a-t-elle... comment dame Sunida a-t-elle découvert tout ça ? »
Kosa s'était préparé à cette question.
« Un page attaché au harem royal où dame Sunida est hébergée est le neveu d'un des mandarins musulmans de la région. Son oncle l'a averti du danger dans l'espoir que l'information parviendrait à l'oreille de Sa
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