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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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siamois de la porte, on se serait cru dans un riche salon de Lisbonne ou de Goa.
    Un enfant contribuerait peut-être à calmer lame tourmentée de Constant, songea Maria en prenant son ouvrage, et pourrait le persuader de lui consacrer plus de temps. Ces temps-ci, il semblait complètement absorbé par les affaires de l'Etat, à l'exclusion de tout le reste. Malgré ses trente-cinq ans, son énergie sans bornes ne donnait aucun signe de faiblesse. Du moins celle-ci était-elle maintenant canalisée vers des objectifs plus respectables que par le passé. Il avait été plutôt coquin dans sa jeunesse. Il y avait de cela seulement cinq ans, elle l'avait forcé à renoncer à son harem et à mener la vie d'un bon catholique. Quand il avait demandé sa main, elle avait insisté sur certaines conditions. La monogamie avait été la principale d'entre elles. En effet, au fond d'elle-même, elle savait qu'en dépit de l'amour qu'elle lui portait et des coutumes particulières au Siam ses croyances ne toléreraient pas d'autre conduite. Les souffrances qu'elle endurerait à le partager avec d'autres femmes, même si elle était l'épouse principale, l'emporteraient sur la douleur de le perdre.
    Elle sourit intérieurement — au moins, aujourd'hui, elle pouvait en sourire —, mais alors il en avait été tout autrement. Son brigand de mari avait congédié son harem à l'exception d'une fille qui, préten-dait-il, était un agent du palais chargée de l'espionner. Elle s'appelait Sunida. Elle ignorait, du moins le prétendait-il, qu'il était au courant de son rôle, ce qui lui permettait de fournir au palais des renseignements qui lui étaient tout ce qu'il y avait de plus favorable. Comme ils s'étaient battus à son sujet ! Maria ne l'oublierait jamais. La fille était bien trop belle et trop raffinée pour lui laisser un moment de répit. Pour finir, cependant, et tout à l'honneur de Constant, le rôle d'espionne de Sunida avait été confirmé. Maria s'était sentie coupable pendant un certain temps, mais il avait évité avec tact d'évoquer le sujet, même quand ils se querellaient. Maintenant, quoique Maria eût souhaité qu'ils puissent passer plus de temps ensemble, elle acceptait qu'il y avait un prix à payer quand on était mariée à un personnage public.
    Elle devait reconnaître que c'était une vie passionnante, et elle était fière d'y être mêlée. Jusqu'à ces derniers jours, elle avait été entièrement occupée à recevoir tous ces Français. Sa maison avait pratiquement tenu lieu de caserne ! Cinquante soldats français destinés à la garde du corps de Sa Majesté y avaient bel et bien séjourné. Bien sûr, ils avaient été hébergés dans une autre aile, mais elle voyait les officiers à l'heure des repas. Les sujets de conversation n'avaient pas manqué. Elle était toujours fascinée par les dernières modes, les événements les plus récents en Europe, surtout en France. Elevée par les Jésuites, elle parlait couramment le fiançais, et un des officiers avait même parlé un portugais tout à fait honorable. C'étaient des gentilshommes, ces offi-ciers, raffinés et courtois, contrairement aux frustes marchands européens auxquels elle avait jusque-là eu affaire.
    Constant était particulièrement pris et fréquemment absent ces derniers temps. Le roi était à Louvo, les Français à Bangkok et elle à Ayuthia. Même quand Constant était à la maison, il y avait toujours une soirée à laquelle il fallait assister. Mais, Dieu soit loué, la présence des épouses n'était pas jugée nécessaire. Ces réceptions officielles étaient si ennuyeuses ! Résultat : elle ne voyait quasiment jamais son mari, qui revenait épuisé à la maison. Peut-être l'enfant changerait-il les choses, se dit-elle à nouveau avec optimisme. En attendant, elle devait s'occuper de l'orphelinat. Il prenait le plus clair de son temps. Elle en revenait à l'instant. Pendant la saison des pluies, une fuite s'était déclarée dans le toit de la longue cabane qu'elle avait fait construire derrière la maison principale, et elle avait voulu superviser les réparations. C'était au temps de la mousson que l'on amenait toujours le plus d'enfants abandonnés ; la grande cabane était pleine à craquer. Les enfants étaient nourris, habillés et dormaient sur des nattes alignées en longues rangées sur le sol. Elle envisageait de faire construire un autre bâtiment. Ce n'était pas le terrain qui manquait autour du

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