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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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côté et Cébéret de l'autre. En l'absence de dames, le directeur du commerce retrouva son assurance habituelle et montra un intérêt particulier pour les délices culinaires dont la nouveauté visiblement l'intriguait. Desfarges était assis à côté de La Loubère tandis que six aides français et la garde du corps de cinquante hommes destinée à Sa Majesté séparaient leurs chefs de la foule des dignitaires locaux. La conversation était de plus en plus animée, et le nombre de compliments à l'adresse de Phaulkon augmentait en proportion de la quantité de vin absorbée.
    Le spectacle d'acrobates qui suivit le banquet se tint dans la cour adjacente et recueillit des applaudissements encore plus nourris qu'à Bangkok, car il s'agissait des meilleurs artistes du pays, de la troupe personnelle du roi. Leur succédèrent des danseuses portant de hauts chapeaux pointus et des fleurs dans les cheveux. Tandis qu'elles oscillaient sur une musique obsédante de flûtes et de xylophones, recourbant leurs longs doigts souples en arrière jusqu'à toucher leurs poignets, les spectateurs se turent, captivés par la grâce et la beauté sensuelle de ces femmes.
    Phaulkon songea avec nostalgie à sa première rencontre avec Sunida. Il se demanda quels ravages sa présence aurait pu causer parmi ces Français de plus en plus joyeux. Ils l'auraient sans doute regardée bouche bée, comme il l'avait fait lui-même plusieurs années auparavant, avant d'adopter les manières siamoises. Dieu merci, il avait respecté les coutumes locales et n'avait inclus aucune femme dans le banquet de ce soir. Cette foule bruyante les aurait lor-gnées et se serait conduite d'une manière si voyante qu'elle aurait choqué les mandarins soucieux de l'étiquette, ce qui n'aurait guère fait avancer la cause des Français. Il regarda discrètement autour de lui. Même à cette heure, les rangées de mandarins assis en tailleur parlaient à voix basse pour éviter de profaner l'atmosphère. Calmes et dignes, ils sirotaient de l'eau ou du jus de citron vert, s'abstenant de tout breuvage alcoolisé. Chaque fois qu'ils se sentaient observés par un Français, ils souriaient avec courtoisie et inclinaient la tête. Phaulkon songea que son peuple d'adoption était vraiment plus raffiné. A côté de Desfarges et de Cébéret, dont les formes rebondies débordaient de leur petit tabouret, les mandarins paraissaient gracieux, discrets et à coup sûr plus agréables à regarder.
    Etait-il devenu si siamois que même les plus distingués des Européens lui semblaient désormais grossiers ? Phaulkon les observa : tout au long du copieux spectacle, ils discutèrent avec volubilité, dévisagèrent sans vergogne et burent sans compter jusqu'au moment où les mandarins prirent poliment congé et lui laissèrent le soin de convaincre les Français en goguette de regagner leurs quartiers pour la nuit.
    17
    Le silence s'établit lorsque le général Petraja se leva pour parler. Son apparence juvénile et son physique d'athlète démentaient ses cinquante ans. Son beau visage n'avait pratiquement pas de rides et son corps aucun embonpoint apparent. Bien qu'il fût petit et solidement charpenté, on lui prêtait l'agilité d'un chat.
    Avant de prendre la parole, Petraja dévisagea un par un les membres de l'assemblée. Ce n'était pas un grand groupe ; ils n'étaient que cinq assis en cercle, les jambes en tailleur. A sa droite se trouvait Kosa Pan, l'hôte du jour, dont l'expérience de première main des nouveaux envahisseurs farangs était sans prix. A son côté étaient accroupis Abdullah Mafid et son frère Mohammed, barbus et vêtus de robes musulmanes, tous deux d'anciens mandarins en disgrâce depuis l'écrasement de la révolte des Macas-sars, leurs frères maures. Le roi les avait déchus de leur rang, les laissant aigris et désargentés. Mais comme ils étaient particulièrement utiles à la cause, Petraja et Kosa Pan les soutenaient financièrement. Ils faisaient office d'intermédiaires essentiels avec leurs frères musulmans du Sud, également aigris par la perte de leur monopole historique sur le commerce dans le golfe. C'était à leurs frères d'Ayuthia que les musulmans mécontents du Sud envoyaient leurs dépêches via leur chef, Selim Yussuf. A chaque réunion, les derniers événements choquants de Mergui étaient divulgués à l'assemblée.
    A côté des frères étaient assis deux officiels siamois qui n'étaient connus que sous les noms

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