L'envol du faucon
politesses et ce protocole les vrais desseins de la France : soumettre notre nation bien-aimée à la volonté du roi Roui et remplacer la doctrine bouddhiste par la foi chrétienne. C'est vers l'insidieux Pra Klang qu'ils se tourneront pour cette tâche : ils sont venus à lui chargés d'honneurs, de présents, de médailles et même d'un titre de mandarin de France. »
Kosa Pan tourna son attention vers les représentants du vénérable supérieur. « La foi farang est une foi avide, qui ne tolère pas les autres croyances comme la nôtre, qui n'aura pas de cesse qu'elle n'ait forcé tout un chacun à suivre sa voie étroite vers Dieu. Aucune autre croyance ne peut vivre à son côté. »
Le silence qui s'ensuivit fut interrompu par Vira-wat : « Je ne suis pas un soldat, mes Seigneurs, mais comment cinq cents hommes peuvent-ils prendre un pays tout entier en otage ?
— Peut-être ne le peuvent-ils pas, répondit Petraja, mais tant qu'ils sont les invités de Sa Majesté personne n'osera lever le petit doigt contre eux. Nous n'avons pas d'autre choix que de ronger notre frein. En attendant nous devons commencer à poser les jalons de leur prochain départ. »
Somboon, le plus âgé des deux représentants du clergé, se tourna vers Kosa Pan. « Nous transmettrons vos réflexions à notre vénéré supérieur, Votre Excellence. Je suis sûr que Sa Sainteté, le patriarche suprême, sera très intéressée d'apprendre ce que vous avez à dire. »
C'était précisément ce que le général Petraja avait espéré entendre. Sa Majesté mise à part, personne dans le pays n'exerçait une influence plus grande que le patriarche suprême de la foi bouddhiste. Il était le seul mortel à n'être pas obligé de se prosterner en présence du roi.
Petraja inclina respectueusement la tête en direction des deux officiels et se tourna vers les Maures.
« Dites-moi, mes Seigneurs, quelles nouvelles avez-vous de vos frères dans le Sud ? »
Abdullah Mafid gratta son épaisse barbe noire. « Les nouvelles ne sont pas bonnes, Votre Excellence. Le Shahbandar farang a pris la loi entièrement en main. Nos frères rapportent qu'il se conduit en despote qui n'a de comptes à rendre à personne tandis que ses pirates continuent d ecumer le golfe du Bengale au nom du Siam. Les membres du conseil des Cinq sont trop effrayés pour s'opposer à lui et apposent humblement leur sceau sur ses décisions. Le gouverneur farang, hébété par le vin et les femmes, n'intervient pas non plus. Le Shahbandar va même désormais jusqu'à collecter les impôts de la province en son nom.
— Pour vous montrer à quel point les choses se sont détériorées », ajouta Mohammed, dont les gros yeux ronds brillaient d'indignation au-dessus de son nez pointu, « j'ai reçu un rapport de Selim Yussuf disant que la nouvelle tactique du Shahbandar consiste à faire figurer une série de travailleurs fantômes sur la liste du personnel du Trésor et à verser leur salaire directement dans sa poche.
— En avons-nous des preuves, Mohammed ? demanda Petraja. Et savons-nous si le Pra Klang est impliqué ?
— Nous savons que c'est le cas, Votre Excellence, mais comme d'habitude nous n'en avons pas de preuve tangible, répondit Mohammed avec amertume. Nous ne savons pas non plus jusqu'à quel point le Pra Klang est impliqué. Mais, même s'il ne l'était pas, il soutiendrait sûrement son camarade.
— Bien que je méprise l'homme, observa Petraja, je crois qu'il est trop malin pour tremper dans un plan si évident.
— Pourquoi ne pouvons-nous pas simplement informer le Seigneur de la Vie de ce qui se passe ? » demanda Virawat.
Petraja lança un coup d'œil à Kosa et lui indiqua d'un signe de tête à peine perceptible qu'il souhaitait le voir répondre.
« C'est la chose par excellence que nous ne pouvons pas faire, Virawat, du moins tant que nous n'avons pas accumulé suffisamment de preuves. » Kosa jeta un regard prudent en direction de Petraja avant de poursuivre : « Voyez-vous, l'engouement de Sa Majesté pour son Pra Klang est tel que toute critique contre lui serait mise sur le compte de l'amertume du général Petraja pour n'avoir pas été nommé lui-même à ce poste. »
Il y eut un silence embarrassé. Petraja contempla brièvement ses pieds. Puis il releva la tête d'un air hautain et s'adressa une fois de plus à l'assemblée.
« Mes Seigneurs, bien que des troupes farangs tiennent garnison dans nos forts, bien qu'un farang
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