Les 186 marches
des Russes, Polonais et citoyens d’autres nationalités à la chambre à gaz, à la place du S. S. Niedermayer. Une fois que les détenus étaient enfermés à clé dans la chambre, le pharmacien E. Wasicky passait au S. S.
Roth une boîte de gaz. Après le printemps 1944, je vis exécuter cette opération par le pharmacien Gerber… »
– Ces nombreuses déclarations relatives aux ordres et aux initiatives avoués de création et d’utilisation de la chambre à gaz en dépit de quelques contradictions, forment un tout qui se suffit déjà à lui-même.
– Donnons maintenant la parole aux détenus et tout d’abord à ceux dont les fonctions à Mauthausen les conduisirent à approcher de près les exterminations, par gazage notamment, étant donné leur appartenance au kommando « krématorium » : Johann Kanduth et Wilhelm Ornstein.
– Johann Kanduth, dans une déposition auprès du département 18 du ministère autrichien de l’Intérieur, précise qu’il fut l’un des deux kapos de ce kommando créé le 9 mai 1940, qui compta un deuxième kapo (Suzak) et les premiers temps, deux porteurs de cadavres. Il y eut d’abord, à partir de cette date, un four crématoire à coke (celui situé sous le bunker), puis, à partir de 1942, un four à mazout, démonté ensuite, dont les traces d’installation sont encore visibles dans la cave des exécutions par balle dans la nuque, puis à partir de l’été 1944, les deux autres fours à coke qui nécessitèrent l’emploi de six autres porteurs de cadavres.
– Kanduth précise que la chambre à gaz fut installée provisoirement à l’automne 1941, puis terminée au printemps 1942. Tout d’abord des essais sur des rats eurent lieu en présence du directeur d’une entreprise de désinfection de Linz, Anton Slupetzky, puis des essais sur des détenus affaiblis. En mai 1942, au moins cent cinquante prisonniers de guerre soviétiques « SU-KG » furent déjà gazés. Puis, suivant un autre témoignage de Kanduth, cent trente-cinq femmes tchèques, par groupes d’une trentaine environ. Les hommes se déshabillaient dans la cour du bunker, les femmes dans la pièce près de la chambre à gaz. Chacun était vu par un médecin S. S. qui mettait une croix sur la poitrine des possesseurs de dents en or. Le gazage entraînait l’asphyxie mortelle en dix minutes ; la ventilation pour l’évacuation des gaz était alors mise en marche durant trois à quatre heures. En cas de gazage en masse, évacuer la chambre prenait six à sept heures. Le gaz était introduit par le pharmacien S. S. docteur Wasicky, dans un coffre intégré au mur de la petite pièce contiguë à la chambre à gaz et appelée « cellule à gaz ». De ce coffre, un tuyau laqué blanc, percé de trous, pénétrait dans la chambre à gaz.
– Devant le consulat général de la République Fédérale Allemande à New York, déposait le 6 mars 1969 Wilhelm Ornstein, Polonais devenu citoyen des Etats-Unis d’Amérique (2). Arrivé à Mauthausen le 10 août 1944, n° 85.224, il fut affecté le 19 août 1944 au kommando krematorium sous les ordres du kapo Kanduth et y resta jusqu’au 2 mai 1945, date à laquelle il réussit à se cacher au Revier. Pendant les exécutions par balle dans la nuque, il devait attendre dans la morgue, la porte étant fermée : les victimes étaient amenées une par une dans la pièce où il y avait une sorte d’appareil photo. Il fallait ensuite qu’il nettoie rapidement toutes les traces avant l’introduction de la victime suivante.
– Pour les gazages, Ornstein indique qu’il lui fallait apporter une brique très chaude", chauffée dans le crématorium, et la mettre dans le coffre de la « cellule à gaz » en présence du S. S. Roth, le kommandoführer ; il fournit ensuite une description minutieuse de cette cellule : table, tuyaux, masques à gaz, etc. puis donne des indications sur le déroulement d’un gazage. Lorsqu’elle n’était pas utilisée, la chambre restait toujours fermée.
– W. Ornstein reste un des rares survivants, témoins d’un procédé d’extermination des êtres humains au xx e siècle. Le souvenir des victimes le poursuit à jamais et plana sur notre rencontre le 22 octobre 1971 à New York. Le texte précédent le concernant se trouve donc être authentifié directement. Il m’indiqua en outre, notamment, que hommes et femmes étaient gazés séparément, la chambre à gaz pouvant contenir jusqu’à
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