Les 186 marches
de la Croix-Rouge internationale, avant même son retour en France, la libération de Mauthausen et la fin des hostilités :
– « … Le jour du départ du premier convoi de la Croix-Rouge, le samedi 21 avril 1945 (sur) deux mille hommes… une centaine, épuisés par le court chemin parcouru, furent dirigés sur la chambre à gaz et exécutés… Le dimanche 22, cent cinquante hommes passèrent ^ la chambre à gaz, le lundi 23, quatre-vingts hommes subirent le même sort… le mardi 24, cent quatre-vingts, en deux groupes, tous Slaves, furent gazés. L’un d’eux s’étant échappé, parcourut le camp libre, en chemise, titubant, désemparé, regagna le camp 3 et là, fut repris par les S. S. et la police intérieure du camp et ramené pour exécution à la chambre à gaz. Une quarantaine (de Français) croit-on, furent gazés. »
– De cette période dramatique d’extermination finale, nombreux sont les témoins toujours en vie, comme L. Péchot-Baque. Il n’est pas non plus inutile d’apporter ici mon témoignage personnel bien qu’étant à Gusen I. Nous y avions appris, sans trop y croire d’abord, le départ de Mauthausen de ces convois de la Croix-Rouge internationale emmenant notamment la plupart de nos camarades belges et français, femmes et hommes. Quant à nous, nous avions à attendre d’abord notre transfert de Gusen à Mauthausen pour pouvoir être éventuellement pris en charge à notre tour par la Croix-Rouge. Un certain espoir raisonnable de pouvoir nous en « tirer » commençait à se répandre parmi nous, contribuant à nous permettre de tenir moralement dans cette période de fin de guerre, marquée par une absence quasi totale de ravitaillement et donc par une faim tenace pour chacun d’entre nous. Je travaillais alors au kommando des électriciens. C’est durant ces derniers jours d’avril 1945 qu’un camarade allemand de ce kommando, ancien membre de la Légion étrangère française, vint m’avertir qu’au moment où certains de nos camarades français étaient emmenés, probablement pour retrouver la liberté, tout au contraire, d’autres, faisant partie de cohortes d’« invalides » chancelants, vêtus d’une seule chemise, remontaient du Russenlager (Krankenlager, principale infirmerie de Mauthausen) vers le camp central pour y être gazés. Le fait me fut confirmé ensuite par d’autres sources. Cette nouvelle était dramatique car, dans les conditions d’affaiblissement que nous connaissions de plus en plus, nous risquions de devenir rapidement tous des invalides. Je transmis cette information aux responsables de notre organisation française de Résistance, clandestine évidemment, avec lesquels je m’entretins séparément : M. Passard, A. Gaudin, le père Jacques, et d’un commun accord, nous décidâmes de ne pas la répandre parmi nos compatriotes afin de ne pas les affoler, au moment où avaient lieu les gazages de Gusen I et les tueries de Gusen II. Je prévins également un des Belges actifs, Lucien Vanherle, qui, de son côté, devait recevoir peu après par une autre voie, une information semblable et décida d’adopter la même attitude vis-à-vis de ses camarades belges. Finalement, l’avant-veille de notre transfert à Mauthausen, qui eut lieu le samedi 28 avril, je mis également au courant, à tout hasard, l’un de nos camarades yougoslaves G. Milikitch. Je puis donc certifier que j’ai connu parfaitement l’existence des gazages à Mauthausen en cette période finale.
– Jusqu’au dernier moment, il y eut de nombreuses tentatives de l’Organisation internationale de Résistance des détenus de Mauthausen pour sauver ceux qui étaient entreposés au camp 3. A la suite des informations transmises par V. Busek, une démarche dramatique fut en effet tentée, comme le rapporte S. Kru-kowski dans son livre Mauthausen , auprès du commandant du camp central de Mauthausen, le Schutzhaftlagerführer Bachmayer, par le détenu médecin-chef du Krankenlager, le docteur polonais W. Czaplinski (n° 279) qui avait eu l’occasion de soigner la famille de ce dernier. Cette démarche aurait contribué à l’arrêt des gazages des détenus entreposés au camp 3 dont les survivants furent ramenés au Krankenlager. D’autres tentatives eurent lieu pour sauver ceux dont l’exécution pour d’autres motifs apparaissait imminente, notamment les trente-quatre anciens résistants autrichiens dont Marsalek a narré le dramatique épisode final
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