Les 186 marches

faudra y servir au moins trois fois et en hiver cinq fois par semaine un dîner chaud sous forme de soupe, de pommes de terre à la peau et d’un supplément froid. Tous les soirs une bonne infusion naturelle. Elles devront être installées non pour que l’esprit étroit et borné d’un homme de peu y trouve son expression, mais dans le dessein de fournir un repas riche en vitamines et bien équilibré, même en temps de guerre.
    – Interdiction formelle de servir des pommes de terre salées.
    – Où en est l’introduction d’une carrière de cuisinier ? Sans ces équipes de spécialistes intéressées à son avenir, jamais on ne pourra envisager une modification ni une amélioration de la nourriture des troupes.
    – La formation des cuisiniers et l’organisation de cours qui ne durent pas seulement trois jours doivent être poussées par tous les moyens.
    – Le chef de la direction centrale de l’administration économique voudra bien, conjointement avec le chef d’état-major de l’Office central de commandement, me soumettre un projet d’ordre aux commandants d’unités sur cette question si importante de la nourriture et la responsabilité du commandant et du chef de compagnie. J’envisage, comme mesure éducative, l’ouverture quelque part en Allemagne d’une maison où l’on servira le mauvais ordinaire typique de la troupe. Les commandants et les chefs de compagnie qui ne se soucient pas de la nourriture de leurs troupes seront invités par moi à venir pendant quatorze jours à quatre semaines dans cette maison, pour y tâter de l’ordinaire typique de la troupe.
    signé : s. H. Himmler.
     
    La soupe est bonne mon général ? Les archives de la S. S. comportent plusieurs condamnations de chefs d’unité « à se nourrir exclusivement de l’ordinaire de campagne pendant plusieurs semaines ».
    Cette lettre, en forme de note, est le point de départ des expériences sur l’alimentation dans les camps de concentration. Oranienburg, « le camp éprouvette » de toutes les décisions de Himmler, s’avérera très vite un mauvais champ d’essais car l’ensemble des déportés n’y est pas soumis à des travaux de force, comparables par exemple à la dépense physique d’un fantassin S. S. obligé de marcher dans la neige du front russe pendant 50 kilomètres lourdement chargé. Heureusement, Mauthausen avec ses « hommes-outils » de la carrière remplit totalement les conditions requises. Une fois les résultats connus :
    – Pour ce qui est des recherches diététiques, j’ai l’intention de les poursuivre par exemple dans les établissements de formation nationale-politique. Dans l’un d’eux, par exemple, on pourrait donner une alimentation exclusivement végétarienne. Les jeunes s’y habitueraient sûrement. Mais il serait nécessaire qu’un responsable veille aux menus pour que les jeunes n’aient pas uniquement de la bouillie de froment ou quelque régime monotone, préparé sans goût. Nous pourrons reparler ensemble de ces questions.
    Il est probable que plusieurs centaines de produits « diététiques » ou synthétiques ont été ainsi expérimentés par les chercheurs du groupe de travail Schenck sur les cobayes humains. Comme toujours, Himmler était à l’affût de « nouveautés » et son entourage, qui cultivait ses « manies », ne manquait pas de lui fournir des occasions de prouver sa supériorité dans l’imagination.
    Le 11 mars 1943. Lettre à Oswald Pohl.
    « Cher Pohl,
    – Le S. S. -Brigadeführer Dr. Schieber  est venu me voir aujourd’hui. Il m’a fait part d’une découverte fabuleuse. Grâce à un bacille approprié, on peut récupérer l’albumine contenue dans la lessive sulfitée provenant de la fabrication de la cellulose et qui était jusqu’à présent déversée dans les cours d’eau où elle provoquait, dans de nombreux cas, la destruction des poissons. Ce bacille dévore l’albumine, éclate et donne, au bout de quelques heures, une pâte qui ressemble à de la saucisse, étonnamment nutritive et savoureuse, qui constitue une excellente nourriture.
    – J’ai convenu avec le docteur Schieber de mettre cette fabrication en marche dans une fabrique de cellulose qui ne possède pas encore ce genre d’installation. Il faudra très peu de main-d’œuvre, si bien que nous pourrons garder cet aliment pour nos recrues et aussi pour nos travailleurs dans les camps. Prenez immédiatement contact à ce sujet avec