Les amants de Brignais
célébré le 1 er juillet 1361, par procuration. La jeune fille fut veuve avant d’être femme : en effet, le 21 novembre 1361, celui qui devait être son époux trépassa en quelques jours dans le château où il était né, et dont l’histoire a conservé son nom.
La fatalité s’acharnait sur la Maison ducale de Bourgogne : Philippe, en effet, avait été victime d’une chute de cheval. Avec lui s’éteignait le dernier rejeton des ducs d’origine capétienne qui, par son mariage, eût pu placer son duché sur les sommets de la grandeur, ce qui laisse à penser qu’on fit peut-être en sorte qu’il vidât les arçons.
Divisé en cinq bailliages (Dijon, Autun, Chalon, Semur-en-Auxois et la Montagne, autrement dit Châtillon-sur-Seine), jamais un pays tel que la Bourgogne n’avait été menacé de l’intérieur, et rares furent les Bourguignons qui se rallièrent au roi de Navarre. Une bonne gestion des affaires assurait une prospérité ahurissante pour l’époque. Elle fut consignée au jour le jour par le receveur général du duché, au nom singulier : Dimanche de Vitel. Bourgeois, manants, juifs même (tels Guy Rabbi et Dreux Phelise) vivaient en parfaite harmonie.
Les Bourguignons ne souhaitaient donc pas tomber sous la domination du roi de France : ils redoutaient ses excès et sa… fiscalité ! Ils aimaient leurs institutions et leur autonomie. Lorsqu’ils apprirent que Jean méditait de les annexer, ils récriminèrent et ce fut l’Archiprêtre, soi-disant repenti des crimes qu’il avait commis en Nivernais et en Berry, que le roi désigna pour apaiser les récalcitrants !
Il n’eut pas à sévir, mais le pays fut ravagé tout de même par Jean de Neufchâtel, Thibaut et Jean de Chauffour puis par un terrible routier anglais : Eustache d’Auberchicourt, assisté de Pierre Andley et de l’Allemand Albrecht. Point de répit : à peine ces brigands avaient-ils été commettre leurs forfaits ailleurs qu’un autre Anglais, Robert Knolles, apparaissait, saccageant tout ce qui subsistait et ne pouvait lui opposer de résistance. Ainsi, Auxerre, le 10 mars 1359, fut-elle réduite en cendres.
Un autre aventurier apparut : Guillaume Starqui. Il s’établit à Ligny-le-Châtel et de là multiplia ses raids sur les environs.
Le pays s’organisa pour chasser ces sanglants importuns avec lesquels Charles le Mauvais avait fait alliance. Les Bourguignons furent battus à Brion.
Ce fut alors qu’Edouard III débarqua à Calais, marcha sur Reims et, désespérant de prendre cette ville, traversa la Champagne et entra en Bourgogne avec pour « conduiseur » Jean de Neufchâtel, tout aussi dévoué à sa personne que l’avait été, pendant l’été 1346, le célèbre Godefroy d’Harcourt.
On se battit encore. L’avant-garde anglaise était commandée par le connétable Roger de Mortimer, comte de la March. Il fut occis à l’escarmouche de Rouvray, le 26 février 1360. Il fallut négocier, de sorte que le 10 mars suivant, la Bourgogne concluait avec Edouard III le traité de Guilion, pour recouvrer la paix et panser leurs blessures, les Bourguignons offraient au souverain d’Angleterre 200 000 moutons d’or. Une somme fabuleuse.
À Paris, ce fut la consternation, moins peut-être pour ce traité que pour la remise de ce pactole au roi d’Angleterre. En Bourgogne, le seul prud’homme qui osa contester cette paix chèrement payée fut Jean II de Chalon-Arley, naguère allié d’Edouard III, devenu serviteur des Valois. Il dénonça le traité au roi, au régent. Il invita Philippe de Rouvres à comparaître devant eux afin qu’il prononçât solennellement la nullité d’un tel acte. Mais comment le régent aurait-il pu reprocher au duc de Bourgogne d’avoir fait ce qu’il avait bien fait, lui, à Brétigny-les-Chartres, afin d’obtenir une paix qui, en fait, n’était qu’un armistice !
Quant à Jean, otage d’Edouard III, il était disposé à subir les pires humiliations pourvu qu’il quittât, même provisoirement, la Grande Ile. Lorsqu’il prit en main la destinée de la Bourgogne, ce fut pour ratifier le traité du 10 mars. Dès lors, le duché prospère et bien géré fut grevé d’une dette si lourde qu’elle obéra ses finances ; toute son administration en souffrit.
Pas plus que celui de Brétigny, le traité de Guillon ne fut respecté. Les routiers recommencèrent à incendier, piller, violer, etc. La zone septentrionale du duché souffrit de
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