Les amants de Brignais
brisa la belle vaisselle, on torchonna et détériora les tentures et l’on constata – ô surprise ! – que certains preux avaient fait main basse sur des choses de prix.
La devise de l’Ordre était : Monstrant regibus astra viam 128 . Sa bannière était vermeille, semée d’étoiles et portant près du bois de la hampe une Vierge brodée. Elle se trouva une fois à la peine, mais nullement à l’honneur. En effet, quelques-uns de ces chevaliers d’élite qui ne devaient, au combat, reculer pas plus d’une vingtaine de mètres (en arpents de Paris, lesquels ne différaient guère de ceux du commun) furent vaincus en Bretagne, à Mauron, le 14 août 1352. Alors qu’un repli suivi d’un prompt regroupement leur eût permis de vaincre le parti d’Anglo-Bretons qui les avait attaqués, bien qu’ils fussent cinq ou six fois supérieurs en nombre, ils préférèrent honorer leur serment ! Quatre-vingt-dix d’entre eux moururent dans une affaire qui fut fatale à « treize seigneurs de marque, cent quarante chevaliers et un grand nombre de gens de pied 129 ».
Il n’en fallut pas davantage pour que l’Ordre de l’Etoile sombrât dans le dégoût, la dérision, l’indifférence. Quels rires eussent éclaté si les gens de Saint-Ouen avaient appris que l’ost auquel les chamarrés de l’Etoile appartenaient avait été battu par trois cents hommes d’armes et trois cents archers commandés par des chevaliers vaillants, astucieux, mais nullement étoilés, qui se nommaient Gauthier de Bentley, Tanguy du Châtel, Garnier de Cadoudal et Yves de Trésiguidi !
ANNEXE III
CHAMBLY, CITÉ DE LA MAILLE
Il est hélas ! impossible – il y faudrait maints dessins – de révéler aux lecteurs de cet ouvrage comment on s’y prend pour mailler une cotte, un haubert, un camail ou des gants. Mais on peut se poser la question : d’où viennent les mailles ? À vrai dire, nul ne le sait. Ce dont on est certain, c’est que les mailles d’origine arabe étaient plus fines que les mailles « européennes ». Cela, d’ailleurs, se conçoit : les Arabes utilisaient des arcs courts, aux sagettes légères, douées d’une force de pénétration plus faible que celle des arcs francs, anglais, germaniques, et surtout gallois. Ces mailles permettaient d’éviter le tranchant et de diminuer la force du choc.
L’apparition de l’armure de plates était prévisible. Les plates évitaient plus fréquemment la perforation et, mieux que des mailles, dispersaient la puissance du heurt assené sur toute la surface de la plaque, sauf si celle-ci avait été déformée, car l’impact devenait radiant à partir d’un « nœud ».
Le processus de la création des vêtements de mailles apparaît comme simple, logique dans la conception. Tous ceux qui s’y sont essayés 130 savent que les premiers travaux ne sont point faciles 131 . Le processus de fabrication de la maille peut se résumer ainsi :
1. – Etirage du fil de fer au diamètre choisi. Ceci se faisait (et se fait) en chauffant violemment un bloc de fer dont une extrémité, forgée en pointe, est introduite dans une filière. De l’autre côté de celle-ci, la pointe du lingot est saisie solidement à l’aide d’une « chaussette » montée sur un câble accroché à un treuil. On étire le lingot à travers le trou de la filière. Cela s’appelle ébroudir ou ébrouder un fil.
2. – Le fil, réchauffé, est enroulé sur un cylindre de métal du diamètre choisi. On l’y laisse refroidir.
3. – Au marteau léger, on écrase le fil sur toute la longueur de la tige centrale et réalise un plat de largeur suffisante.
4. – Au burin mince, les anneaux sont sectionnés.
5. – Au poinçon double, deux petits trous seront percés dans le méplat réalisé ci-dessus.
Ce procédé est celui (peu d’exemples ) où les rivets sont disposés radialement.
Si ces rivets doivent être fixés, beaucoup plus facilement, à plat – donc la maille posée horizontalement sur le bec de l’enclume -, il est évident que la technique est assez différente :
1. – Etirage comme précédemment.
2. – À la sortie de la filière, le fil passe dans un laminoir rudimentaire dont un ressaut écrase régulièrement une courte portion de fil.
3. – Enroulage comme ci-dessus en veillant à ce que les méplats réalisés soient posés radialement.
4. – On retire la tige diamétrale avant refroidissement du fil, ou on le réchauffe
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