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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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jusqu’à ce qu’il en trouvât une à sa convenance. Il se remémorait parfois cette aventure avec autant d’émoi que lorsqu’il évoquait Aliénor. Elle procédait, outre un besoin de réconfort, de ce grand instinct d’union du mâle et de la femelle sans qu’elle en possédât l’inexorable aspect de chiennerie… Où se vendait-elle, à présent, cette jeune et brune bienfaitrice dont le visage rieur, précocement usé, hantait parfois sa mémoire ?
    Il n’y avait aucune confusion dans ses pensées, mais l’une d’elles, détachée des autres et comme ceinte d’anxiété, lui prédisait un châtiment féroce.
    Nue, cette fois, Perrette se jucha sur ses coussins et tendit un bras au gousset aussi sombre que son âme vers le dais de soie blanche qu’elle arracha pour s’en draper.
    « La voilà pudibonde, maintenant ! »
    –  Tu es pire qu’un huron !… Jamais on ne m’a traitée ainsi !
    – Dame… Jamais je n’avais demandé à venir céans.
    Une voix flûtée – une voix de jouvencelle – sortit de quelque part :
    – Je vous avais prévenue qu’il était différent. Il est resté serein devant votre beauté bien qu’il n’ait rien d’un eunuque !… Mais vous connaissez un bon moyen pour lui donner de la vigueur : la hart (1) 48 durcit son homme autant que le désir… La corde au bout de laquelle Ancelin pendille, roide comme un Carme, m’incite à réclamer cette punition.
    Tristan recula : ces femmes étaient folles !
    – Dame, dit-il, faussement pleurnicheur, je suis las et vous l’ai dit… Demain… Oui : demain !… Faites-moi ramener dans ma geôle et faites-m’y porter un plantureux repas… Demain, quand vous voudrez, je serai votre amant.
    – Es-tu prêt à me le jurer ?
    Une lueur brûlait le regard de Perrette. Elle cilla des paupières, joignit ses mains. Elle devait, agenouillée sur son prie-Dieu, avoir ce visage extatique.
    – J’ai grand-faim de toi, moi, sais-tu ?… Si tu me déçois…
    Elle passa lentement son index sur son cou.
    – Jure !
    Il acquiesça de la tête en se demandant s’il exprimait bien, le front bas, les lèvres tremblantes, la contrition la plus humble.
    Il y eut un léger grincement dans son dos. Comme il pensait que les panneaux de la chambre s’ouvraient afin de lui permettre le passage, quelque chose tomba violemment sur sa tête.
    Cette fois, le bourdonnement qu’il entendait ne devait rien à des doigts agiles tapotant une peau de bête. C’était son cerveau qui vibrait comme un tambourin !
     
    * * *
     
    Une grosse main frottait son crâne. Il ouvrit les yeux et reconnut, penché sur lui, blême dans la pénombre, la face hilare de Tiercelet de Chambly.
    – Ils m’ont donc ramené !
    – Nu… Beau et odorant comme une grande dame !… Vos penailles sont là, mettez-les.
    – Depuis quand suis-je de retour ?
    – Guère longtemps… Pendant votre absence, j’ai eu loisir de lacérer vos draps… Ils étaient, par ma foi, bien malades et sales !… Encore heureux que les gars qui vous ont remonté vous aient jeté comme un sac de blé ou d’avoine ! S’ils s’étaient approchés du lit pour vous y déposer, c’en était fait de notre dessein… Bon sang, ils auraient pu changer ces toiles chaque mois !… Mais craignez rien : les tresses et les liens sont solides… Couvrez-vous sinon vous allez prendre un rhume… Manquerait plus qu’un éternuement révèle notre fuite !
    Frissonnant et inquiet, Tristan se rhabilla. C’était vrai qu’il faisait froid et, semblait-il aussi, plus noir que de coutume. La cellule haut perchée puait toujours autant, mais il la trouvait plus sûre que la chambre d’où on l’avait extirpé. « Une folle ! » songea-t-il. « Des folles ! » Les traits avenants puis sauvages de sa geôlière s’animèrent dans sa mémoire. Si son crâne douloureux, ses joues rases et ses cheveux courts ne lui avaient prouvé l’authenticité de son aventure, il eût pensé sortir d’un de ces rêves voluptueux en diable que parfois, ivre de chasteté, il composait sciemment ou non, à Fontevrault.
    – J’ai bien cru qu’ils allaient vous occire ! Que vous voulaient-ils ?
    – La dame de qualité voulait que je l’enfourche.
    – Et, suivant mon conseil, vous avez résisté !
    – Certes… J’ai eu peur, si tu veux tout savoir. J’ai toujours peur.
    Tristan se sentit déprécié par un regard qu’il distinguait à peine.
    – Que pensez-vous

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