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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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véritablement rendu ce service ? La tradition qui lui en fait honneur est-elle aussi bien fondée, qu’elle est généralement répandue ?
    Pour me mettre en état de répondre à cette question, je crois devoir rappeler en peu de mots les principales circonstances qui préparèrent l’événement dont la délivrance de Paris et le salut du Royaume furent la suite.
    Depuis le traité conclu vers la fin de juillet 1358, entre Charles, dauphin, Régent du Royaume, et Charles le Mauvais, roi de Navarre, Marcel voyait son parti s’affaiblir chaque jour, et avait sujet de craindre que les Parisiens, dont les vexations commençaient à lasser la patience, n’acceptassent les conditions auxquelles le Régent promettait de leur pardonner. La première était de lui livrer le Prévôt et douze bourgeois à son choix. Marcel perdit bientôt le peu de crédit qui lui restait : de nouvelles violences achevèrent d’aliéner les esprits. En même temps, les désordres que commettaient dans Paris quelques troupes anglaises que le roi de Navarre y avait laissées pour soutenir ses partisans, irritèrent le peuple qui s’attroupa. Plusieurs Anglais furent tués dans l’émeute : ceux dont le Prévôt put favoriser l’évasion, s’étant joints aux Navarrais, venaient sans cesse insulter les Parisiens et les défier jusque sous leurs murs. Obligé de céder aux clameurs des bourgeois qui demandaient qu’on les menât contre l’ennemi, le Prévôt sortit à leur tête : mais, soit trahison, soit malhabileté de leur chef, ils furent taillés en pièces. On s’en prit à Marcel ; on l’accusa d’avoir préparé lui-même cet échec en prescrivant aux Parisiens une marche qui les exposait à une défaite certaine. Sentant alors le danger de la situation, et désespérant d’obtenir grâce du Régent, s’il tombait entre ses mains, il résolut de livrer la ville au roi de Navarre. Etant allé trouver ce prince à Saint-Denis, il convint avec lui d’introduire dans Paris, la nuit du 31 juillet au 1 er août, les Anglais et les Navarrais, qui devaient se répandre dans différents quartiers et massacrer les habitants de tout âge et de tout sexe, dont les maisons ne porteraient pas une marque qui serait désignée aux soldats. Ensuite, Robert le Coq, évêque de Laon, devait couronner Charles de Navarre, roi de France.
    Les choses étaient en cet état, le jour où Marcel fut tué. Voyons maintenant comment les historiens contemporains racontent cet événement, et sur quel fondement la gloire en est attribuée à Jean Maillart. Je commence par le continuateur de Nangis, qui a écrit dans Paris même l’histoire de son temps 133 , depuis 1340, jusqu’en 1368, et qui est mort en 1369.
    Selon ce chroniqueur, le Prévôt des Marchands s’étant rendu en plein jour, avec quelques gens de sa faction, aux différentes portes de la ville, renvoya une p artie des Bourgeois qui les gardaient et en substitua d’autres auxquels il confia les clés. Arrivé à la Bastille Saint-Antoine, il voulut pareillement changer le s gardes et se saisir des clés. Ceux entre les mains de qui elles étaient, refusèrent de les lui remettre. Le Prévôt insista ; les esprits s’aigrirent, et dans la chaleur de la dispute, un des gardes s’écria : « Qu’est-ce donc que ceci ? Le Prévôt nous trahit ! » À ces mots, un autre garde levant sa hache ou sa hallebarde ( hasta-haste (356) ), le frappa et l’étendit mort à ses pieds. Le chroniqueur e dit rien de plus, et ne fait pas même au garde l’honneur de le nommer.
    Le récit de Jean Villani, également contemporain, et qui, quoique étranger, paraît avoir été bien instruit de ce qui se passait en France, ne fournit pas plus d’éclaircissements sur la question proposée. On y lit que le Prévôt des Marchands s’étant rendu avec quelques bourgeois armés, qui lui étaient affidés, à une Bastille bien fournie d’hommes d’armes, de vivres, de troupes, congédia la garde, enleva les munitions, et donna les clés à un ancien trésorier du roi de Navarre ; qu’en ayant usé de même dans les autres Bastilles, les Parisiens e nvoyèrent demander au Régent si Marcel agissait par son ordre ; que le Régent ayant désavoué la conduite du Prévôt, le peuple se mit à crier : « Vive le Dauphin, meurent les traîtres »  ; qu’enfin Marcel fut tué dans cette émeute avec ceux qui l’accompagnaient.
    Ces deux écrivains ne distinguent aucun des bourgeois qui

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