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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sorte de
sincérité ironique et de scepticisme dédaigneux.
    « Parlez… parlez… et ne ménagez personne.
    – Eh bien, tant que Dandolo fut grand inquisiteur, j’eusse
pu à trois reprises différentes ; mais par suite
d’inexplicables coïncidences, les ordres me furent toujours donnés
trop tard, et les mesures que je pris furent détruites par des
mesures prises ailleurs.
    – Et depuis que Dandolo s’est démis ?
    – Depuis, Roland Candiano est absent de Venise,
monseigneur.
    – Vous êtes sûr ?
    – Monseigneur, je ne me trompe jamais parce que jamais je
n’avance que ce que j’ai constaté moi-même… »
    Le visage du doge montra un visible soulagement.
    « Je ne croyais pas, songea Gennaro, que Foscari pût avoir
peur à ce point ! »
    Le doge reprit en s’efforçant de garder la froideur qui
convenait à sa dignité :
    « Il est indispensable que Roland Candiano soit saisi et
jugé. Il s’est mis hors la loi. Il a accepté de commander une
véritable armée de bandits. Cet homme en liberté est un danger
permanent pour la République… Malheureusement, je crains qu’il ne
soit éloigné pour toujours et qu’ainsi il ne parvienne à échapper à
la justice de la république.
    – Votre Excellence peut se rassurer, dit Gennaro d’une voix
qui vibra étrangement : Roland Candiano reviendra.
    – En ce cas, vous agirez ; je vous donne pleins
pouvoirs.
    – Faites attention, monseigneur, que vous me confiez là une
redoutable puissance… momentanée, il est vrai, et que le plein
pouvoir peut obliger jusqu’au capitaine général à m’obéir.
    – Je sais, – et je confirme. »
    Le doge saisit un parchemin, écrivit quelques lignes, signa,
apposa son sceau, et tendit la feuille à Gennaro qui tressaillit de
joie.
    « Maintenant, monseigneur, dit alors le chef de police,
parlons de la conspiration qui vous préoccupe. Je vous disais que
d’inutiles arrestations avaient été opérées.
    – Qui fallait-il donc arrêter ? » demanda le doge
frémissant.
    À ce moment l’huissier de service entra et annonça :
    « Monsieur le capitaine général Altieri demande à être
introduit. »
    Le doge donna l’ordre de le faire attendre.
    Gennaro, comme s’il eût pris une résolution soudaine, s’avança
auprès de Foscari et lui dit à voix basse :
    « Je crois que Votre Excellence ferait bien de recevoir
immédiatement le capitaine général. »
    Foscari jeta sur le chef de police un profond regard, puis,
faisant un signe à l’huissier qui s’éloigna, il se leva, souleva
une tenture, et dit à Gennaro :
    « Entrez là. Nous avons à continuer cet entretien.
    – C’est mon avis », dit froidement Gennaro.
    Le doge laissa retomber la tenture, et reprit sa place au moment
même où Altieri entrait dans le cabinet.
    Altieri s’inclina devant le doge en disant :
    « Je croyais trouver ici le chef de police.
    – Il vient de partir à l’instant, mon cher ami. Cependant,
si besoin est, je puis le faire rappeler.
    – Inutile », dit le capitaine général qui, sur un
signe de Foscari, prit place sur un siège.
    Altieri paraissait un peu vieilli. Des fils blancs se mêlaient
sur ses tempes à sa rude chevelure noire. Les lignes générales du
visage s’affaissaient ; mais ses yeux brillaient toujours d’un
insoutenable éclat sous ses sourcils touffus, et dans les rides du
front, plus dures, se voyait l’expression d’une volonté
farouche.
    De terribles inquiétudes agitaient l’âme de cet homme.
    La conspiration qu’il avait préparée était sur le point
d’aboutir.
    Et pourtant, il n’était pas satisfait. Or, ce n’était pas
l’issue de cette aventure qui l’inquiétait. Certains détails de la
préparation elle-même l’effrayaient. D’abord, cette conspiration,
il s’y était trouvé mêlé presque malgré lui ; puis il en était
devenu le chef sans qu’il l’ait réellement souhaité ; puis
enfin toutes les destinées de cette grave tentative s’étaient
trouvées concentrées en lui.
    Certes, son ambition déchaînée y trouvait son compte.
    Certain de devenir doge en un temps où cette dignité armait
celui qui en était investi d’une puissance souveraine, Altieri
avait comme tant d’autres rêvé une puissance plus souveraine
encore. Comme d’autres, il songeait à transformer en royauté la
magistrature dictatoriale dont il allait se saisir.
    Et l’orgueil faisait battre ses tempes, la passion du pouvoir et
de la

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