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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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porte.
    En se retournant, il vit Guido Gennaro qui sortait de derrière
sa tenture.
    « Monseigneur, dit le chef de police, vous me demandiez
tout à l’heure par qui il fallait commencer les arrestations. Je
vous réponds maintenant : par celui qui sort d’ici…
    – Expliquez-vous, monsieur, expliquez-vous sur l’heure, car
je me demande vraiment si j’ai bien entendu ! »
    Foscari était devenu livide, non d’effroi, mais de fureur. Une
de ces colères blanches qui étaient bien rares chez lui, mais
d’autant plus violentes, faisait trembler ses joues.
    Avant que Gennaro eût le temps de répondre à sa dernière
question, le doge avait violemment frappé sur sa table avec un
marteau qui lui servait à appeler. Le marteau léger en argent se
brisa.
    « Que faites-vous, monseigneur ? s’écria Gennaro en se
jetant devant la porte pour empêcher d’entrer.
    – Arrêter le capitaine général…
    – Non, monseigneur !
    – Je vous fais arrêter vous-même. Holà ! les
gardes ! Misérable, place !… »
    Foscari s’avança menaçant sur Gennaro, le poing levé.
    « Monseigneur, dit rapidement le chef de police, il importe
peu que je sois arrêté, moi, et même que je meure ! Mais si
vous touchez à Altieri
aujourd’hui,
tout est perdu…
Écoutez-moi, de grâce… »
    Foscari recula en passant ses mains sur son front.
    Et comme les gardes du palais accouraient et entraient, d’un
effort de volonté puissante, il se composa un visage
impassible.
    « Eh bien, dit-il à l’officier accouru au bruit, qu’y
a-t-il donc, monsieur ?…
    – Pardon, monseigneur, nous avions cru entendre…
    – Vous avez mal cru… Qu’on me laisse ! »
    Les gardes se retirèrent effarés.
    « Parlez, maintenant, dit Foscari au chef de police.
    – Monseigneur, dit Gennaro, je tiens toute la conspiration
dans mes mains. Je sais que le capitaine général en est le chef.
Or, vous connaissez assez Altieri pour supposer qu’en une
circonstance aussi grave, il a commencé par s’assurer la fidélité,
le dévouement des archers et des arquebusiers. Seule, peut-être, la
compagnie des hallebardiers lui échappe ; mais elle serait
balayée comme un fétu de paille par la tempête. Or, si vous arrêtez
Altieri aujourd’hui, et je suis prêt à le faire si vous m’en
réitérez l’ordre, dans deux heures, vous aurez sur les bras une
terrible révolte de soldats. Altieri sera délivré, votre palais
envahi… et le diable sait ce qui arrivera alors ! Or,
monseigneur, il est facile, au contraire, de laisser les conjurés
dans une sécurité trompeuse, et de tout disposer pour une
impitoyable répression. »
    Une sombre flamme s’allumait dans les yeux de Foscari ;
l’ardeur de la bataille proche lui fouettait le sang ; car de
même que chez la plupart des aventuriers de cette violente époque,
il était dénué de ce qu’on appellerait aujourd’hui le sens moral,
mais doué d’une bravoure physique extraordinaire.
    « Si vous me permettiez un conseil, insinua Gennaro.
    – Parlez ; vous me rendez aujourd’hui un service qui
vous donne le droit de conseiller.
    – Eh bien, monseigneur, à votre place, je commencerais par
faire mettre en liberté toutes les personnes arrêtées d’après les
listes qui vous ont été remises. »
    Le doge hésita un instant.
    « Non ! dit-il d’une voix sombre. Puisque ceux-là sont
en prison, qu’ils y restent ; c’est plus sûr.
    – Mais la plupart de ces malheureux étaient vos amis.
    – Ils sont devenus mes ennemis, puisque je les ai
frappés ; libres, ils se joindraient aux conjurés ;
lorsque j’aurai triomphé, il me sera possible de les relâcher l’un
après l’autre, et ce sera alors de la magnanimité, tandis que ce
serait aujourd’hui de la faiblesse. »
    Gennaro s’inclina, pour dissimuler son désappointement.
    « J’admire le génie de Votre Excellence, dit-il.
    – C’est bien ; vous devez avoir la liste des gens qui
se sont unis à Altieri ? »
    Gennaro dicta alors une trentaine de noms.
    Le doge les écrivait lui-même sans faire aucun signe de surprise
ou d’indignation. Et pourtant, il était atterré.
    « Que veulent-ils ? demanda-t-il alors.
    – Ce que veulent en général les gens qui renversent un
gouvernement pour prendre sa place : des honneurs, des grades,
des emplois, le tout bien rétribué, bien entendu.
    – Et Altieri ?
    – Il veut être
vous,
monseigneur ! »
    Le doge demeura longtemps

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