Les Amazones de la République
un peu folklorique, qui nous raconte ses émois érotiquesâ¦Â »
Le trait, sâil est assassin, nâest pas totalement dénué de fondements : en effet, jamais mythe ne fut gonflé de plus de vent et les rares anecdotes qui courent sur lâintimité de VGE laissent lâimage dâun homme qui butina, là où, on lâa dit, Mitterrand moissonna. Et où Chirac festoya. à lâinverse de ses deux successeurs, Giscard semblait avoir banni de sa vie toute sensualité et toute sexualité, en apparence en tout cas. Cet esthète de la politique, doté dâune hypertrophie intellectuelle, se croyait destiné à éblouir le monde. Quant aux femmes, sâil adorait leurs courbes et leurs papotages, il les séduisait au compte-gouttes. Et souvent en fonction dâun critère : leur place dans le Whoâs Who .
1 . Le Dernier Mitterrand , Plon, 2011.
Chapitre 4
Mitterrand, le « premier » dâentre eux
Encore plus sacrée que lâescalade de la roche de Solutré ou que les pèlerinages sur les hauteurs de Jérusalem et les chemins de Katmandou, lâascension de lâescalier en colimaçon qui menait au bureau de François Mitterrand, au début des années soixante-dix, à quelques mètres de la place du Palais-Bourbon, relevait de la procession.
Assises sur les marches, des jeunes femmes attendaient en silence, souvent de longues heures, celui qui, alors premier secrétaire du parti socialiste, lisait tranquillement France Soir derrière une porte capitonnée.
Dans son fauteuil, le locataire des lieux évoquait une divinité que protégeaient, dans un bureau contigu, quatre fidèles cerbères, dont Marie-France Lavarini, qui deviendra, des années plus tard, lâoreille de Lionel Jospin ; Kathleen Evin, une jeune journaliste en herbe et secrétaire générale adjoint du PS, à lâépoque, que François Mitterrand courtisa plus quâassidûment ; ainsi que Michel Charasse. Le « Premier » â ainsi surnommé par ses collaborateurs â, qui raffolait des histoires dâalcôve, avait trouvé chez ce jeune assistant parlementaire, à la bonhomie ventripotente, un joyeux partenaire : ce collecteur de ragots à forte dose hormonale lui en rapportait des fagots.
Notamment au cours des nombreux voyages officiels qui suivront et qui verront Michel Charasse dresser, avec précision, devant un François Mitterrand aux anges, la cartographie amoureuse et sexuelle des journalistes présents à quelques sièges de lui, dans la carlingue de lâavion présidentiel. Au jeu de « Qui couche avec qui », celui qui deviendra, un jour, son ministre du Budget, était aux histoires « de culs » ce que le ministre de la Police, Joseph Fouché, fut aux renseignements sous le Directoire : une source aussi fiable quâintarissable.
Grand prédateur devant lâÃternel, réputé pour ses multiples liaisons, le député de la Nièvre collectionna les conquêtes avec méthode, sous les regards résignés de Danielle Gouze, son épouse, qui sâen consolait de son côté. à son faîte, toute beauté devait être séduite, pensait François Mitterrand qui, lors dâun dîner à lâÃlysée, en 1994, en présence dâAnne Lauvergeon, Pierre Bergé et Georges-Marc Benamou, se lança dans une petite devinette : « Vous découvrez votre conjoint ou conjointe au lit avec quelquâun dâautre, que faites-vous ? » Chacun y alla de son commentaire amusé, évoquant, devant ce spectacle attristant, une réaction de colère, dâesclandre et de fuite mêlés. Le tour de table terminé, Mitterrand, les coudes largement appuyés sur son fauteuil dâarchevêque, lâcha lâÅil gourmand : « Moi, je prends un fauteuil, jâouvre un livre et je regardeâ¦Â »
Hein ? Quoi ? Câest une blague ? put lire dans le regard décontenancé de ses invités un François Mitterrand vivant pleinement la scène. Les femmes ? Elles étaient son décor, il aimait les observer et jardiner leur intimité. Pourquoi sâembarrasser de principes ?, lança-t-il un jour à Lionel Jospin, qui venait de quitter Ãlisabeth Dannenmuller :
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