Les Amazones de la République
de ses séjours officiels à Paris, résuma la question en expliquant que lâexercice du pouvoir était « érogène » : un euphémisme chez ce virtuose, dont DSK reste un illustre émule.
Mais sexe et pouvoir nâont jamais fait bon ménage. Dâun machisme souvent éculé, la gent masculine perpétue ainsi volontiers des clichés graveleux, avec une muflerie sans bornes : « à toutes mes consÅurs, baisez utile, vous avez une chance de vous retrouver première dame de France », tweeta un jour de juillet 2012 le commentateur sportif Pierre Salviac, qui faisait alors référence au statut de Valérie Trierweiler ! Cette sortie de route, pour le moins indélicate, valut à lâintéressé son licenciement immédiat de la station qui lâemployait. Crime de lèse-majesté ? Câest oublier les mille et une saillies dâune classe politique qui, de génération en génération, a navigué entre Sodome et Babylone.
Quelques années plus tôt et dans le langage fleuri quâon lui connaît, Jacques Chirac clamait, un verre à la main devant un parterre de fidèles goguenards, au bord de lâapoplexie : « Buvons à nos femmes, à nos chevaux et à ceux qui les montent ! » Avant dâajouter, un autre jour et plus sobrement cette fois-ci, alors que, revenant ragaillardi dâun rendez-vous galant, il philosophait sur la question dans ses bureaux de la mairie de Paris en compagnie de lâun de ses confidents : « Finalement, chaque homme nâagit quâen fonction de la satisfaction dâun désirâ¦Â »
Quand les soldats de César entrèrent dans les rues de Rome, lors du triomphe gaulois, ils chantèrent ces vers : « Citadins, surveillez vos femmes, nous amenons un adultère chauve. Tu as forniqué en Gaule avec lâor emprunté à Rome ! » « Plus dâune succombèrent sans quâil se laissât dominer par Vénus quâil âbanalisaitâ en passant des bras dâune amante dans ceux dâune autre », écrit Hinnerk Bruhns. « Mais ce pouvoir de séduction, ajoute lâhistorien allemand, dépassait la seule sphère de la sensualité. Sâil savait enchaîner les cÅurs et les corps, il se préparait, grâce à son charisme, à dominer le monde. Et à installer son regnum.  »
Parler de « cul dâÃtat permanent » â une image, certes abrupte, puisée dans les colonnes du magazine Marianne â revient à plonger dans les pages dâune édition de Lagarde et Michard, revisitée par Félix Faure, dont lâépectase â lâune des pages les plus connues de lâhistoire de lâÃlysée â lui valut cette épitaphe de Clemenceau : « Il se croyait César et il est mort Pompée. » Lâhistorien Pierre Miquel rappelle ainsi que ce Palais eut notamment pour propriétaires, non seulement la marquise de Pompadour, mais également le financier Beaujon, une figure exotique du xviii e  siècle, trésorier de la Cour, qui paradait dans le parc du Château à bord dâune voiture tirée par des créatures déshabillées, ses « berceuses ».
Si les murs de cet édifice pouvaient parler, ils raconteraient des scènes dâalcôve à nâen plus finir : lâÃlysée est un delta où sont venues se perdre, avec délice, une cohorte dâélégantes â des intellectuelles, des journalistes, des divas, garces ou soubrettes â, toutes condamnées à être éblouissantes pour séduire le maître des lieux. Des gourgandines ou déesses toutes accourues, non pas pour se vendre, mais tout simplement pour se donner.
LâÃlysée, un lupanar ? Le trait est forcément excessif, même si le mot dâHenry Kissinger, selon lequel le pouvoir est le plus puissant des aphrodisiaques, sâapplique à merveille à ce lieu. Trop longtemps ensevelie sous lâépais crépi dâune morale hypocrite, que des siècles de catholicisme et de monarchisme ont consolidé, la vie privée de nos monarques est aujourdâhui lâaffaire de tous. Ils sont dâailleurs les premiers à lâinstrumentaliser, utilisant la presse
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