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Les Amazones de la République

Les Amazones de la République

Titel: Les Amazones de la République Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Renaud REVEL
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people comme des faire-part. Nos trois derniers présidents de la République se sont ainsi taillé des réputations de séducteurs qui les suivront outre-tombe – des «  serial lovers  » qui s’inscrivent dans une longue tradition.
    Installés au pinacle en leur Vatican élyséen par un peuple dont ils ont reçu l’onction, les papes de la V e  République se seront tous défroqués. Avec, chez les uns, un côté ripailleur et chevaucheur de jeunes assistantes ou de secrétaires. Et chez les autres, un art appliqué du donjuanisme. Nos grandes figures politiques sont d’indécrottables séducteurs grisés par la gloire. Et ce statut leur confère, sur le plan de leur intimité et de leur sexualité, une quasi-immunité : un blanc-seing autrefois baptisé « droit de cuissage ».
    Or les Français ne s’en offusquent pas. C’est oublier que les peuples aiment les odeurs de soudards, les histoires de trousseurs de jupons et les récits de hussards. Comme les destins troubles et d’aventuriers, tels que celui d’un François Mitterrand. Le philosophe Merleau-Ponty « n’avait que désir de séduire, en appliquant une très ancienne recette, écrivit un jour Jean Cau, qui consiste à faire croire à des péronnelles et à des Bovary que s’entretenir avec vous les rend intelligentes. Et d’une intelligence que nul avant vous n’a, criminellement, pas remarquée. Ça va loin et j’espère jusqu’au lit », concluait le même homme. Le plus souvent, aurait-il dû compléter. N’est-ce pas ce qui s’appelle « régner », quand on a élu domicile à l’Élysée ?
    Depuis Giscard – et même de Gaulle, à qui l’on prêta quelques liaisons discrètement enfouies dans les catacombes de l’histoire –, tous les locataires du palais de l’Élysée ont ainsi enchaîné les liaisons : de lourds secrets, parfois, protégés par des entourages condamnés au silence, mais qui sont, en vérité, secrets de Polichinelle.
    L’œil qui vrille et d’elles toujours ivre : la politique du boudoir ne date pas d’hier. Et si l’oreiller, chez une journaliste, est le stade ultime de la connivence, ces mœurs s’inscrivent dans une tradition quasi républicaine. « Un homme qui ne boit que de l’eau a quelque chose à cacher à ses semblables », disait Baudelaire. Mais un homme politique qui porte en bandoulière sa rectitude n’est-il pas regardé, par l’opinion, comme une chose émasculée ? Les rares abstinents connus – Édouard Balladur, Lionel Jospin et Raymond Barre –, dont l’œil, dit-on, n’a jamais vrillé au passage d’une jolie femme, marchèrent allègrement, et naïvement purs, vers la défaite. Après avoir affiché, pour l’opinion, au revers de leur veste, leur ascétisme et une indéfectible fidélité à l’être aimé. Comme d’autres portent l’œillet à la boutonnière.
    Eussent-ils caressé quelques autres gaines et s’en fussent-ils vanter, leur image s’en serait-elle trouvée modifiée et leur destin bouleversé ? Allez savoir… Jacques Chirac, grand chasseur devant l’Éternel, fit la carrière que l’on sait, après qu’il eut failli la sacrifier – et quitter Bernadette –, pour une journaliste dont le nom, couché dans les carnets roses de la République, est connu de quelques-uns. Là encore, nous y reviendrons…
    Quant à « l’homme à la rose », François Mitterrand, qui bascula dans ses boudoirs nombre de jeunes femmes qui tricotaient de la plume, il fit du menu bois de son foyer, noyant sa légitime au milieu d’une foule de liaisons morganatiques. Qu’on le veuille ou non, l’apparition de Mazarine – tombée un beau matin du ciel pour s’étaler en couverture de Paris Match  –, comme la chronique de ses nombreuses liaisons, contribuèrent à nourrir le mythe. Et à transformer, comme dit l’autre, une vie en destin. Connaît-on un autre président dans l’histoire de ce pays qui se soit fabriqué, de son vivant – et rien que pour

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