Les Amazones de la République
sieste. Celle-ci sitôt achevée, il retrouvait ses invités. Et câest alors quâon le voyait ôter ses lunettes et virer noblement, enfin, en direction de celle qui se morfondait sur une chaise longue, plongée dans de la lecture, en espérant secrètement que sa patience serait à un moment rémunérée. Lâinvitant à se lever, il disait alors : « Si vous le voulez, je peux vous faire visiter la région. Et même pousser jusquâau bord de mer, le coucher du soleil y est superbe, vous verrezâ¦Â »
Chacun avait compris et la suite se passe de commentaires⦠Assises lâune à côté de lâautre, Danielle Mitterrand et Christine Gouze-Rénal observaient la scène, telles deux statuettes figées dans lâexpectative. François Mitterrand prenait alors sa voiture et emmenait sa conquête du jour dans les chemins landais. « à la tombée de la nuit, les tourtereaux rentraient, raconte lâune des habitués des lieux. Elle, la chevelure légèrement chiffonnée, lui, un sourire de conquistador à la commissure des lèvres. » Puis, en toute fin dâaprès-midi, François Mitterrand frappait dans ses mains : « Bon, je crois que notre amie va pouvoir rentrer ! Jean, vous allez la raccompagner à lâaéroport. » Et la jeune femme de sâéclipser sous les regards dâune Danielle Mitterrand désormais complice dâune scène devenue rituel.
Lâancienne journaliste du Figaro , Christine Clerc, qui visita Latche en 1974, fit ainsi lâobjet de toutes ces attentions : « Ãa lâintéressait de vous débusquer, de deviner ce quâil y avait au-delà des apparences et usages. François Mitterrand savait vous évaluer au gramme près », se souvient celle qui dit ne pas avoir succombé, pour autant, à ses nombreuses avances. François Mitterrand eut quant à lui une tout autre lecture des choses : « Elle me fait du gringue, mais je ne lâaime pas. Cette femme est dâextrême droite ! », trancha-t-il un jour dâun air mauvais et dâune bouche dégoûtée, lui qui évita de la recroiser sur son chemin.
Débarquant un samedi matin, lâune de ces autres journalistes de passage, qui revendiquait des talents culinaires, avait proposé à Danielle Mitterrand de lui cuisiner un plat de sa composition. Mais, à lâheure où elle sâapprêtait à regagner Paris, à la demande de celui qui venait de lui faire « visiter » son domaine et sa bergerie, Danielle sâétait écriée : « Ah non, pas ce soir, François ! Elle nous a promis de nous faire son farci ! » François Mitterrand sâinclina, la jeune femme se dirigea vers les fourneaux. Et la bergerie et son président de locataire accueillirent une invitée pour la nuitâ¦
Chapitre 13
Un « vrai mec » !
Câétait sur les petits chemins escarpés qui mènent au sommet de la roche de Solutré, en 1984. Lâété, un ciel bleu immaculé, un grand soleil. Arrimés lâun à lâautre, un ministre et sa compagne tentaient de rattraper, au bord de lâapoplexie, le cortège de séminaristes emmenés par celui qui effectuait sur ces coteaux son pèlerinage annuel. Lâhomme nâétait autre que le secrétaire dâÃtat à la Communication de François Mitterrand, Georges Fillioud. Et la femme, une piquante comédienne à la silhouette de poupée, Danièle Evenou.
Outre le fait quâil suait sous la chaleur et que, circonstance aggravante, il avait raté le début de la procession, le couple enrageait. Jack Lang, qui ne tolérait pas la présence dans le premier cercle de François Mitterrand de « ce Fillioud » â un amateur éclairé de femmes, lui aussi, qui partageait avec « lâhomme à la rose » nombre dâhistoires et de secrets dâalcôve â, lui avait tout simplement menti quant à lâheure exacte de départ fixée pour lâillustre ascension ! Georges Fillioud bouillonnait dâautant plus quâil voulait profiter de cette occasion pour présenter sa toute dernière conquête à celui qui cheminait depuis lâaube, loin devant. Marcher, toujours, cette
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