Les Amazones de la République
jeunes femmes jurer à genoux des amours éternelles.
De Valéry Giscard dâEstaing à François Hollande, pour ne se cantonner quâà ses seules quarante dernières années, les couloirs de ce Palais sont ainsi peuplés dâhistoires dâalcôve et de récits parfois éminemment romanesques. Lâair élyséen a parfumé la chair dâune brochette dâélégantes passées par les rédactions de France et de Navarre : des plus capées aux plus novices. Ici, une femme belle et un homme beau le sont plus que partout ailleurs. Et si certaines parmi ces journalistes, véritables vestales de la profession à la mémoire et aux sourires voilés par lââge, ont tapé sur les claviers jaunis de vieilles Remington au milieu des années soixante-dix, dâautres, plus récemment, ont martyrisé celui de leur iPhone.
Mais toutes ont en commun dâavoir succombé, sans résistante aucune, à ses différents locataires, feignant dâignorer que bien avant elles, ils en ont courtisé tant dâautres. Sur tous les tons et tous les refrains.
Découvrant les pages qui vont suivre, le lecteur sâinterrogera sans doute sur les raisons qui ont incité lâauteur à révéler lâidentité de certaines de ces femmes et à oblitérer les patronymes dâautres. à lâheure où nos dirigeants ont pris pour habitude, sur le plan médiatique, dâinstrumentaliser leur vie privée à des fins politiques, il eût été sans doute normal, pour beaucoup, que nous fassions Åuvre dâune totale transparence. La mise à nu des patrimoines de nos ministres et députés nâest-elle pas en soi le plus grand strip-tease de la V e  République ? Dâautant quâavec des médias qui se sont ramifiés, capillarisés, notamment via Internet, on y échappe de moins en moins. Au point que la vie est devenue source dâinconfort, de traque et de harcèlement pour celles et ceux qui se trouvent exposés et surexposés. Aussi lâobservateur, le témoin, lâauteur, le journaliste a-t-il un rôle majeur : il nâest pas un relais neutre par lequel tout doit passer, sans tamis, ni limites, au nom dâune époque. Retranchées derrière les digues dâune vie privée quâelles tiennent à préserver tel un sanctuaire, certaines de ces « amazones », rencontrées à lâoccasion de cet ouvrage, se sont livrées sans fard, mais sous le sceau dâun anonymat requis. Une prière.
Dâautres ont choisi de se mettre à nu, estimant quâavec le ressac des années, tout cela nâétait plus quâanecdotes lointaines. Quand dâautres ont enfin accepté de se confesser, sans frein ni tabou, empêtrées dans des souvenirs quâelles nâont pas entièrement gommés de leur mémoire. LâÃlysée ? Un nirvana, une Terre promise pour les unes. Mais un désert, un enfer, un cauchemar, une douleur pour les autres.
Chapitre 2
Ces dames de LâExpress
Au commencement fut une icône, pythie ou diva de la presse française, selon ses admirateurs : Françoise Giroud. Statufiée de son vivant, celle qui dirigea LâExpress â après que lâombre tutélaire de Jean-Jacques Servan-Schreiber se fut estompée â, fut la reine de la ruche.
Françoise de quelle époque, Françoise de quel siècle, de quel passé ? Cette figure du journalisme a tellement marqué de son empreinte lâhistoire de ce métier quâelle semble intemporelle. Dix ans après sa mort, en janvier 2003, toute une génération continue de perpétuer le mythe, évoquant son passage à la tête de cet hebdomadaire, avec componction : leur révérence.
Mais même les plus dévots parmi ses thuriféraires ou héritières concèdent que « la dame de LâExpress » avait tout de même un art tout particulier et bien à elle pour apprivoiser la classe politique : collée à lâÅilleton des cénacles de la République, elle la tint à bout de gaffe avec maestria, le verbe aguichant et lâÅil vrillant.
Lâhistoire est désormais connue : dès le milieu des années soixante, Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud eurent
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