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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Barba-Roja.
    Bien qu’il eût de très légitimes raisons de considérer le
colosse comme un ennemi, le Torero avait une trop généreuse nature
pour hésiter sur la conduite à tenir en semblable occurrence. Sans
prendre le temps d’achever de se vêtir, sauter sur sa cape et son
épée, partir en courant, tel fut son premier mouvement.
    Il pensait atteindre la piste en quelques bonds et il espérait
arriver à temps pour sauver son ennemi en attirant l’attention du
taureau vers lui.
    Mais il avait compté sans l’encombrement que nous avons signalé.
Traverser une telle cohue n’allait pas tout seul. Il ne pouvait
avancer que lentement, trop lentement au gré de son impatiente
générosité.
    Étroitement pressé dans la cohue, qu’il s’efforçait vainement de
traverser, il apprit la foudroyante intervention du gentilhomme
français.
    On ne nommait pas ce gentilhomme. Mais le Torero ne pouvait s’y
tromper. Pardaillan, seul, était capable d’un trait de bravoure et
de générosité pareil. S’il s’était élancé, sans hésiter, pour
apporter son aide à un ennemi, on conçoit les efforts désespérés
qu’il fit pour voler au secours d’un ami qui lui était très cher.
Pour lui, comme pour l’immense majorité des assistants, la mort du
téméraire était à peu près certaine.
    Rien n’est plus féroce qu’une foule de badauds qui veulent voir,
surtout lorsqu’ils ne peuvent arriver à satisfaire leur curiosité.
La foule des inutiles qui encombrait le couloir, où ils n’avaient
que faire, se chargea de lui démontrer péremptoirement la véracité
de ce que nous avançons.
    Il eut beau se nommer, crier son intention de courir sus au
taureau, jouer des coudes, frapper furieusement à droite et à
gauche, on lui opposait une inertie souriante. On murmurait :
« Le Torero ! ah ! le Torero ! » mais on
ne lui cédait pas un pouce du terrain.
    C’est ainsi, pressé de toutes parts, écumant de rage et de
colère, étreint par l’angoisse, qu’il dut, en se rongeant les
poings de désespoir, se contenter d’écouter le récit du combat fait
à voix haute, par ceux qui voyaient, répété et commenté de bouche
en bouche par ceux qui ne voyaient pas, mais restaient enracinés à
leur place, ce qui leur permettrait de dire plus tard :
    – J’étais là. J’ai tout vu et tout entendu !
    La formidable acclamation qui suivit la mort du taureau ne put
le tirer d’inquiétude. Il savait, en effet, que dans leur
engouement pour ces luttes violentes, les spectateurs électrisés
acclamaient impartialement aussi bien la bête que l’homme,
lorsqu’un coup excitait leur admiration.
    Heureusement les commentaires qui suivirent vinrent lui apporter
un peu d’espoir. Il n’eut qu’à prêter l’oreille pour entendre les
exclamations les plus diverses :
    – Le taureau s’est écroulé comme une masse ! – Un
coup, un seul coup lui a suffi, señor ! – Et avec une méchante
petite dague ! – Splendide ! Merveilleux ! – Voilà
un homme ! – Quel dommage qu’il ne soit pas Espagnol ! –
Le plus admirable, c’est que c’est le même gentilhomme qui a,
l’autre jour, administré la correction que vous savez à ce pauvre
Barba-Roja, qui joue de malheur décidément ! – Quoi, le
même ? – C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire, señor.
L’autre jour il corrige Barba-Roja, aujourd’hui il s’expose
bravement pour le secourir. C’est noble, généreux ! – Mais
alors c’est le même qui, à ce qu’on dit, a osé parler à notre sire
le roi, comme nous ne parlerions pas à un valet de chenil ! –
C’est lui, certainement ! – Le même qui inspire une telle
frayeur à Mgr d’Espinosa qu’il en perd le sommeil, à ce qu’on
prétend ! – Pas possible ! Le grand inquisiteur ? –
Lui-même.
    Et patati et patata.
    En moins d’une minute, le Torero en apprit cent fois plus sur
les faits et gestes de Pardaillan, que celui-ci ne lui en avait dit
depuis qu’il le connaissait.
    Malgré tout il n’était pas encore rassuré, lorsque le mouvement
de la foule, s’écartant pour faire place au triomphateur, le mit
face à face avec celui qu’il s’était vainement efforcé de
secourir.
    – Hé ! cher ami ! fit le chevalier, de son air
railleur, où courez-vous ainsi, demi-nu ?
    Tout heureux de le retrouver sans l’apparence d’une blessure, le
Torero s’écria en désignant de la main la foule qui les
entourait :
    – Je voulais

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