Les années folles
petit collet en dentelle,
traversa la route à pied en compagnie d’Agathe Cournoyer et de Joseph Groleau. La
promise portait un petit bouquet de fleurs, don du bedeau qui avait mis ses
plus beaux atours pour lui servir de témoin.
Quand Gabrielle
entra dans l’église au bras de Joseph Groleau, elle fut très surprise de voir
une trentaine de personnes sur les lieux. Si la plupart lui étaient inconnues, elle
reconnut tout de même Hélèna Pouliot et Thérèse Tremblay, à qui elle avait
parlé lors de la guignolée.
La cérémonie
présidée par le curé Lussier fut toute impie. L’organiste, Clémence Perreault, avait
pris sur elle de venir jouer quelques morceaux, même si Germain avait
totalement oublié de réserver ses services pour occasion. Après une brève homélie
dans laquelle il rappela les devoirs sacrés des époux l’un envers l’autre, le
prêtre bénit leur union.
Les nouveaux
mariés descendirent l’allée centrale de l’église sous les regards inquisiteurs
de l’assistance, Germain, toujours aussi timide, fixait le parquet en mariant
tandis que sa femme, la tête bien droite, s’avançait ses côtés en le tenant par
le bras.
Sur le parvis, Thérèse
s’avança vers le jeune couple et lui apprit que leurs voisins leur feraient un
cortège jusqu’à chez elle où on avait organisé une petite fête en leur honneur.
– Mais il
fallait pas, bredouilla Germain, rouge de confusion.
– Voyons donc,
Germain. On se marie juste une fois dans la vie. Il faut fêter ça, lui dit
joyeusement sa voisine pour le mettre à l’aise.
– Monsieur
Groleau, est-ce que vous pouvez amener madame Cournoyer avec vous ? demanda
Yvette Veilleux au bedeau.
– Beau
dommage ! répondit le vieil homme, probablement alléché par la possibilité
de boire un bon coup à la santé des jeunes mariés.
Avant
de monter en voiture, Yvette glissa à ses deux voisines, après avoir jeté un
regard inquiet au ciel menaçant :
– J’espère
que le bon Dieu va être bon pour nous autres et qu’il viendra pas gâcher notre
petite fête.
– S’il
mouille, Yvette, on se dépêchera d’entrer dans la maison avec le manger, la
rassura Thérèse. Ce sera pas la fin du monde, tu vas voir.
Le
petit cortège formé de cinq voitures se mit lentement en route pour le rang
Sainte-Marie sous une volée de cloches. Gabrielle semblait goûter chaque
instant de ce qu’elle considérait comme un triomphe. Elle était maintenant
mariée et n’était plus la servante de personne. Durant le trajet, plusieurs
villageois sortirent sur leur balcon pour saluer les nouveaux mariés.
Quelques minutes
plus tard, les voitures s’immobilisèrent dans la cour des Tremblay et les
invités descendirent et entourèrent les nouveaux mariés. Ernest, l’air
renfrogné, laissa les siens devant la maison du voisin avant de poursuivre seul
sa route jusque chez lui.
Claire, demeurée à
la maison avec les trois enfants des Hamel, avait décoré la table sur laquelle
elle avait déjà déposé la nourriture.
Avant de passer à table, Eugène servit du vin de cerise aux femmes et
du caribou aux hommes. Comme la chaleur se faisait encore plus oppressante, les
hommes retirèrent leur veston et leur cravate pour être plus à l’aise et tout
le monde prit place autour de la table. La tête fromagée, le jambon et le pain
de ménage fournis par les trois familles disparurent aussi vite que les deux
gâteaux au chocolat.
– Où est
passé ton mari ? finit par demander l’hôtesse à Yvette.
– À la maison.
– Pourquoi il
est pas venu ? Il était pourtant à l’église.
– Tu le
connais. Il boude dans son coin, comme d’habitude.
– Les hommes
et leurs maudites chicanes, laissa tomber Thérèse, réprobatrice.
– Ça, tu peux
le dire, renchérit Yvette.
Les
deux femmes abandonnèrent le sujet pour se mêler à la joyeuse conversation qui
avait lieu autour de la table. Maria Pierri expliquait à Rita Hamel comment
elle confectionnait les feuilletés qu’elle avait apportés à la noce.
– Et ton
voyage de noces, quand est-ce que tu vas le faire ? demanda Eugène Tremblay
au nouveau marié.
– L’automne
prochain, quand l’ouvrage va être moins pressant, répondit Germain. On pense
aller passer deux ou trois jours à Trois-Rivières.
Un peu plus loin, Anne Veilleux s’était approchée de Clément Tremblay, qui
avait très peu parlé durant la petite fête.
– Tu sais que
t’es à la
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