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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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n’y eut pas d’orage durant la nuit. Le
lendemain, la chaleur était toujours aussi insupportable. Un soleil de plomb
brillait dans un ciel sans nuages. Pas un souffle d’air ne faisait bouger les
feuilles des arbres. Les vaches avaient trouvé refuge sous les rares arbres
plantés en bordure des champs. Des milliers d’insectes invisibles remplissaient
l’air de bruits assourdissants. L’humidité rendait pénible tout effort physique.
    À midi, Clément rentra du champ où il était
allé étendre du paillis entre les rangs de fraisiers. Ses inquiétudes de la
veille lui parurent soudain sans fondement quand sa mère lui tendit deux
lettres qui lui étaient adressées. Elles avaient été livrées le matin même par
le postier. Toutes les deux provenaient de Céline. Par on ne sait quel hasard, l’une
des lettres s’était perdue dans le courrier et lui parvenait en même temps que
celle écrite la semaine précédente.
    Si la lettre la
plus ancienne ne présentait rien de spécial, la seconde, par contre, l’inquiéta.
Céline lui apprenait que sa cousine lui avait demandé de demeurer avec elle, à
Montréal, au moins jusqu’en juillet.
    – Elle
reviendra jamais de là-bas, murmura-t-il à voix basse, en repliant la missive
qu’il glissa avec l’autre dans la poche arrière de son pantalon.
    Après
le dîner, il retourna, la mine sombre, travailler avec son père et Gérald.
    Durant l’après-midi,
Thérèse Tremblay vit arriver sa voisine immédiate, Rita Hamel. La jeune femme, coiffée
d’un large chapeau de paille, était accompagnée de deux de ses jeunes enfants.
    – Ma foi du
bon Dieu, Rita, cherches-tu à attraper ton coup de mort à te promener comme ça
en plein soleil ! s’exclama Thérèse en sortant sur son balcon. Il fait
chaud sans bon sens. Viens t’asseoir sur le balcon, à l’ombre, avec les petits.
    L’épouse
de Georges Hamel, une petite brunette vive et pleine d’énergie, prit dans ses
bras sa fillette et poussa devant elle son garçon âgé de trois ans, avant de
gravir elle-même les trois marches conduisant au balcon des Tremblay. En
mettant le pied sur le balcon, elle retira le chapeau de paille posé sur son
épais chignon brun et elle l’agita devant elle pendant un instant pour s’éventer.
    – C’est vrai
qu’il fait chaud, admit la jeune femme avec un sourire, mais il fallait que je
vous parle.
    Rita
Hamel n’était jamais parvenue à tutoyer Thérèse Tremblay et Yvette Veilleux, ses
deux voisines, probablement à cause de la vingtaine d’années qui les séparait. Elle
avait pratiquement l’âge de Claire Tremblay.
    – Pas une
mauvaise nouvelle, j’espère ?
    – Non. Je
voulais juste vous dire que Georges a parlé hier avec Germain Fournier. Vous
savez qu’il se marie samedi, dans deux jours.
    – Oui, on en
a entendu parler comme tout le monde.
    – Bien. Germain
a demandé à Georges de lui servir de témoin.
    – Comment ça ?
Le mari de sa sœur Florence aurait pu le faire.
    – Il a dit à
mon mari que sa sœur pouvait pas venir à ses noces. Ça fait qu’il lui a demandé
d’être son témoin.
    – Qui va être
le témoin de sa future femme ? C’est une orpheline, non ?
    – Oui. Il
paraît que c’est Joseph Groleau qui va l’être.
    – Ça va faire
des petites noces en pas pour rire s’ils ont pas de parenté ni l’un ni l’autre,
poursuivit Thérèse.
    – C’est pour
ça que je suis venue vous voir, madame Tremblay. Georges a demandé à Germain ce
qu’il avait prévu pour ses noces, l’autre lui a dit qu’il avait rien prévu. Pas
de voyage de noces et pas de repas de noces.
    – Voyons donc !
s’exclama la voisine. As-tu entendu ça, Claire ? demanda-t-elle à sa fille
qui venait de sortir à l’extérieur pour se joindre aux deux femmes.
    – Il paraît
qu’Agathe Cournoyer pensait pouvoir organiser un petit repas dans sa maison ou
même au presbytère, reprit Rita, mais monseigneur Côté arrive à la fin de l’après-midi
et le curé Lussier a besoin d’elle pour préparer le souper. Il aurait même
suggéré à la future de Germain de remettre ses noces à samedi de la semaine prochaine.
On sait bien, lui…
    La
voisine s’arrêta juste à temps. Elle venait de se rappeler que Thérèse n’accepterait
jamais qu’elle critique le curé de la paroisse, surtout devant sa fille et de
jeunes enfants, assis sagement sur le balcon. Elle se rappelait encore comment
elle l’avait sèchement

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