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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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besoin
d’aide.
    – Oui, monsieur
le curé, répondit sans enthousiasme l’adolescent.
    Emile Tougas quitta les lieux de l’accident sans trop se presser, se
souvenant encore trop bien de quelle façon le prêtre l’avait traité quand il l’avait
puni pour avoir pris les vêtements de l’abbé Martel l’été précédent.
    Le curé Lussier ne
demeura pas inactif en attendant l’arrivée des secours. Lorsqu’il voulut se
tâter de la main droite pour vérifier s’il n’avait pas un os brisé, il se
rendit compte qu’il était incapable de soulever son bras droit, qui lui faisait
soudain un mal de chien. De la main gauche, il essuya la sueur qui lui couvrait
le front. Quand il ramena sa main, il vit qu’elle était
maculée de sang. Selon toute vraisemblance, il n’avait qu’une sérieuse
écorchure au front. Le prêtre prit quelques instants de plus pour vérifier si
ses jambes étaient intactes. Tout lui sembla normal jusqu’au moment où il
rassembla son énergie pour se mettre debout. Une fois sur ses deux jambes, il
grimaça de douleur en posant son poids sur sa jambe gauche. Si aucun os de ses
jambes n’était brisé, il souffrait tout au moins d’une sérieuse entorse à la
cheville gauche et de plusieurs ecchymoses.
    – Et le père
Groleau ? demanda-t-il à mi-voix en réprimant une grimace de douleur.
    Il
était soudain très inquiet du sort de son vieux cocher. En clopinant tant bien
que mal, il se mit en devoir de couvrir les quelques pieds qui le séparaient du
vieil homme encore étendu, inerte, dans le fossé. Sans perdre un instant, Antoine
Lussier se pencha sur l’homme, imaginant déjà le pire. Une forte odeur d’alcool
l’accueillit.
    – D’où
vient cette senteur-là ? se demanda le curé à haute voix.
    Il
aperçut alors une bouteille brisée dont les débris jonchaient l’herbe tout près
de son cocher. Par un hasard extraordinaire, la bouteille de caribou dissimulée
sous le siège du boghei par le père Groleau avait été éjectée à peu de distance
de son propriétaire lors de l’accident.
    Le cœur battant, le
curé se laissa tomber à genoux près de son bedeau et se pencha au-dessus de lui
pour vérifier s’il lui restait encore un souffle de vie. Il crut entendre un
ronflement. Il approcha son oreille encore plus près du visage de l’accidenté. Non
seulement entendit-il plus clairement ses ronflements, mais il baigna dans des
effluves d’alcool.
    – C’est pas
vrai ! s’exclama le prêtre. Viens pas me dire qu’il dort ! Ah bien, le
vieil ivrogne !
    Ce
disant, le curé Lussier empoigna son cocher de sa main valide et se mit à le
secouer sans ménagement pour le réveiller.
    – Quoi ?
Qu’est-ce qu’il y a ? demanda l’autre, tout étonné de se retrouver étendu
dans le fossé. Où est-ce qu’on est ?
    – Dans le
fossé, père Groleau ! Dans le fossé ! lui hurla le curé, hors de lui.
On a eu un accident parce que vous vous êtes endormi.
    L’air
ahuri du vieil homme aurait prêté à rire si la situation n’avait pas été aussi
grave.
    – Bon,
levez-vous, lui ordonna le prêtre en colère, et aidez-moi à me relever. J’espère
que vous avez les idées assez claires pour voir si vous avez rien de cassé.
    Le
cocher se leva en geignant, mais selon toutes les apparences, le dieu des
ivrognes l’avait protégé. Il se pencha pour ramasser son chapeau et celui de
son curé. Ce dernier le lui arracha presque des mains, tant il était furieux. Il
vit Joseph Groleau regarder autour de lui comme s’il était à la recherche de
quelque chose.
    – Cherchez
pas votre boisson, le père ! Ça, au moins, ça a pas résisté à l’accident. Si
vous êtes capable de vous tenir debout, vous allez m’aider à marcher jusque
chez les Tougas. L’Emile a pas l’air de s’être pressé pour avertir son père qu’on
avait besoin d’aide.
    – Je pourrais
toujours y aller tout seul, proposa obligeamment Joseph Groleau chez qui l’accident
semblait avoir chassé une partie des vapeurs engendrées par l’alcool.
    – Laissez
faire. Vous en avez assez fait pour aujourd’hui, le rembarra sèchement le curé.
Venez, aidez-moi.
    Appuyé
sur l’épaule de son bedeau pour soulager sa cheville gauche, le gros prêtre, le
bras droit pendant mollement à son côté, prit la direction de chez Antonius
Tougas en geignant. Quelques minutes plus tard, ce dernier vint au devant des
deux hommes et les fit monter dans sa voiture. Il les

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