Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
escortée de la terreur et toujours précédée des placards de l’homme de sang, s’avançait rapidement vers son but. Ainsi les conjurés allaient, sur les débris de toutes les autorités et de toutes les réputations, commencer leur règne. Ainsi tu marchais à grands pas, Robespierre, vers ce pouvoir dictatorial dont la soif te dévore. Mais des hommes résolus t’attendaient. Ils avaient juré par Brutus que si tu arrivais à ce pouvoir tu ne le garderais pas plus d’un jour. » Les Marseillais applaudirent belliqueusement.
    La force d’inertie de Pétion, la force d’activité de Roland dénonçant à la France entière les scélérats, la fermeté des Brissotins, l’insuccès de la circulaire du Comité de surveillance aux communes, enfin les premiers succès de Dumouriez, avaient arrêté la conjuration, déclara Louvet. Pointant l’index vers Maximilien qui, pâle de colère, serrait les lèvres, il lança : « Robespierre ! je t’accuse d’avoir depuis longtemps calomnié les plus purs patriotes. Je t’accuse de les avoir calomniés avec plus de fureur à l’époque des premiers jours de septembre, dans un temps où tes calomnies étaient des proscriptions. Je t’accuse d’avoir, autant qu’il était en toi, méconnu, persécuté, avili, la représentation nationale, et de l’avoir fait méconnaître, persécuter, avilir. Je t’accuse de t’être continuellement produit comme un objet d’idolâtrie, d’avoir souffert devant toi que l’on dît que tu étais le seul homme vertueux de la France, le seul qui pût sauver la patrie, et de l’avoir vingt fois donné toi-même à entendre. Je t’accuse d’avoir tyrannisé l’assemblée électorale de Paris par tous les moyens d’intrigue et d’effroi. Je t’accuse d’avoir évidemment marché au suprême pouvoir. »
    Il demanda qu’un comité fût formé pour examiner la conduite de Robespierre, et une loi portée pour condamner au bannissement, comme dans l’ancienne Grèce, tout individu qui aurait fait de son nom un sujet de division entre les citoyens. Nouveaux applaudissements des Marseillais. À gauche, on haussait les épaules. Louvet n’avait réussi qu’à rassembler de vaines imputations cent fois ressassées, sans aucune preuve. Mais il n’en avait pas fini. Après avoir touché Danton, atteint Robespierre, il lui restait à frapper Marat. Il n’y manqua point.
    « Législateurs ! s’écria-t-il, il est parmi vous un autre homme. Son nom ne souillera pas ma bouche. Un homme que je n’ai pas besoin d’accuser, car il s’est accusé lui-même. Lui-même, il vous a avoué qu’il avait conseillé la subversion du gouvernement, poussé à l’établissement du tribunat, de la dictature, du triumvirat. Lui-même, il vous a dit qu’il fallait faire tomber cent soixante mille têtes. Et cet individu est encore au milieu de vous ! La France s’en indigne, l’Europe s’en étonne. J’insiste pour qu’à l’instant vous prononciez sur cet homme de sang, dont les crimes sont prouvés. Si quelqu’un a le courage de le défendre, que celui-là monte à la tribune. Mais, croyez-moi, pour notre gloire, pour l’honneur de la patrie, ne nous séparons pas sans l’avoir jugé. Je demande sur l’heure un décret d’accusation contre Marat. Dieux ! je l’ai nommé ! »
    Louvet fut applaudi et félicité par ses amis, acclamé même sur quelques banquettes, à droite. Cependant sa philippique n’agissait guère sur la majorité. La Plaine devait penser comme Claude : il jugeait particulièrement absurde d’aller voir une conjuration là où justement, et hélas, il n’y avait jamais eu qu’actions dispersées, empiriques réactions aux circonstances, incapacité de concerter une marche ou même de définir précisément une politique. Une conjuration ! quand on n’avait jamais fait que tâtonner comme des aveugles en se cognant les uns aux autres. Seuls les nouveaux venus pouvaient ignorer cela. Aussi, lorsque Robespierre, désireux de préparer cette fois soigneusement sa défense, demanda un délai pour la présenter, il l’obtint sans effort. On l’assigna au lundi 5 novembre. Il ne fut même pas question de Marat. L’assemblée vota l’impression du rapport Roland sur Paris, avec toutefois cette restriction : il ne serait point envoyé aux départements tant que Robespierre n’aurait pas été entendu.
    « Le deuxième assaut contre la députation parisienne est tombé à plat comme le

Weitere Kostenlose Bücher