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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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Pensez donc, je m’étais permis de faire appuyer mes compagnies par une batterie à cheval ! Beurnonville, d’ailleurs, me l’avait très libéralement accordée…»
    Bernard s’arrêta brusquement, confus de s’être trahi de la sorte. Tout le monde l’écoutait en silence. Lise le regardait, les yeux brillants. Il rougit, se sentit encore plus mal à l’aise. « Pardonnez-moi, citoyenne, balbutia-t-il en se tournant vers la maîtresse de maison et en s’inclinant. Pardonnez à un malappris qui monopolise la conversation pour chanter ses propres louanges.
    — Point du tout ! protesta le papa Duplay avec chaleur. Nous avons plaisir à vous entendre.
    — Pourquoi ne nous as-tu jamais rien dit de tout cela ? se récria Claude.
    — Ce ne sont pas choses dont on parle. Il a fallu l’indignation, le hasard, pour qu’elles m’échappent, et, ajouta-t-il à l’adresse encore de ses hôtes, le sentiment de me trouver ici dans le sanctuaire même du patriotisme.
    — Surtout, observa Robespierre, comment n’avons-nous pas été mis au courant de ces actions ? Voilà bien les façons des intrigants. Si des soldats mercenaires ou des officiers ci-devant, des amis du vieillard Roland ou de Brissot, avaient remporté ces avantages, la faction en eût fait retentir la tribune et les presses. Mais les victoires du peuple, on les cache. Citoyen Delmay, j’approuve entièrement ta façon de comprendre la guerre. Je suis heureux, pour le bien national, que tu nous aies ouvert ton cœur. Tu as raison, nous purgerons les armées des généraux aristocrates.
    — Oh ! il y a de bons soldats parmi les anciens chefs de corps. Il faudrait seulement qu’ils eussent auprès d’eux des Jacobins pour leur apprendre la démocratie.
    — C’est une idée. Nous y songerons.
    — Dumouriez, principalement, aurait besoin de surveillance. C’est un grand stratège, qui a seulement le défaut de négliger les détails. Je ne me fierais pas à son caractère : on lui voit tous les penchants d’un dictateur.
    — Danton se trouve auprès de lui, dit Claude.
    — Je n’attends pas grand-chose de Danton, répliqua Bernard en hochant la tête. Il parle, il parle, c’est tout. »
    Robespierre eut un demi-sourire. Ce jeune Delmay était décidément un esprit de la première finesse. « Il faut pourtant, mon ami, dit Maximilien, nous en remettre à Dumouriez pour quelque temps encore. Il est engagé dans de vastes plans contre les ennemis et nous ne devons pas y faire obstacle. Quant à toi, sois tranquille, justice te sera rendue.
    — Je ne demande pas justice. Je ne me plains de rien, en ce qui me concerne ; je désire uniquement le triomphe de la République et que l’on fournisse aux patriotes les moyens de l’assurer.
    — Justement, on te les fournira. »
    Deux jours plus tard, comme Lise et Bernard attendaient Claude pour dîner, il entra, avec des yeux qui riaient. Déposant un pli sur les genoux de Lise, il lui dit : « Tiens, ma chère amie, donne-le-lui toi-même. » Elle savait ce que c’était. Heureuse elle aussi, émue, elle tendit le papier à Bernard et le prit par la taille.
    « Que manigancez-vous, tous les deux ? fit-il, stupéfait.
    — Eh bien, regarde. »
    Il rompit le cachet aux armes de la république, déplia la feuille. C’était un billet de Beurnonville : « Citoyen, j’ai plaisir à te mander que je viens de signer à ton nom une commission de brigadier. Le Comité de défense te la remettra…»
    « Ah ! non ! protesta-t-il, non, ce n’est pas possible. J’ai claironné mes exploits, l’autre soir, comme un vantard outrecuidant, et aujourd’hui on me… Non. De quoi ai-je l’air ?
    — D’un homme que l’on met au poste pour lequel ses vertus le désignent. Ton seul défaut, c’est d’être cachottier. En faisant rechercher dans les dossiers de Servan et de Pache, le Comité de défense a découvert bien plus que tu n’en as dit. En particulier, que tu avais été blessé.
    — Blessé ! s’exclama Lise.
    — Allons donc ! Une éraflure.
    — Du reste, Beurnonville t’avait proposé pour ce grade le jour même où tu as pris Boussu. Tu devrais être général depuis trois mois. Le cabinet de Pache était une vraie pétaudière. Beurnonville, interrogé à ton propos, a répondu qu’il te croyait déjà promu et s’est empressé de signer cette commission. Maintenant, ajouta Claude sur le mode badin, frémis, mon cher ! Tu vas être mandé à

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