Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
tous ? Il n’y en a pas un qui repoussera un ennemi !
    — Si bien, dit Delmas. La résistance de Mayence vaut plusieurs victoires, croyez-moi. Nous lui devons d’être encore libres. Si Aubert-Dubayet et le lieutenant-colonel Kléber, par leurs héroïques sorties, n’empêchaient pas Frédéric-Guillaume d’ouvrir la tranchée, son armée réunie à celle de Cobourg serait depuis longtemps ici. Voulez-vous que je vous dise ? eh bien ! Mayence, c’est notre paratonnerre. Il nous donne le temps d’organiser des armées qui battront les Prussiens, les Autrichiens, les Anglais, et les Vendéens aussi. Il faut faire marcher le recrutement, l’instruction militaire et les fournitures, voilà tout. Allons ! de l’énergie ! Ne nous laissons pas offusquer par deux malencontres de plus. Nous aurons notre revanche. »
    Force n’en fut pas moins de communiquer les fâcheuses nouvelles à la Convention, d’où elles se répandirent très vite par toute la ville. Elles achevèrent d’exciter les sans-culottes. La salle des pétitionnaires qui arrivaient par le vestibule aux colonnes, puis longeaient la galerie basse, se remplit. De là, les députations se succédaient dans le long couloir aboutissant à la barre. Toute la relevée, il en défila, avec des pancartes : « Résistance à l’oppression », « Le peuple souverain », et, nécessairement, la vieille devise jacobine : « Liberté ou la mort. » Au nom de leur section, d’une société populaire ou d’un comité patriotique, les orateurs demandaient raison des monstrueuses menaces d’Isnard, la mise en accusation des députés qui avaient voulu armer les départements contre Paris, la suppression de la commission des Douze. Dans la soirée, il devint manifeste que l’on allait à une nouvelle insurrection. Chaumette, à l’Hôtel de ville, dénonçait « la conspiration évidente que le côté droit de la Convention et plusieurs ministres trament contre la liberté ». Le Comité de Sûreté générale, logé sur le Petit-Carrousel, dans l’hôtel de Brionne, envoya deux de ses membres prévenir le Comité de Salut public qu’un directoire insurrectionnel avait été formé à l’Évêché par les commissaires de trente-cinq sections. Cette assemblée comprenait environ cinq cents personnes, parmi lesquelles une centaine de femmes et, à leur tête, la citoyenne Lacombe, cordelière, signalée par les espions comme une sans-culotte très exaltée. L’assemblée déclarait que les autorités établies ne sauveraient point la République. Il fallait, comme au 10 août, remettre la souveraineté entre les mains du peuple. L’assistance avait avant tout juré de respecter les propriétés. C’est alors qu’un directoire de six membres avait été élu sous l’impulsion du cordelier Dufourny, pour aviser aux moyens de salut public. Le premier de ceux-ci, présenté par Dufourny lui-même, consistait dans la nomination d’un commandant général des sections armées, en remplacement de Santerre. La citoyenne Lacombe avait pris la parole, approuvé vigoureusement cette proposition et dit qu’il fallait des moyens extraordinaires.
    N’étaient présents à cette heure, au pavillon de l’Égalité, que Delacroix, Barère, Claude, Treilhard, Danton. Il haussa les épaules. « Je les avais prévenus, ces ânes. Par haine de Marat, ils ont anéanti l’inviolabilité des représentants. Ils ont cherché les triques, tant pis pour eux ! Allons voir ça. » Il partit avec Delacroix, pour les Cordeliers.
    « Que devons-nous faire ? s’enquirent les envoyés du Comité de Sûreté générale.
    — Le peuple est souverain, hasarda prudemment Treilhard, nous ne sommes que ses représentants. S’il veut exercer lui-même ses droits, nul ne peut s’y opposer, il me semble. »
    Barère se contenta de hocher la tête, sans se compromettre. « Attendez et surveillez, trancha Claude. L’assemblée de l’Évêché ne menace pas la République, au contraire. De plus elle est composée de commissaires légitimement désignés par la majorité des sections. Je refuse d’agir contre elle. »
    Il sortit à son tour, pour aller aux Jacobins. Barère le suivit et, seul à seul, le félicita de sa réponse. Claude ne répondit pas. Paris était calme dans la nuit claire. Il n’y avait d’agitation – mais simplement des va-et-vient – que dans la rue Saint-Honoré jusqu’au portail de la Société. Des gens sortaient, s’en allant

Weitere Kostenlose Bücher