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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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des clubs, anéanti par vous, fasse place au règne de la loi. »
    Cette fois, Danton se déchaîna, et non plus en vagues prédictions mais avec des propositions bien précises. Comme Robespierre accusait La Fayette de viser à la dictature, Danton, tonnant, déclara qu’il fallait destituer ce traître et pour cela se porter immédiatement dans les sections, qu’elles se réunissent sur l’heure, qu’elles nomment des représentants avec lesquels on allait se rendre à la barre de l’Assemblée et exiger la révocation de La Fayette. Fabre d’Églantine et les Cordeliers étaient prêts à partir, mais Brissot, Condorcet, tous les Girondins, quoique très violents envers le général, ne soutinrent pas la motion. Robespierre la jugeait inefficace : l’Assemblée ne pouvant pas révoquer un chef militaire, dont la destitution comme la nomination dépendait constitutionnellement de l’exécutif. Claude fit sagement remarquer que la tentative offrirait un excellent prétexte à une action de la Cour, et l’on n’était pas en force pour y résister victorieusement.
    « Tu as raison, lui dit ensuite Danton. Il faut préparer la révolution définitive et la lancer à coup sûr. Tu as raison comme toujours, mais mon idée d’agir par les sections est bonne. Voilà le chemin à suivre. »
    On était au 18 juin. La Cour avait pris tant d’assurance que le Roi fit connaître à l’Assemblée sa décision d’opposer son veto au décret sur le camp des fédérés et au décret sur la déportation des prêtres réfractaires.
    « Eh bien, dil Claude à Lise, au moins la situation est nette à présent. Il ne peut plus y avoir de doute pour personne. Il me semble revenir en juillet 89, quand Louis XVI, poussé par la Cour qui se croyait très forte, refusait d’éloigner les troupes. Trois ans ! Trois ans pendant lesquels le Roi et la Reine n’ont rien appris, rien compris. Elle lui fera toujours commettre les mêmes sottises. Et pourtant quelle patience, quelle indulgence, quelle bonne volonté n’avons-nous pas montrées envers eux ! Mais s’ils prennent notre longanimité pour de la faiblesse, ils sont en train de se préparer un rude réveil. »

VI
    Depuis plus d’un mois, Louis Naurissane, resté peu de temps à Paris, l’avait quitté pour Rouen. Le 19 juin, une lettre de lui apprit à Claude et Lise qu’il était maintenant à Bordeaux. Il se rapprochait de Limoges sans oser y rentrer. Cependant tout y semblait assez calme, d’après ce que Claude et sa femme savaient par la correspondance. Thérèse disait qu’on ne l’avait pas inquiétée, mais, ajoutait-elle, « l’agitation contre les prêtres réfractaies, les parents d’émigrés, les anciens Amis de la Paix, et en gnéral tous les riches, sauf, bien entendu, les riches de l’espèe Nicaut, Pinchaud, etc., va sourdement croissant. Vos Jacoquins, dans leurs sabbats au Collège, couchent sur des listes leurs bêtes noires, en tête desquelles figure Louis avec M. Mailhard de Lalande, M. Pétiniaud de Beaupeyrat. Ils les déclarent suspects d’aristocratie et d’intentions contre-révolutionnaires. » Cela, sans doute, n’incitait guère au retour. Pourtant Naurissane ne pouvait rester éternellement séparé de sa femme, loin de son foyer.
    « Je ne les comprends pas, Thérèse et lui, observa Lise. Pourquoi s’obstiner là-bas ? Ils n’ont qu’à vendre leurs biens, liquider leurs affares et s’installer ailleurs : à Paris, ou Bordeaux.
    — Mon petit cœur, c’est aisé à dire. Qui achèterait leur hôtel, à l’heure présente ? Qui achèterait Brignac ? »
    La discussion fut interrompue par Margot. Lise et elle étaient fort occupées de leurs préparatifs pour recevoir, le soir même, le ménage Danton avec les Charpentier, les Duplessis et leur fille cadette, Robespierre, Pétion et sa bonne femme, enfin l’évêque Gay-Vernon. Il n’y aurait pas les Desmoulins. Lucile, fatiguée par sa grossesse, ne sortait plus : Camille, en bon mari, restait près d’elle.
    Danton arriva le premier avec sa belle Gabrielle, suivis de près par l’évêque jacobin. La conversation s’établit tout de suite sur l’affaire Lazouski. Le Polonais, membre du Conseil général de la Commune, avait annoncé, à l’Hôtel de ville, que le 20, pour l’anniversaire du serment du Jeu de Paume, le peuple des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau planterait un arbre de la liberté sur la terrasse des Feuillants.

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